Handicap féminin et violence sexuelle Lilie Carolle Dongmo Temgoua sort les femmes handicapées victimes de violence sexuelle du silence.
La sociologue, administratrice principale de santé publique et titulaire d’un master professionnel en population et santé, a soutenu le 20 juin 2024 une thèse de doctorat Ph/D à l’université catholique d’Afrique centrale (UCAC), sur le thème : « Handicap féminin et violence sexuelle à Bujumbura : une analyse sociodémographique des facteurs d’exposition et du vécu des victimes ».
La problématique qui structure ce travail est concentrée sur les facteurs sociaux démographiques d’exposition aux risques de violences des femmes en situation de handicap avant l’âge de 10 ans et aussi comprendre comment elles vivent socialement ce phénomène, comment la violence sexuelle affecte-t-elle leur vécu et quelles sont les modifications identitaires associées à ces violences et ainsi que les stratégies de résilience adoptées pour se reconstruire dans leur environnement. Le jury lui a attribué la mention très honorable avec félicitation du jury.
La maternité n’est pas une barrière à la recherche universitaire. Lilie Carolle Dongmo Temgoua, mariée, mère de trois ans, a soutenu brillamment, le 20 juin 2024, une thèse de doctorat PH/D en sciences sociales, option : sociologie du développement, à l’université catholique d’Afrique centrale (UCAC). C’est la salle de conférences de l’École des sciences de la santé qui a abrité la soutenance sur le thème : « Handicap féminin et violence sexuelle à Bujumbura : une analyse sociodémographique des facteurs d’exposition et du vécu des victimes ». C’était devant un jury constitué de : professeur Evina Akam, démographe, président du jury (IFORD), professeur Marie Thérèse Mengue, sociologue, directeur de thèse (UCAC), professeur Gervais Beninguisse, démographe, co-directeur de thèse (IFORD), professeur Laurent VIDAL, anthropologue, rapporteur (IRD), professeur Désiré Manirakiza, sociologue, rapporteur (UCAC) et professeur Fadimatou Mounsade Kpoundia, anthropologue, membre (UCAC). Parents, amis et connaissances n’ont pas voulu se faire conter cet instant mémorable. Pour cela, ils se sont massivement déplacés. D’entrée de jeu, la candidate a remercié les illustres membres du jury de leur présence. Pour situer son auditoire, le candidat démontre pendant 20 minutes comment le handicap est un élément favorisant la vulnérabilité de ces dernières.
La thèse de Dongmo Temgoua est une analyse sociodémographique des facteurs d’exposition et du vécu des victimes de la violence sexuelle à Bujumbura. C’est un sujet préoccupant en Afrique au regard du contexte socioculturel favorable à l’exposition des femmes aux différentes formes de violence. L’objectif principal est d’analyser le lien qui existe entre la violence sexuelle et les femmes en situation de handicap à Bujumbura au Burundi. Il s’agit pour elle de montrer la vulnérabilité des femmes en situation de handicap comparativement aux femmes non handicapées. De façon spécifique, on peut dire ici qu’il s’agit d’analyser la manière dont la violence sexuelle affecte le vécu social des femmes en situation de handicap. La problématique qui structure ce travail est concentrée sur les facteurs sociaux démographiques d’exposition aux risques de violences des femmes en situation de handicap avant l’âge de 10 ans et aussi comprendre comment elles vivent socialement ce phénomène, comment la violence sexuelle affecte-t-elle leur vécu et quelles sont les modifications identitaires associées à ces violences et ainsi que les stratégies de résilience adoptées pour se reconstruire dans leur environnement.
Pour vérifier les hypothèses, elle a choisi une méthodologie appropriée sur le plan qualitatif et quantitatif ; avec pour cadre théorique, la mobilisation de trois approches : la théorie de la représentation sociale comme outil d’analyse et de compréhension de stéréotypes, les croyances, les comportements, et les pratiques sociales structurant le handicap ainsi que la violence sexuelle au Burundi. Les théories écologiques constituent un avantage aussi pour la procréation des facteurs de risques du vécu des violences sexuelles par des femmes handicapées. Et enfin, elle a convoqué aussi la théorie de l’interactionnisme de Lori Heise qui donne lieu à l’interactionnisme, qui donne lieu à des interactions entre les différents acteurs que sont les femmes en situations de handicap avec elles-mêmes et les membres des sociétés au sein desquelles elles évoluent.
Ce travail du point de vue épistémologique s’appuie sur quatre champs pluridisciplinaires, à savoir la sociologie, l’anthropologie, la psychologie, la démographie et l’épidémiologie. La sociologie ou la socio-anthropologie permet, dans le cadre de ce travail, d’analyser les représentations sociales, les attitudes, les pratiques qui structurent le vécu des femmes et des femmes en situation de handicap victimes de viol d’une part et d’autre part d’analyser les interactions des victimes avec elles-mêmes ainsi qu’avec leur milieu.
La démographie aide à analyser les vulnérabilités des femmes handicapées aux violences sexuelles tout en utilisant les données statistiques pour illustrer la corrélation qui existe entre ces deux variables avant d’apporter un point de vue holistique pour identifier et expliquer les différents acteurs. Les différents facteurs d’exposition ; le recours à la psychologie clinique, qui permet d’analyser le vécu subjectif et social de la violence sexuelle par les victimes, à savoir les femmes en situations de handicap. Quant à l’approche écologique, elle apporte des éclairages analytiques sur l’influence de l’environnement, c’est-à-dire la géographie qui affecte les relations sociales.
Le tableau pluridisciplinaire de la thèse de Dongmo Temgoua situe, d’une part, l’ampleur des violences sexuelles auxquelles s’exposent de façon presque quotidienne les femmes en situation de handicap et, d’autre part, permet de dégager aussi les tendances lourdes de ce phénomène. La femme en situation de handicap subit une violence tardive systématique en raison de ce qu’elle est à la fois femme et handicapée. Le handicap féminin est un facteur aggravant et multiplicateur d’autres facteurs qui accroissent indéniablement la vulnérabilité et la fragilité de la femme, et c’est le mérite même de cette étude.
Le handicap féminin est loin d’être une fatalité, malgré l’environnement socioculturel, institutionnel qui ne dispose pas des ressorts pertinents pour juguler, disons, durablement, le phénomène de violence sexuelle. Outre qu’elle soulève une problématique majeure traitant d’un phénomène social, qui nécessite donc une thérapie urgente, cette thèse fournit une grille de lecture somme toute originale en s’appuyant sur une perspective d’analyse pluridisciplinaire. Le travail a privilégié l’approche qui sied à la saisie d’un phénomène tout aussi complexe et multidimensionnel.
En guise de conclusion, le jury, après avoir écouté la présentation de la défense de la thèse, a fait les observations suivantes : Thèse très bien structurée, une présentation conforme et soignée aux standards exigés. Concernant la forme, la thèse a une forme de qualité, que ce soit au niveau de la rédaction que des illustrations. La bibliographie est abondante et les annexes pertinentes. Au niveau du fond, cette thèse est une contribution très importante à un sujet d’actualité peu documenté. Le candidat a une bonne maîtrise des outils méthodologiques qualitatifs et quantitatifs. Ce travail ouvre des perspectives de recherches nouvelles. Au niveau de la défense, très bonne défense. Toutes les questions des membres du jury ont trouvé une réponse. Le jury recommande que ce travail soit valorisé par des communications et des articles. Aux vues de tout ce qui précède, le jury a attribué la mention très honorable avec félicitation du jury.
Elvis Serge NSAA