Paludisme au Cameroun Baisse des décès de 29% en 2023, mais les enfants et les femmes enceintes restent vulnérables

0
60

Réduire la mortalité liée au paludisme d’au moins 75% d’ici 2028. Tel est l’engagement pris par les secrétaires généraux des ministères sur le cadre national multisectoriel pour la lutte contre le paludisme au Cameroun 2024-2028.Ceci s’est fait au cours d’un déjeuner de travail, organisé par Olivia Ngou, Fondatrice et Directrice Exécutive de l’ONG Impact Santé Afrique, ce 18 juillet 2024, à Yaoundé.

 

Selon les données rapportées par les Fosa du pays, au cours de l’année 2023, 2 977 754 cas de paludisme confirmés ont été enregistrés représentant ainsi 28 % de motif de consultations. 1 243 053 hospitalisations étaient dues au paludisme. Les décès dus à cette maladie au cours de la même année sont au nombre de 1756 soit 7 % de tous les décès. Ces données indiquent une tendance à la baisse par rapport à la situation des années précédentes. Le nombre de décès notamment a connu une diminution de 2022 à 2023 de l’ordre de 29 %. En rappel, les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes sont les groupes cibles les plus affectés par le paludisme. 1200 cas de paludisme ont été enregistrés chez les enfants.

Ces statistiques maintiennent le Cameroun parmi les 11 pays les plus touchés par la malaria, a indiqué le ministre de la Santé publique, le Dr. Manaouda Malachie, le 25 avril 2024, au cours de la célébration de la journée mondiale de lutte contre le paludisme.

Dans le cadre de l’élimination du paludisme au Cameroun à l’horizon 2030, Olivia Ngou, la Fondatrice et Directrice Exécutive de l’ONG Impact Santé Afrique, a organisé un déjeuner de travail des secrétaires généraux des ministères sur le cadre national multisectoriel pour la lutte contre le paludisme au Cameroun 2024-2028, ce 18 juillet 2024, à Yaoundé. Cette spécialiste du plaidoyer pour mettre fin au paludisme dans son pays d’origine, le Cameroun, et dans le monde entier, vient de faire une passe décisive à l’élimination de cette maladie.

En ce qui concerne le cadre multisectoriel de lutte contre le paludisme au Cameroun 2024-2028, il est question pour le gouvernement de réduire la mortalité due au paludisme d’au moins 75% d’ici 2028, éliminer le paludisme dans certains districts de santé d’ici 2028, atteindre la prévalence parasitaire infra-endémique dans tout le pays d’ici 2030. Le Minsanté va  distribuer les moustiquaires imprégnées de longue durée (MILDA), faire la pulvérisation intradomiciliaire à base d’insecticide (IRS); promouvoir des mesures de protection individuelle.

Diagnostic et traitement: accès universel à un diagnostic et à un traitement antipaludiques prompts et efficaces, utilisation de tests diagnostiques de qualité, administration de médicaments antipaludiques efficaces. Renforcement des systèmes de surveillance pour suivre l’évolution de la lutte contre le paludisme; identification des zones à fort taux de transmission et des populations à risque; analyse des données de surveillance pour orienter les interventions.

Recherche et développement: soutenir la recherche et le développement de nouveaux outils et technologies pour la lutte contre le paludisme, développer de nouveaux vaccins, insecticides et médicaments antipaludiques, évaluer l’efficacité des interventions et identifier les meilleures pratiques. Le cadre est mis en œuvre par le ministère de la Santé publique en collaboration avec d’autres ministères gouvernementaux, des organisations non gouvernementales et des partenaires internationaux.

Un plan d’action opérationnel a été élaboré pour guider la mise en œuvre du cadre. Un système de suivi et d’évaluation est en place pour mesurer les progrès et identifier les domaines d’amélioration. Le cadre multisectoriel de lutte contre le paludisme au Cameroun 2024-2028 offre une feuille de route ambitieuse pour éliminer le paludisme dans le pays.

La réussite de ce cadre dépendra d’une collaboration efficace entre tous les acteurs concernés et d’une mobilisation des ressources adéquates. Des progrès significatifs ont été réalisés ces dernières années, mais des efforts soutenus sont nécessaires pour atteindre les objectifs d’élimination. Le succès dépendra d’une collaboration efficace entre tous les acteurs concernés, y compris le gouvernement, les organisations non gouvernementales, les partenaires internationaux et les communautés.

Elvis Serge NSAA

 

Réactions

« Le Cameroun est le premier pays en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale à avoir élaboré et validé un cadre multisectoriel de lutte contre le paludisme »

Olivia Ngou, Fondatrice et Directrice Exécutive d’Impact Santé Afrique

Au terme de cette réunion avec les secrétaires généraux des ministères, nous sommes très satisfaits des résultats parce que le Cameroun est le premier pays en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale à avoir élaboré et validé un cadre multisectoriel de lutte contre le paludisme. C’est vrai que depuis des années, il est dit que la lutte contre le paludisme nécessite une multisectorialité et l’engagement de tous les secteurs.

Seul, le ministère de la Santé ne pourra pas arriver et aider le Cameroun à arriver à l’élimination de cette maladie parce que c’est une maladie qui concerne tous les secteurs. Donc aujourd’hui, enfin, nous avons un document stratégique qui oriente chaque secteur et qui leur permet de comprendre quelles sont les activités, les interventions que chaque secteur peut mener et qui vont fortement contribuer à la réduction du paludisme.

Et nous sommes heureux d’avoir eu l’engagement de plusieurs ministères, notamment le ministère de l’éducation avec lequel nous allons travailler pour des programmes de lutte contre le paludisme dans les écoles ; parce que si on commence la sensibilisation et l’éducation dès le bas âge, pendant tout le cursus scolaire, on est sûr qu’on aura accéléré la prévention ; parce que prévenir vaut mieux que guérir.

Et d’autres ministères, comme le ministère de l’Environnement qui est très conscient de l’impact même du changement climatique et de l’impact de tout ce qui se passe dans notre environnement, l’impact que cela a sur le paludisme ; mais je pense que vous pouvez tous constater que, même en ce moment précis il y a beaucoup de cas de paludisme dans les familles, dans les entreprises en ce moment, parce qu’il y a des nouvelles anophèles à nos lieux urbains, qui se prolifèrent rapidement lorsque l’environnement est propice à ce type d’expansion de la transmission.

Donc, le ministère de l’Environnement est tout à fait conscient des effets que cela a sur Ses maladies, et c’est très important que nous travaillons avec le ministère de l’Environnement, le ministère de la Décentralisation avec le grand rôle que les mairies peuvent jouer dans la lutte contre le paludisme , le ministère du travail parce que le paludisme, c’est la première cause d’absentéisme en milieu du travail ; un épisode du paludisme est égal à au moins 7 jours de travail manqués y compris l’hospitalisation et la récupération.

Le ministère du Travail est bien conscient de l’impact de cette maladie dans le milieu du travail et sur l’économie en général. Il est question de sensibiliser les travailleurs, les entreprises, les secteurs privés aussi, sur l’importance de prévenir le paludisme et aussi de lutter efficacement contre ces maladies. Enfin, les infirmeries, les centres de santé privés et dans tous les secteurs.

Il est vraiment question de renforcer également la prise en charge des cas simples de paludisme à travers aujourd’hui un test de dépistage rapide du paludisme. En 15 min maintenant, on peut savoir si on a le paludisme ou pas et prendre des médicaments pendant 3 jours pour guérir de ce paludisme. Si tous les secteurs s’y mettent, le ministère pourra arriver à atteindre son objectif qui est de réduire la morbidité du néo paludisme de 75 % d’ici 2028 et plus tard arriver à un contexte d’élimination du paludisme, comme le Cap-Vert venait de célébrer l’élimination du paludisme dans leur pays cette année.

 

« La réponse actuelle, est contenue dans le plan stratégique national de lutte contre le paludisme »

Dr Fosso Jean

Selon le Secrétaire permanent adjoint du Programme national de lutte contre le paludisme, il est structuré autour de 4 piliers, un pilier sur l’engagement politique au niveau national et communautaire pour mobiliser les finances et les autres ressources nécessaires.

Qu’en est-il des mortalités ?

La mortalité connait une baisse importante, parce que nous avons pu réduire d’environ 60 % de 2019 à 2023 le taux de mortalité qui est passé de 18 % à 6,3 % de 2019 à 2023. Mais ce chiffre de 6,3 décès pour 100.000 habitants reste élevé par rapport à la situation des 0 décès lié au paludisme.

Pendant ce cadre multisectoriel, qu’est-ce que vous pensez que votre organisation peut faire pour éliminer la maladie ?

Je voudrais dire que la réponse du gouvernement pour faire face à ce problème du paludisme, la réponse actuelle, est contenue dans le plan stratégique national de lutte contre le paludisme 2024-2028 qui est structuré autour de 4 piliers, un pilier sur l’engagement politique au niveau national et communautaire pour mobiliser les finances et les autres ressources nécessaires. L’utilisation de l’information pour prendre les décisions et pour mener les actions programmatiques et le choix des meilleures directives politiques de lutte depuis la coordination de la réponse.

Pour l’implémentation de ces 4 piliers, le ministère de la Santé seul ne peut pas assurer cette mobilisation, on a besoin de l’action de tous, donc, pour la première fois, nous tenons à remercier nos partenaires, notamment ISA, qui nous ont déjà permis de développer la première version de ce cadre, qui permet de donner de la visibilité et quelle approche on devrait utiliser pour impliquer l’ensemble des acteurs clés de la lutte. Donc, nous comptons beaucoup sur ce cadre multisectoriel pour booster la lutte contre le paludisme au Cameroun et pouvoir réaliser nos cibles qui sont de réduire de 75 % la mortalité et la morbidité liées au paludisme par rapport à la situation de l’année 2015.

 « La complexité du défi est telle qu’il faut forcément une démarche multisectorielle pour y arriver »

Selon le Pr. Tchawa Paul, Secrétaire général au ministère de l’Environnement et de la protection de la Nature et du Développement durable, tous les sectoriels  impliqués ont été cités dans un arrêté qui est dédié à coordonner l’agenda climatique au Cameroun.

Il y a des chantiers que vous entendez entreprendre dans les prochains jours ?

Je tiens à remercier le ministre de l’Economie et le ministre des Finances, qui ont facilité l’élaboration d’un texte qui a été signé en mai. C’est un arrêté qui est dédié à coordonner l’agenda climatique au Cameroun. Et dans ce texte qui fait environ 13 pages, tous les sectoriels  impliqués ont été cités, et de la même façon qu’on a vu chacun tenir son rôle, dans cette dynamique, nous avons élaboré un plan climat. Et l’une des déclinaisons visera naturellement cette problématique. Je peux également citer notre sous-direction de la sensibilisation de l’éducation environnementale, qui a un bon réseau dans les établissements secondaires, un bon réseau de clubs des amis de la nature, de clubs d’environnement, je crois que c’est un canal qui pourrait utilement être mobilisé dans le cadre de cette lutte.

Un cadre multisectoriel : dans quelle mesure cela est important pour vous, et qu’est- ce qu’on retient ?

C’est évident que la complexité du défi est telle qu’il faut forcément une démarche multisectorielle pour y arriver. On a vu qu’il y a une dimension sociale, une dimension financière, une dimension environnementale, une dimension recherche, il faut naturellement que ce type de mobilisation se mette en place. Et on a entendu également que le Cameroun en la matière fait figure de pays pionnier.

 

 « On va voir si les ministres concernés ont ajouté 1 % de leur budget pour la lutte contre le paludisme »

Peter Njume Ambang, membre du Réseau des Parlementaires sur l’évaluation, la valorisation et l’amélioration de la mise en œuvre des objectifs de développement durables en vue de l’émergence du Cameroun « PADEV-CAM »

On va voir si les ministres concernés ont ajouté 1 % de leur budget pour la lutte contre le paludisme. Et s’il n’y a pas cela, nous allons interpeller le ministre. Mais s’il y a cela, nous allons suivre, c’est-à-dire au niveau de l’implémentation de cet argent, pour voir s’ils ont vraiment utilisé cela pour la lutte contre le paludisme. Donc, nous sommes là pour le plaidoyer.

Quel est votre message en l’endroit des ministères qui, jusqu’à présent, ne font encore rien contre le paludisme ?

Je les encourage parce que, comme vous voyez, c’est une lutte qui engage tout le monde.  Personne ne peut dire que moi, je ne suis pas concerné, donc je les encourage. C’est pour nous tous, c’est pour notre pays, c’est pour nos enfants.

Propos recueillis par Audray NDENGUE Stg

Comments are closed.

ECHOS SANTE

GRATUIT
VOIR