Par Jean Besane Mangam
La tuberculose fait partie des pathologies sur lesquelles l’Etat investit d’énormes moyens afin de faciliter le diagnostic et le traitement. Dans la région de l’Adamaoua, le Groupe Technique Régional de lutte contre cette maladie se déploie à l’effet de dépister et de prendre en charge les cas confirmés. Dans une interview accordée à votre journal, le coordonnateur régional GTR-TB estime que les résultats sont satisfaisants sur l’ensemble de la région. Selon lui, au cours de deux dernières années, les objectifs ont été atteints. « Alors, il faut dire que la tuberculose, pour ce qui est du cas particulier de l’année 2023, on peut se féliciter quand même du fait qu’il y a eu une nette amélioration par rapport à l’année 2022 », affirme le docteur Achille Christian Bekono Salla.
A en croire ses explications, les formations sanitaires de la région disposent des Centre de Diagnostique et de Traitement des patients souffrants de la maladie. Les campagnes de sensibilisations de masse permettent de diagnostiquer et de mettre sous traitement tous les cas confirmés. Ce qui permet d’assurer un contrôle de la maladie.
Des efforts dans le dépistage de la TB pédiatrique.
Malgré les efforts déployés pour le dépistage et la prise en charge de la tuberculose sous toutes ses formes, celle des enfants nécessite plus d’engagement. « Il faut dire que déjà la tuberculose de l’enfant est restée longtemps lésée parce que certainement on peut se dire qu’on peut le mettre sous le cou de sa clinique qui est assez complexe et du coup les gens n’y prêtent pas trop attention » déclare le coordonnateur. Et de conseiller, « Il faudrait que dans toutes les formations sanitaires que les gens puissent s’approprier de la clinique, que nous puissions avoir aussi des instruments diagnostiques qui nous permettent de dépister suffisamment et mettre tous ces enfants sous traitement ».
Le contrôle de l’infection, un défi majeur
Au cours de l’année écoulée, une dizaine de personnels médicaux a contracté la maladie en prodiguant des soins aux patients. Pour le coordonnateur, il faut une maîtrise du contrôle de l’infection. « Pour ce qui est l’année 2023, nous avons eu même des cas assez considérables. Vous-vous imaginez dans la région de l’Adamaoua on a eu dix personnels de santé qui ont été infectés, donc sept à l’hôpital régional de Ngaoundéré, un personnel à Ngaoundal, un personnel à Tibati et un autre à Bankim. C’est pour dire que personne n’est à l’abri de l’infection tuberculose ». Et de conclure, « Nous invitons les CDT, les formations sanitaires, à encourager tous les services à faire un plan de contrôle de l’infection ».
Au moment où le contrat avec le Fonds mondial de lutte contre la tuberculose a été renouvelé, l’objectif du GTR TB dans l’Adamaoua reste calqué sur l’éradication de cette maladie d’ici 2030.
Interview
« On s’est aussi nettement amélioré »
Docteur Achille Christian Bekono Salla, Coordonnateur Régional du Groupe Technique de lutte contre la tuberculose dans l’Adamaoua, « Mettre fin à la tuberculose d’ici les années 2030 et 2035 dont nous allons continuer dans la même mouvance ».
Quelle est la situation de la tuberculose dans l’Adamaoua ?
Alors, il faut dire que la tuberculose, pour ce qui est du cas particulier de l’année 2023, on peut se féliciter quand même du fait qu’il y a eu une nette amélioration par rapport à l’année 2022. Si nous ne parcourons de façon ramassée nos indicateurs, pour ce qui est peut-être de la tuberculose, toute forme confondue, pour l’année 2022, si j’ai bonne mémoire, on était parti sur une cible de 2536 cas qu’on devait en principe notifier. La même année, je parle bien de 2022, nous avons pu notifier 1906 cas. C’est une tuberculose de toutes formes confondues. Alors, pour ce qui est par contre en 2023, on est reparti aussi sensiblement sur la même cible qui était de 2584 cas. Et nous nous sommes quand même rapprochés, c’est vrai qu’on a eu un léger gap, nous sommes rapprochés de la cible en notifiant sensiblement dans les 2079 cas. Ça, c’est pour parler de la tuberculose de toutes formes confondues. Alors, sinon pour le reste des indicateurs, particulièrement si je peux m’attarder sur la tuberculose de l’enfant. L’année passée, on nous a attribué une cible qui cadrait entre 10 et 12 %. En 2022, nous sommes allés sensiblement à 9 % de la cible. Donc, on n’était pas très loin, on n’était pas très loin. Par contre, en 2023, effectivement, la région de l’Adamaoua, on avait le maillot jaune parce que nous étions d’ailleurs la seule région qui a pu atteindre, n’est-ce pas, la cible de 12 % dans toutes les régions du Cameroun. Maintenant, donc, des indicateurs comme, par exemple, la tuberculose de toutes formes confondues, on est resté aussi dans la même dynamique en 2023.
Pour ce qui est des cas de co-infection, on est même allés au-delà de la cible qui nous a été attribuée. Pour ce qui est de la co-infection, on s’est aussi nettement amélioré, n’est-ce pas, en arrivant à convaincre ces personnes co-infectées déjà à faire des tests, à être observant au traitement et les résultats, n’est-ce pas, ont suivi. Maintenant, on fait une comparaison peut-être pour ce qui est de la tuberculose multi résistante. Effectivement, les mêmes chiffres peuvent se refléter en 2023.
S’il fallait comparer les années 2022 et 2023, que diriez-vous ?
On s’est aussi nettement amélioré, quoique nous n’avons pas atteint la cible, parce que l’année passée en 2022, nous étions sur une cible de 14 cas , n’est-ce pas, notifiée dans notre région.
Nous avons pu dépister 7. Par contre, en 2023, on est parti sur la même cible et on a dépisté 13. Et les 13 mêmes, c’est-à-dire qu’on a eu un gap d’un seul cas. Les 13 mêmes, c’était dû au fait que les campagnes que nous avons prévues dans les centres pénitentiaires de la région n’ont pas connu beaucoup de succès, par ce que buté aux contraintes de temps et parfois aussi les machines moléculaires qui ne nous ont pas beaucoup aidé avec des pannes récurrentes. Mais sinon, de façon globale, on peut se féliciter pour le travail qui a été abattu en 2023 parce que les chiffres, comme je l’ai dit tantôt, parlent d’eux-mêmes. Donc voilà un peu pour ce qui est de la tuberculose dans la région de l’Adamaoua.
Quels sont les indicateurs en ce qui concerne la tuberculose pédiatrique ?
Il faut dire que déjà la tuberculose de l’enfant est restée longtemps, j’ai envie de dire un peu lésée parce que certainement on peut se dire qu’on peut le mettre sous le cou de sa clinique qui est assez complexe et du coup les gens n’y prêtent pas trop attention. Mais au fil des années les choses se sont améliorées et pour ce qui est du cas particulier de l’Adamaoua, je vous l’ai dit tantôt, pratiquement des années nous portons le maillot jaune du Cameroun pour ce qui est de la tuberculose pédiatrique. Ça veut dire qu’un travail de fond est fait pour que de plus en plus ces cas soient diagnostiqués. La prise en charge est comme chez les adultes, on sait les antituberculeux à un certain âge, période ça se prend en fonction des kilos dans une certaine période, pratiquement les mêmes anti-tuberculeux qu’on donne. C’est vrai qu’il y a des formes pédiatriques qu’on donne aux enfants mais généralement cette prise en charge aussi va dans le sens des certains paramètres comme le poids, c’est à dire qu’on donne en fonction du poids et tout ce qui va avec. Mais sinon pour ce qui est de la région de l’Adamaoua, nous faisons notre bonhomme de chemins et on s’en sort plutôt bien. On sait qu’on peut faire mieux parce que les cas de tuberculose pédiatrique, il y en a, il faudrait peut-être que dans toutes les formations sanitaires que les gens puissent s’approprier de la clinique, que nous puissions avoir aussi des instruments diagnostiques qui nous permettent de dépister suffisamment et mettre tous ces enfants sous traitement.
Je l’ai dit, c’est vrai, les choses ont nettement évolué, les choses ont beaucoup évolué. Je l’ai dit tantôt, la clinique, déjà la clinique de la tuberculose chez les enfants, elle est assez complexe. Et vous connaissez nos régions avec tout ce qui va comme coutume et croyance, déjà lorsqu’on amène un enfant à l’hôpital pour un cas de toux, dire à son parent déjà qu’on soupçonne la tuberculose, vous pouvez imaginer tout le scandale qui peut être derrière cela. Mais il faut dire que des efforts sont faits. Et c’est vrai aussi qu’il y a mieux à faire parce que pour qu’on puisse, par exemple, faire un examen de lame, il faut des crachats. Et pour faire un crachat, vous n’avez pas demandé à un enfant de tousser et de vous fournir le bon crachat, déjà les adultes, il faut déjà leur montrer comment tousser pour récupérer le bon crachat. Donc généralement, ce qu’on utilise, ce sont des sondes qui permettent à ce qu’on puisse recueillir un crachat, un liquide qui puisse permettre, par exemple, un examen de lame. Pourquoi pas envoyer pour dépister. Il faut dire que nous manquons encore parce que dans nos formations sanitaires, ce matériel est parfois indispensable et c’est d’ailleurs ce qui complique davantage le dépistage dans les différentes formations sanitaires.
Docteur, vous le disiez tantôt, la région de l’Adamaoua est maillot jaune et dans la région, on sait que c’est généralement le district de Ngaoundal qui a quand même une formation sanitaire qui s’illustre par ses prouesses. Alors quel est le genre d’appui que vous apportez à cette formation sanitaire-là pour toujours maintenir sa place?
Alors, il faut dire qu’au-delà de ce que nous apportons, je préfère commencer par là, au-delà de ce que nous apportons, le district de santé Ngaoundal bénéficie déjà de ce que, dans ce district, l’hôpital de district, c’est une formation privée qui a des ramifications externes qui de temps en temps apportent un appui à cette formation sanitaire. Et justement, dans le cas particulier de la tuberculose, il y a un, groupe de médecins pneumologues qui, pratiquement chaque année viennent souvent booster le dépistage de la tuberculose, et particulièrement pour ce qui est de la tuberculose pédiatrique.
Et ce bon résultat, nous pouvons d’une part l’attribuer à cet appui de ces professionnels de santé.
Oui, c’est tout ce que nous apportons aux autres CDT.
C’est vrai quand même que nous avons un regard particulier, parce qu’il ne faut pas se le cacher, c’est l’une des formations sanitaires qui notifient le plus particulièrement pour ce qui est de la tuberculose pédiatrique. Donc, nous nous arrangeons quand même à ce que tout ce que nous avons comme matériels, intrants, qu’il y ait des priorités dans ces formations sanitaires. C’est vrai qu’il bénéficie déjà d’une structure bien équipée pour ce qui est de l’appareillage, c’est une formation sanitaire privée qui a d’ailleurs un dine expert qui revient à cette formation sanitaire. Donc, comprenez que la ressource humaine, elle est là, les outils de diagnostique sont là et naturellement, on ne peut qu’avoir de bons résultats.
Est-ce que tous les centres de santé ou toutes les formations sanitaires prennent en charge la tuberculose ou alors la tuberculose pédiatrique?
Naturellement, lorsqu’on parle de notification de tuberculose de façon globale, on parle d’abord de toutes les formes confondues, c’est-à-dire il y a la tuberculose de l’enfant, tuberculose des adultes si vous permettez la discrétion et même des cas de tuberculose MDR.
On peut dépister une tuberculose en cas de MDR loin du centre de prise en charge.
Donc tous les cas de tuberculose sont pris en charge dans les CDT.
Donc on peut suspecter tout cas. Maintenant, en fonction des outils de diagnostic que nous avons en place, on peut faire tel ou tel test.
Généralement dans les CDT où il n’y a pas des outils moléculaires qui permettent par exemple de dépister la résistance, les cas qui sont éligibles, on prélève juste et puis on transfère là où l’outil moléculaire est disponible et puis on fait un reportage des résultats. Et si le cas s’avère positif, on le classe et on le prend en charge en fonction de la catégorie de malade qu’on a devant nous.
Comment se passe le contrôle de l’infection ?
Alors, je voudrais finir avec un bulletin important. Parfois, nous parlons peu du contrôle de l’infection dans les différentes formations sanitaires. Il faut dire que quand on parle du contrôle de l’infection, c’est comment est-ce que la maladie est perçue ou alors est-ce qu’à une certaine période, il y a eu des personnels de santé qui ont été infectés. Pour le cas particulier de la tuberculose. Alors, nous voulons parler de cela parce que pour ce qui est l’année 2023, nous avons eu quand même des cas assez considérables. Vous-vous imaginez dans la région de l’Adamaoua on a eu dix personnels de santé qui ont été infectés, donc sept à l’hôpital régional de Ngaoundéré, un personnel à Ngaoundal, un personnel à Tibati et un autre à Bankim. C’est pour dire que personne n’est à l’abri de l’infection tuberculose.
Il faut peut-être se le rappeler, la tuberculose évolue parfois.
Généralement, même j’ai envie de dire de façon latente, chez les êtres humains, nous pouvons tous être infectés de la tuberculose mais sans faire la maladie parce qu’il y a un volé tuberculose infection et tuberculose maladie. Donc, il faut donc dire que c’est important d’en parler et de rappeler aux personnels de santé qu’on n’est pas à l’abri de la tuberculose. Et ça, les chiffres les démontrent. Si on a déjà, pour une année, dix personnels de santé qui ont été infectés, ça veut dire qu’il y a un sujet à réflexion et il y a beaucoup de choses qui doivent encore être faites. C’est pour ça que nous invitons les CDT, les formations sanitaires, à encourager tous les services à faire un plan de contrôle de l’infection. Ça permet à ce que le taux de contagion, en tout cas pour ce qui est du personnel de santé, soit réduit et qu’on ne revive plus ça parce que les années antérieures, on a perdu des personnels de santé qui ont été infectés de la tuberculose.
Quels sont vos principaux défis pour l’année 2024 qui est sur les rails depuis quelques mois?
Nous sommes pour ce qui est l’année 2024, c’est une nouvelle convention que nous commençons, que nous débutons avec le Fonds mondial dont les défis sont les mêmes.
L’objectif du ministère de la Santé, c’est de mettre fin à la tuberculose d’ici les années 2030 et 2035 dont nous allons continuer dans la même mouvance. Nous allons multiplier, intensifier les campagnes de dépistage en masse. Nous allons peaufiner la stratégie des recherches actives des cas et ça pour toutes les formes de tuberculoses confondues.
Et puis, nous allons davantage impliquer les médias, pour le volet communication au niveau des communautés pour que les gens sachent que la tuberculose est une maladie infectieuse qui peut se guérir et d’ailleurs du diagnostic jusqu’au traitement. La prise en charge, elle est gratuite. Donc voilà un peu nos défis, nous améliorer, nous améliorer et réduire. Tout ce que nous avons eu comme gap, faire de mieux en mieux pour la tuberculose pédiatrique où on se comporte déjà assez bien mais nous améliorer davantage.
Propos recueillis par Jean BESANE MANGAM