
Au Cameroun, pour le cancer de l'ovaire, l'âge moyen au diagnostic est de 49 ans, et 90,3 % des cas sont des tumeurs épithéliales.
Le cancer de l’ovaire est une menace insidieuse qui s’attaque principalement aux femmes de plus de 60 ans, mais ne s’arrête pas là. Ses symptômes, discrets au début, le rendent particulièrement difficile à diagnostiquer précocement, transformant chaque jour d’attente en une course contre la montre.
Des récits déchirants de femmes ayant frôlé le pire, combinés à des statistiques alarmantes, soulignent l’impératif d’une prise de conscience collective et de l’adoption de stratégies de dépistage plus affûtées.
Le professeur Jean-Marie KASIA, administrateur directeur général du centre hospitalier de recherche et d’application en chirurgie endoscopique et reproduction humaine (CHRACERH), nous livre son expertise sur le cancer de l’ovaire
Le cancer de l’ovaire, surnommé le « tueur silencieux », est une menace insidieuse qui s’attaque principalement aux femmes de plus de 60 ans, mais ne s’arrête pas là. Ses symptômes, discrets au début, le rendent ardu à diagnostiquer précocement, transformant chaque jour d’attente en une course contre la montre. Des récits déchirants de femmes ayant frôlé le pire, combinés à des statistiques alarmantes, soulignent l’impératif d’une prise de conscience collective et de l’adoption de stratégies de dépistage plus affûtées.
Au Cameroun, comme ailleurs, la situation est critique et exige une action immédiate. Le manque de symptômes spécifiques et reconnaissables dans les premiers stades est le talon d’Achille de la lutte contre le cancer de l’ovaire. Des femmes comme Marie, 58 ans, témoignent de cette effroyable réalité. « J’avais des douleurs abdominales persistantes, des sensations de ballonnement, mais je les mettais sur le compte du stress ou de la digestion. » Jamais je n’aurais imaginé que c’était un cancer de l’ovaire. « Quand le diagnostic est tombé, la tumeur était déjà à un stade avancé. » Son histoire n’est pas isolée. Ces symptômes, souvent vagues (douleurs pelviennes, augmentation du volume abdominal, troubles du transit), sont facilement confondus avec des affections bénignes, retardant ainsi la consultation médicale et le diagnostic. C’est cette absence de signaux d’alerte clairs qui rend le dépistage précoce si complexe. Dans des pays comme le Cameroun, où les infrastructures de santé et l’accès aux spécialistes sont parfois limités, cette difficulté est exacerbée.
Les statistiques le confirment : au Cameroun, pour le cancer de l’ovaire, l’âge moyen au diagnostic est de 49 ans, et 90,3 % des cas sont des tumeurs épithéliales. Plus alarmant encore, 74,2 % des cancers de l’ovaire sont découverts aux stades 2 et 3 de la classification FIGO. Cela signifie que la grande majorité des femmes sont diagnostiquées lorsque la maladie est déjà étendue au-delà des ovaires, rendant les traitements plus lourds et moins efficaces. Au Cameroun, selon le Comité national de lutte contre le cancer, l’incidence annuelle des cancers diagnostiqués par l’histologie est passée de 1000 à 12000 cas entre 1992 et 2008. Quarante-neuf pour cent de ces cancers ont été diagnostiqués chez les femmes avec une nette prédominance des cancers gynécologiques. Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) touche environ 6 à 13 % des femmes en âge de procréer. Jusqu’à 70 % des femmes touchées ne sont toujours pas diagnostiquées dans le monde.
En effet, les antécédents familiaux jouent un rôle crucial dans le développement du cancer de l’ovaire. Cependant, d’autres facteurs tels que l’absence de grossesse, des menstruations précoces ou une ménopause tardive peuvent également influencer le risque. Par ailleurs, certains choix de vie, comme la consommation de tabac et d’alcool, la sédentarité ou une alimentation déséquilibrée, sont également des facteurs aggravants.
Le traitement du cancer de l’ovaire repose principalement sur la chirurgie, souvent complétée par une chimiothérapie avant et/ou après l’intervention. L’opération consiste généralement à retirer les ovaires, l’utérus et les trompes de Fallope. Pour les femmes jeunes ayant un projet parental et dont le cancer est au stade 1, seul l’ovaire touché peut être retiré. L’arrivée de traitements ciblés, notamment pour les cancers d’origine génétique (comme les inhibiteurs de PARP), offre de nouvelles perspectives et un espoir grandissant.
Le principal défi demeure cependant le dépistage. Actuellement, le dépistage systématique du cancer de l’ovaire n’est pas recommandé. Cependant, un suivi rigoureux et des examens sont proposés aux femmes considérées comme à risque, notamment celles ayant des antécédents familiaux. Il est impératif de renforcer la prévention et le dépistage de ces cancers, qui sont souvent diagnostiqués à des stades tardifs, réduisant considérablement les chances de succès des traitements.
Elvis Serge NSAA