Santé mentale : déjà près de 300 malades extirpés des rues de Yaoundé

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L’opération de ramassage des malades «baptisée zéro malade dans les rues de Yaoundé» mentaux errants présents dans la capitale, lancée en mai 2021, en collaboration avec le ministère de la Santé publique (Minsanté) porte des fruits.

À ce jour, près de 300 malades ont été extirpés de la rue et transférés à l’hôpital Jamot. D’autres ont retrouvé leurs familles. Cette opération vise à récupérer d’abord, ensuite, transférer, traiter et renvoyer les personnes souffrant de troubles mentaux, dans leurs familles. Ils sont pour la plupart atteints de schizophrénie et de troubles de comportement liés à la consommation de drogues, d’après la Communauté urbaine de Yaoundé (Cuy). A l’hôpital Jamot, ils sont pris en charge dans un pavillon spécialisé baptisé « Village de l’amour », réhabilité par la Cuy. C’est également elle qui prend en charge leur hébergement, leur nutrition et leur traitement. Le traitement peut être médical, comme social.

Le 05 mai dernier, le maire de la ville de Yaoundé, Luc Atangana Messi a lancé une campagne pour éradiquer le phénomène des malades mentaux errants dans les rues de Yaoundé. Sauf que 07 mois plus tard, « ces malades de la tête » ont à nouveau investi les rues de la ville aux sept collines. Dans les rues, dans les dépotoirs d’ordures, devant les édifices publics, leur présence est devenue banale. A quelques encablures du rond-point Damas, dans le troisième arrondissement de la ville de Yaoundé, un malade mental défèque à l’aire libre sous le regard impuissant des riverains et des automobilistes ainsi que les piétons. Le spectacle désolent s’est déroulé le samedi 04 décembre 2021, à l’environ de 10heures. Un peu plus loin, au lieu-dit collège Frazatti, un autre malade mental livre sa nudité aux regards surpris des élèves.

Du côté de la sous-préfecture d’Efoulan, une fois de plus, c’est un monsieur assis devant un chantier abandonné, qui oriente les piétons. Victimes de dépression, de schizophrénie et d’épilepsie ou d’al-coolo-dépendance (pour ne citer que les plus courantes), les personnes souffrant des troubles mentaux sont visibles dans la ville de Yaoundé. Selon l’Organisation mondiale de la santé (Oms), 75 à 85 % des personnes souffrant de troubles mentaux graves ne reçoivent aucun traitement dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, contre 35 à 50% dans les pays à haut revenu. L’insuffisance en moyens humains et logistiques ajoutée au nombre sans cesse croissant des malades mentaux limitent énormément les capacités d’accueil de l’hôpital Jamot de Yaoundé. Une situation d’autant plus préoccupante surtout que le Cameroun va organiser la Coupe d’Afrique des Nations du 09 janvier au 06 février 2022. Le phénomène explose aussi à cause du manque de soutien de la communauté. Certaines familles, épuisées et désespérées, ne se donnent plus la peine de s’occuper de leurs malades et finissent par baisser les bras. D’autres, de guerre lasse, n’arrivent pas à contenir les violences et les comportements étranges de leurs « fous ». Ce délaissement familial explique en partie la prépondérance des pratiques traditionnelles et ésotériques dans le traitement des malades mentaux. C’est parfois l’inverse. C’est après avoir fait le tour des églises, des marabouts et autres que la famille décide d’amener le malade à l’hôpital. Le mauvais état de la psychiatrie s’explique enfin sous nos cieux par l’absence d’une véritable politique de prévention des facteurs qui constituent les principales causes des maladies mentales.

Il fait savoir qu’en l’absence de traitement, le patient rechute. Celui-ci est alors généralement abandonné par la famille qui est épuisée de dépenser. « C’est le cas de plusieurs fous qui sont actuellement dans les rues de Yaoundé », affirme le Dr. Laure Menguene, psychiatre. Elle note aussi l’insuffisance des médecins psychiatres au Cameroun, comme étant un facteur de ces errances des fous dans les rues. Le Dr. Laure Menguene fait savoir que la prise en charge de ces « fous » n’est pas de la seule responsabilité des hôpitaux, mais de l’ensemble de la société. « L’hôpital Jamot est scindé en plusieurs services, parmi lesquels l’on compte celui spécialisé dans les maladies psychiques. Nos missions sont celles de la prévention ou du traitement. La prise en charge des malades mentaux qui sont dans la rue n’est pas la responsabilité des hôpitaux, mais de toute la société », déclare la psychiatre.

Elvis Serge NSAA

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