67eme journée mondiale des sourds : Marcellin Atangana célèbre 20 ans de lutte pour l’inclusion des sourds au Cameroun

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À l’occasion de la 67ème Journée mondiale des sourds, Marcellin Atangana, président de l’organisation camerounaise pour le développement des sourds, revient sur deux décennies de combat pour l’inclusion des personnes sourdes et malentendantes au Cameroun. Dans un entretien exclusif, il souligne l’importance de la langue des signes comme vecteur d’identité et d’inclusion sociale, et appelle à une meilleure reconnaissance des droits des personnes sourdes.

Alors que la 67ème Journée mondiale des sourds est célébrée à travers le monde, le Cameroun ne fait pas exception. Au cœur de cet événement, Marcellin Atangana, figure emblématique de la communauté sourde camerounaise, dresse un bilan de 20 ans de lutte pour l’inclusion et la reconnaissance des droits des personnes sourdes et malentendantes. « C’est une joie immense de célébrer cette journée », confie Marcellin Atangana. « Cela marque des années de travail et de persévérance. Nous sommes reconnaissants envers tous ceux qui nous ont soutenus dans cette lutte quotidienne pour l’inclusion. » Le président de l’organisation camerounaise pour le développement des sourds insiste sur l’importance de la langue des signes, qu’il considère comme un élément clé de l’identité culturelle des personnes sourdes. « La langue des signes est notre langue maternelle, c’est à travers elle que nous nous exprimons, que nous pensons, que nous vivons », affirme-t-il.

Malgré les progrès réalisés, Marcellin Atangana déplore le fait que les personnes sourdes vivent souvent dans un monde qui ne les entend pas. « Nous expérimentons parfois la sensation de vivre dans un monde silencieux, un monde sourd à la condition des nôtres », souligne-t-il. Il dénonce les difficultés auxquelles les personnes sourdes sont confrontées dans l’accès à l’éducation, à la santé et à l’emploi. Cependant, le président de l’organisation reste optimiste. « Il y a des améliorations, notamment dans le domaine de l’éducation », reconnaît-il. « Mais il reste encore beaucoup à faire. »

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la musique n’est pas étrangère au monde des sourdes. « Nous avons notre propre façon de ressentir la musique », explique Marcellin Atangana. « La musique, c’est aussi le rythme, les vibrations, les émotions que l’on peut ressentir à travers le corps. » Le thème de cette année, « La communication pour les personnes sourdes et malentendantes et l’utilisation de la langue des signes en relation avec le droit, interprète, oppresseur ou allié », est l’occasion pour Marcellin Atangana de souligner le rôle crucial des interprètes en langue des signes. « L’interprète doit être un allié, il doit faciliter la communication et défendre les droits des personnes sourdes », affirme-t-il. Pour célébrer ses 20 ans et la Journée mondiale des sourds, l’organisation camerounaise pour le développement des sourds organise une série d’événements, notamment une foire, un concours de beauté et une remise de prix. « Notre objectif est de sensibiliser le public à la culture sourde et de promouvoir l’inclusion des personnes sourdes dans tous les aspects de la vie », conclut Marcellin Atangana.

Elvis Serge NSAA

Interview

Marcellin Atangan

Président de l’organisation camerounaise pour le développement des sourds,  protège l’identité et la diversité culturelle des personnes sourdes et malentendantes. Toute une semaine d’activité leur est d’ailleurs dédiée. Marcellin Atangana, grâce aux prouesses de l’intelligence artificielle, répond par un générateur de voix aux questions.

Quelle est la joie indécelable qui vous anime en cette 67e Journée mondiale des sourds?

 C’est une joie qui marque des années de travail et de persévérance. Nous sommes reconnaissants envers tous ceux qui sont à nos côtés depuis tout ce temps. Ce qui nous accompagne dans cette lutte quotidienne pour l’inclusion et la reconnaissance des personnes handicapées. Nous sommes également contents que cette journée soit davantage médiatisée et que beaucoup de personnes prennent conscience des personnes sourdes et de leur culture. Ainsi, cela permet à la personne sourde d’avoir son mot à dire pour le développement de notre société. Plus qu’une journée, elle reste une célébration de l’identité des personnes sourdes. Notre société audio-centrée fait souvent de la stigmatisation peut-être à l’insu de son plein gré et le silence est systématiquement associé à la situation du sourd et du mieux.

Vivez-vous vraiment dans un monde silencieux?

 Nous pouvons dire non dans une certaine mesure. Car voyez-vous les personnes sourdes communiquent aisément entre elles, et même avec certaines personnes qui entendent en utilisant la langue des signes. Cependant, pour utiliser vos mots, nous expérimentons parfois la sensation de vivre dans un monde silencieux, un monde sourd à la condition des nôtres, sourd aux aptitudes et aux autres capacités des personnes déficientes auditives. Nous vivons quelquefois dans un monde sourd aux abus et injustices que subissent cette couche vulnérable, sourd à leur voix, qui compte pourtant. Pour résumer la situation, nous faisons parfois les frais d’une exclusion en ce qui concerne l’accès à l’information, à la santé, à l’économie, bref à la plupart des services publics, parapublics et même privés. Néanmoins, il y a des améliorations sur le plan de l’éducation, ça il faut le reconnaître, mais cela n’est pas assez visible dans certaines grandes villes du pays. Il y a encore beaucoup d’efforts à réaliser.

Quel est donc votre rapport à la musique dites-nous ? La beauté du rythme, en soupçonnez-vous les subtilités ?

C’est une question très intéressante. Nous avons déjà notre façon à nous de chanter et un jour un artiste singulier dans ce pays en la personne de David Khan nous a montré que nous pouvons évoluer dans notre rapport à l’art musical, que la musique n’est pas seulement dans les notes mais dans le silence entre deux notes de musique. De cette expérience est née notre chorale, la voix des silencieux. Nous vous invitons d’ailleurs à venir nous écouter un de ces jours. Merci pour l’invitation, voilà qui prouve que les personnes sourdes émettent aussi des sons gracieux, des gestes élégants ou encore des expressions faciales qui se donnent à voir. On comprend dès lors les raisons qui ont motivé le choix de cette thématique. La communication pour les personnes sourdes et malentendantes et l’utilisation de la langue des signes en relation avec le droit, interprète, oppresseur ou allié. Pour nous l’expliquer s’il vous plaît. Eh bien, cette thématique a le mérite de rappeler que la surdité ne doit pas être considérée comme un handicap mais plutôt une barrière de langue. La langue des signes est un langage à part entière et non entièrement à part.

Son importance est une porte ouverte sur une inclusion sociale effective. Et puis la langue des signes n’est pas seulement la langue des personnes malentendantes. C’est un langage qui se veut universel et qui mérite une reconnaissance car voyez-vous tout le monde gagnerait à connaître la langue des signes car si l’est vrai que la surdité pourrait être héréditaire ou liée à des maladies génétiques, elle est aussi liée à des accidents. Cela signifie simplement qu’une personne qui jouit d’une bonne audition aujourd’hui peut devenir sourd du jour au lendemain.

Alors, au-delà de l’aspect commémoratif, quel est surtout le message de circonstance pour cette journée internationale des langues des signes ?

A travers ce thème, nous voulons simplement questionner le rôle d’un interprète en langue des signes dans la vie de la personne sourde. D’après nos analyses, nous avons constaté que beaucoup d’interprètes servent plutôt leurs intérêts au détriment des personnes sourdes. A cet effet, nous exhortons les interprètes à faire exactement le travail pour lequel ils ont été assignés c’est-à-dire faciliter la communication entre la personne sourde et la société. Et justement au menu des activités prévues, ouverture d’une foire exposition et visite des stands au village Noah  d’Etoudi est ici à Yaoundé. On y assistera également à l’élection Miss Journée Mondiale des Sourds couplée à la cérémonie de coupure symbolique du gâteau du 20e anniversaire de l’organisation camerounaise pour le développement des sourds.

Le tout couronné par une remise de récompenses aux acteurs ayant contribué jusqu’ici à l’inclusion des personnes sourdes dans notre pays. L’organisation camerounaise pour le développement des sourds organise donc des activités du festival des arts en langue des signes du Cameroun au couplet bien entendu à la célébration du 20e anniversaire de cette organisation.

Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour la suite ?

Une réussite sur le plan organisationnel pourquoi pas mais surtout un impact sur le plan national et international avec à la clé le passage nous l’espérons à une étape plus grande encore dans l’accès à la communication pour les personnes sourdes et malentendantes et la démocratisation de l’utilisation de la langue des signes pour une bonne inclusion sociale.

Propos recueillis par Elvis Serge NSAA

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