
Une alliance scellée pour accélérer la lutte contre les violences basées sur le genre et renforcer l’éducation et l’autonomisation des filles.
Rescapée d’un mariage précoce et forcé, figure internationale de la littérature engagée, la romancière camerounaise Djaïli Amadou Amal a été officiellement désignée Ambassadrice nationale de ONU Femmes au Cameroun, à l’issue de la signature d’un mémorandum d’entente entre l’agence onusienne et son association « Femmes du Sahel ».
La cérémonie, marquée par la signature d’un Mémorandum d’entente (MoU) entre ONU Femmes Cameroun et l’association « Femmes du Sahel », consacre un partenariat tourné vers l’action : scolarisation des filles, prévention du mariage précoce, lutte contre toutes les formes de violences faites aux femmes et appui à l’autonomisation économique.
Représentant ONU Femmes au Cameroun, Marie‑Pierre Raky Chaupin a expliqué le choix porté sur l’écrivaine : « Nous avons choisi Djaïli Amadou Amal parce qu’elle incarne, par son histoire et par son œuvre, la résilience, le courage et la capacité de transformation. Elle a fait de sa plume un levier de changement social et de son vécu un plaidoyer pour que plus aucune fille ne soit réduite au silence. »
Pour l’agence onusienne, ce partenariat consolide l’ancrage communautaire des programmes de prévention, accélère l’accès des filles à l’éducation et renforce les initiatives de génération de revenus au bénéfice des femmes les plus vulnérables.

Le combat d’une vie, raconté sans détour
Dans un témoignage bouleversant, Djaïli Amadou Amal a rappelé son parcours de survivante : envoyée en mariage à 17 ans, elle connaît la violence conjugale, l’humiliation sociale et l’isolement. « Quand j’ai dit non, on m’a traitée de rebelle, de mauvaise épouse, de mauvaise mère », a-t-elle confié, évoquant le renversement de culpabilité subi par tant de femmes.
La lecture devient sa planche de salut. Les autrices africaines la confortent dans l’idée que la violence n’est pas une fatalité. Puis vient la décision : quitter, protéger ses enfants, et transformer sa douleur en combat collectif. Écrire, pour dire l’indicible. Militer, pour que d’autres n’endurent pas.
« Je ne voulais pas me sauver seule. Il fallait un combat pour toutes les femmes », a-t-elle martelé, rappelant aussi son engagement à éduquer ses fils à une masculinité positive : « Qu’ils soient le soutien des femmes, jamais leurs bourreaux. »
De la plume au terrain : « Femmes du Sahel », 13 ans d’impact
Fondée en 2012, l’association « Femmes du Sahel » agit au nord du Cameroun pour l’éducation des filles, la sensibilisation contre le mariage précoce et les violences basées sur le genre, la création de bibliothèques et l’autonomisation économique.
Le bilan parle de lui-même : 2012 : 25 filles parrainées à la création. Aujourd’hui : 500 enfants accompagnés, 90 % de filles. Plusieurs bénéficiaires sont désormais en licence professionnelle à Douala et à Maroua.
Cette dynamique sera amplifiée par l’appui de ONU Femmes, avec des programmes conjoints, des ressources techniques et une visibilité accrue pour mobiliser partenaires et financements.
Une reconnaissance… et un serment
Recevant son attestation, l’écrivaine a exprimé une gratitude mêlée d’émotion : « Être ambassadrice de ONU Femmes, c’est la reconnaissance d’un travail et d’un combat. Je porterai haut votre combat et la voix de toutes les femmes. »
Le MoU ouvre un nouveau chapitre : plaidoyer national et international, actions communautaires coordonnées, et influence culturelle à travers une œuvre désormais étudiée au Cameroun et à l’étranger, notamment en France. De tabous, ses romans sont devenus outils pédagogiques.

Siège de ONU-Femmes à Yaoundé au Cameroun.
Un message d’espoir
Du « non » qui dérange à la voix qui rassemble, Djaïli Amadou Amal incarne la preuve qu’un destin entravé peut devenir une force collective. Avec ONU Femmes et « Femmes du Sahel », son combat change d’échelle, mais pas de cap : éduquer, protéger, autonomiser, jusqu’à ce qu’aucune fille ne soit condamnée au silence.
Rappelons que, cette cérémonie de signature du Mémorandum d’entente entre ONU Femmes et l’association « Femmes du Sahel » s’est tenue dans un contexte hautement symbolique, à l’occasion de la 19ᵉ édition de la campagne mondiale des « 16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes et aux filles », célébrée par ONU Femmes et son partenaire, le Réseau des Médias Africains pour la Promotion de la Santé et de l’Environnement (REMAPSEN). Un timing fort, qui donne encore plus de portée à cet engagement commun en faveur des droits, de la protection et de la dignité des femmes et des filles au Cameroun.
Mireille Siapje
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