Cameroun : les états généraux de la santé s’imposent
Par Joseph MBENG BOUM
Il ne fait l’ombre d’aucuns doutes que le système de santé camerounais est malade. Il souffre de nombreux maux. Tant dans son organisation que dans sa pratique au quotidien. Le non aboutissement de plusieurs réformes engagées depuis quelques années est l’un des facteurs aggravants de ce mal. Le problème majeur du système de santé est sa « faible capacité à répondre aux besoins socio-sanitaires des populations et à contribuer au développement d’un capital humain sain et productif ».
Ce problème a pour conséquences : la faible adoption des comportements sains par les populations ; les fortes prévalences et incidences des facteurs de risque des maladies évitables ; la prise en charge des cas peu satisfaisante tant dans les formations sanitaires qu’au niveau communautaire ; une morbidité et une mortalité élevées ; l’inaccessibilité financière de soins et services pour les bénéficiaires ; la réduction de la force de travail dans la population en général.
Cause du mal
Ce problème résulte de quatre causes majeures suivantes : la gouvernance peu satisfaisante ; l’accès inéquitable des populations aux soins de santé; la formation initiale dispensée aux personnels de santé et la recherche en santé inadaptées aux besoins du secteur; la qualité des soins dispensés peu satisfaisante.
L’analyse causale de ces dysfonctionnements, relève les aspects suivants : la gouvernance dans les formations sanitaires. A ce sujet, sept causes principales identifiées : la faiblesse institutionnelle ; la mauvaise organisation de l’offre de soins et services de santé ; la corruption rampante; l’inefficacité et l’inefficience de la gestion des ressources; la mauvaise organisation de la participation communautaire ; l’insuffisance de la communication interne et externe dans les hôpitaux ; la faiblesse organisationnelle du partenariat.
Le deuxième aspect abord l’accès inéquitable des populations aux soins de santé : avec le problème de l’accessibilité physique aux soins et services; l’accessibilité financière aux soins et services de santé; l’accessibilité socio–culturelle des populations aux soins et services de santé.
Le troisième revient sur la formation initiale et la recherche en santé inadaptée aux besoins du secteur avec l’absence de définition des stratégies de formation initiale des Personnels de santé et le déficit d’organisation de la recherche opérationnelle.
La quatrième cause majeure étant la qualité des soins dispensés peu satisfaisante. Pour le comité d’experts, le développement des ressources humaines sans visibilité ; la mauvaise gestion des ressources humaines; l’inadéquation entre les ressources financières et les missions des établissements ; le déficit en plateaux techniques ; les faiblesses dans l’organisation et le fonctionnement des formations sanitaires sont autant de maux qui minent le secteur de la santé au Cameroun.
Etats généraux de la santé
Face à la décrépitude du système de santé, les acteurs en appellent à l’organisation des Etats des lieux de la santé au Cameroun. Il s’agira pour ses derniers de proposer à la population camerounaise une offre de soins coordonnées, de qualité et à des coûts maîtrisés: ceci étant le défi à relever par le Comité des Etats généraux de la santé.
L’objectif devra être de donner la parole aux usagers du système de soins, personnes malades ou citoyens. Plus qu’une consultation technique sur des thèmes précis, il s’agira de sortir du débat de la confrontation d’experts et de tester des méthodes nouvelles de participation et de démocratie directe sur les questions de santé pour répondre au besoin de débat et de communication des citoyens. Le dispositif mis en place devrait permettre leur information sur la politique de santé et l’expression de leurs besoins et de leurs attentes.
Gestion de l’information
L’information, la transparence dans le fonctionnement du système de santé et l’éducation à la santé. L’exigence de transparence rejoint le besoin de considération. Le rétablissement du dialogue, la diminution de l’asymétrie d’information entre soignant et soigné sont des conditions nécessaires à l’amélioration de la relation.
Cette exigence, est fortement réclamée au travers des prises de parole d’un genre sur les différentes plates-formes. Elle ne s’exprime pas en opposition, en confrontation avec les professionnels de santé, mais une absence de réponse à ce besoin a transformé la relation, la déplaçant de la confiance vers la méfiance. L’enjeu est considérable et l’objectif de transparence ne pourra être atteint sans jouer sur différents registres : amélioration bien sûr de l’information communiquée, individuellement ou collectivement, mais aussi éducation des patients.
L’accessibilité au système sanitaire et social
Elle concerne de multiples aspects, répartition géographique de l’offre de soins, accessibilité des urgences, accessibilité financière, complexité dans l’organisation.
C’est le passage d’une réponse technique, jugée généralement satisfaisante à une prise en charge globale de la personne, qui est également posé par les citoyens qui ont débattent de ce thème.
L’amélioration de la protection des droits des personnes malades et plus largement des usagers du système de santé. Les droits existent, de nombreux textes épars les précisent, la charte du malade hospitalisé devrait éviter bien des difficultés. Pourtant les personnes malades témoignent de l’absence de considération, de l’écart qu’elles ont constaté entre leurs droits théoriques et l’exercice de ces droits.
Ce constat devra conduire le Comité national d’orientation à réfléchir davantage aux modalités propres à améliorer l’exercice des droits plutôt qu’à la création de nouveaux droits. Pour autant, il est probablement nécessaire également de regrouper l’ensemble des textes régissant ces droits dans une loi sur le droit des personnes malades, de nature à améliorer leur visibilité, donc leur perception et leur exercice
Les futurs États généraux de la santé seront tournés vers l’identification et la mise en œuvre de leviers novateurs qui contribueront à donner une nouvelle impulsion à nos politiques et programmes de santé dont l’objectif premier, au cours des cinq prochaines années, est de favoriser l’accès d’un plus grand nombre de nos concitoyens à des services de santé efficients et de qualité.
Ils visent cinq actions prioritaires pour le secteur de la santé ; à savoir : moderniser le système de santé, renforcer le système de soins et les grands programmes de santé publique, mettre en place de nouveaux mécanismes de financement des actions de santé et améliorer l’hygiène publique à tous les niveaux. Toutes ces résolutions devraient permettre aux populations de bénéficier de la couverture santé universelle.