Carnet de route : Voyage au cœur de la région de l’Adamaoua

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Entre l’utilisation des voitures des années 1980, comme la mythique Saviem, et le mauvais état des routes, le parcours entre Meiganga, Borgop, Djohong et Ngam offre un cocktail de difficultés et de convivialité. Ces zones, pourtant d’importants bassins agropastoraux, restent difficilement accessibles en raison de l’état déplorable des axes routiers. 

Surnommée affectueusement « la région la plus proche du paradis » ou encore « celle où coulent le lait et le miel », l’Adamaoua peine à mériter cette réputation en matière d’infrastructures. Si elle excelle dans la production laitière et apicole, ses routes, elles, transforment le voyage en véritable calvaire pour les nouveaux venus.  Entre Nganhi (ou Roblin) et Djohong, une centaine de kilomètres seulement, il faut compter au moins 10 heures de trajet pour les chauffeurs les plus aguerris, voire 15 heures dans les pires conditions. En saison des pluies, les voyageurs doivent s’attendre à pousser les véhicules embourbés, une tâche si fréquente que certains chauffeurs privilégient les passagers masculins, jugés plus utiles pour ces manœuvres éprouvantes. « C’est aussi ça, contribuer à l’effort du voyage », ironisent les habitués.

Quant aux véhicules qui s’aventurent sur ces routes, seules les Saviems, ces vieux cars réputés robustes, osent affronter le trajet. Les agences de voyage évitent généralement cette zone, malgré la présence de deux camps de réfugiés (Borgop et Ngam) et d’un important marché à bétail à Ngaoui. À bord, marchandises, animaux et passagers se partagent l’espace sans formalité. « À prendre ou à laisser », disent les locaux, car il n’y a souvent que deux départs par jour : tôt le matin ou en début d’après-midi.  Certains voyageurs, faute de place à l’intérieur, s’accrochent à l’arrière du car, voire sur le toit, comme des sentinelles improvisées. Les contrôles de police, bien que présents, suivent des codes bien rodés : les sans-papiers savent comment s’arranger rapidement pour ne pas retarder le convoi. « C’est ça aussi, voyager dans notre paradis appelé Adamaoua ! »

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Une fois arrivés à Ngam, Djohong ou Borgop, la vie s’organise dans une convivialité remarquable entre populations locales, réfugiés, agents administratifs et ONG. Un hôpital de district à Djohong et un centre médical à Ngaoui assurent tant bien que mal les soins de base, tandis que l’accès à l’eau potable est facilité par les municipalités et les forages construits par les organisations humanitaires.  Malgré les épreuves du trajet, le voyage dans l’Adamaoua reste fascinant. Entre solidarité, résistance et débrouillardise, chaque trajet est une aventure où l’essentiel est d’arriver à bon port. C’est ça aussi, le Cameroun profond !

Jean BESANE MANGAM 

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