Hôpital Jamot de Yaoundé; Les PAMME récoltent leurs maïs

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Les Personnes atteintes de maladie mentale et errantes (PAMME), qui séjournent au « village de l’amour », dans le cadre leur socialisation ont cultivé et récolté environ deux sacs de maïs.

« Qu’est-ce que, j’ai devant moi-lààààààààà ? », se réjouie une Dame, dans une vidéo au « Village de l’amour. « C’est le maïs », répondent en chœur les PAMME avec un large sourire. « Ce maïs que vous avez planté là, c’est la sueur de votre front. Le maïs-là on va vous faire à manger avec, on va organiser une journée Foléré, on va préparer votre maïs. Donc, désormais comme on a récolté là, on va refaire encore l’autre champ, pour que, Ça soit encore, plus beaucoup. Tout le monde va mettre la main à la patte, pour que la récolte soit plus beaucoup », se félicite la Dame, visiblement très émue. La cérémonie de présentation de la récolte du maïs s’est achevée par les applaudissements des PAMME. « Il faut tout faire pour dédramatiser la maladie, il faut la rendre socialement acceptable », écrit Isabelle St-Hilaire.

Cela dit, connaître un problème de santé mentale n’est pas une fatalité. Et le Dr. Laure Menguene, psychiatre et Présidente du Comité d’organisation de la prise en charge des Personnes atteintes de maladie mentale et errantes (PAMME), à l’Hôpital Jamot de Yaoundé, l’a très bien compris. « Ce sont des personnes stables actuellement, qui n’aspirent qu’avoir une vie normale (travailler, se marier etc..), rattraper le temps perdu. Ils veulent travailler et par manque d’occupation, se retrouve à être dans un état de mal être. Nous avons donc mis sur pied cette activité qui sert d’ergothérapie. Ça les occupe, ils sont contents surtout quand il voit le fruit de leur récolte. On les a félicité et encouragé pour cet effort et on leur a préparé le Conchap. Ils ont aimé et redemande, du coup ils planteront à nouveau le maïs sur un espace libre du site. Il est certes petit, mais on fait avec ce qu’on a. On aimerait avoir un espace plus grand pour qu’ils puissent mieux s’exprimer », confie Dr. Laure Menguene.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’ergothérapeute est un professionnel de santé qui fonde sa pratique sur le lien entre l’activité humaine et la santé. Il intervient en faveur d’une personne ou d’un groupe de personnes dans un environnement médical, social, éducatif et professionnel. Grâce à  l’ingéniosité de la présidente du Comité d’organisation de la campagne de sensibilisation pour la prise en charge des PAMME, les pensionnaires du « village de l’amour », participent aux activités domestiques. « J’ai remarqué que souvent l’intégration dans une activité socioprofessionnelle est difficile au départ, mais qu’une fois qu’ils ont intégré les activités, cela va bien et ils aiment cela », ajoute la psychologue Isabelle St-Hilaire.

Ils sont fiers, ils se sentent utiles. Ainsi, l’intégration des personnes atteintes d’un trouble de santé mentale dans des activités socioprofessiormelle a un effet normalisant chez les PAMME. « Ce sont des gens très ritualisés, ils se lèvent souvent à la même heure, ils se couchent à la même heure, ils prennent leur déjeuner et exercent leur routine quotidienne. Cette routine leur amène une stabilité qui est rassurante pour eux donc lorsqu’il y a un changement dans leur routine cela peut être une source d’angoisse », a-t-elle ajouté. D’après les spécialistes de la santé mentale, le bénévolat et les loisirs sont des éléments clés pour favoriser la réadaptation et un développement identitaire positif chez les PAMME.

Depuis le début de cette opération, plus de 450 patients ont été reçus au “ village de l’amour”.  Plus de 50 patients parviennent à présent à se prendre en charge. Pour bénéficier du repas, les patients se doivent d’être propres. Les plus aptes se pressent de se mettre en règle, pendant que d’autres puisent de l’eau du robinet pour la salle de bain. Question d’aider les plus vulnérables à faire leur toilette.

Par ailleurs, il est important de préciser que, les personnes atteintes d’un trouble de santé mentale ont des difficultés d’adaptation lors de leur intégration. Pour terminer, précisons que la stigmatisation des personnes atteintes de troubles mentaux est encore présente dans notre société. Le problème de la santé mentale reste encore, en bonne partie, un construit social en même temps qu’une question de fragilité personnelle. Malgré les efforts du gouvernement à démystifier la maladie mentale, les préjugés, la discrimination et la stigmatisation font encore partie d’un combat que doivent mener l’équipe du Dr Laure Menguene.

Elvis Serge NSAA

En colonne

Santé mentale : Quinze PAMME réintègrent leur famille

C’était le samedi 22 juillet 2023, au cours d’une descente sur le terrain organisée par l’équipe du Dr Laure Menguene, Psychiatre et Présidente du Comité d’organisation de la campagne de sensibilisation pour la prise en charge des Personnes atteintes de maladie mentale et errantes (PAMME).

C’est dans une ambiance bon enfant que les quinze pensionnaires du « village de l’amour » ont été embarqués dans les minibus pour leur réinsertion familiale, le 22 juillet 2023. « Aujourd’hui un minibus viendra et  une quinzaine de Personnes atteintes de maladie mentale et errantes (PAMME), partiront pour la réinsertion familiale… », confie le Dr Laure Menguene, Psychiatre.

 D’après la Présidente du Comité d’organisation de la campagne de sensibilisation pour la prise en charge des PAMME, ces derniers n’ont jamais reçu aucun membre de leur famille. En moins de trois ans, les résultats de terrain du Dr Laure Menguene sont visibles.

Son engagement a favorisé l’émergence d’un débat autour de l’abandon social des personnes souffrant de troubles mentaux sévères au Cameroun. « Les malades mentaux errants dans les artères des grandes villes souvent abandonnés par leurs familles n’émeuvent presque personnes et pourtant il suffit juste d’une bonne prise en charge pour que plusieurs soient « sauvés », explique la psychiatre.

La circulation des « fous » dans l’espace public constituerait ainsi le signe d’une altération des logiques de care et familiale, plus largement associée à une « éthique de la responsabilité » et à un devoir de « solidarité » envers l’Autre. Abandonné (par les siens), il incarne une humiliation pour la famille, cette dernière représentant ainsi l’acteur principal à charge dans la maladie sévère et la dépendance. «  Le village de l’amour vise à leur redonner leur dignité, plusieurs qui sont arrivés ici, sont déjà retournés en famille et notre suivi se poursuit la bas. Comme tous les autres malades ils doivent juste être accompagnés au quotidien, leur rappelé de prendre les médicaments leur donner de l’attention … », explique la Présidente du Comité d’organisation de la campagne de sensibilisation pour la prise en charge des Personnes atteintes de maladie mentale et errantes (PAMME).

Bien que dans le système de santé au Cameroun, il y a une sous-direction de la santé mentale, la problématique de la prise en charge des PAMME demeure  un sujet marginal de la santé publique et des politiques sociales, au Cameroun. « Il est encore possible de faire quelques choses pour ces malades. Si on peut transformer cette activité en projet. Tous les programmes que nous avons dans notre pays sont attachés à la santé physique : paludisme, hépatite, tuberculose, VIH…etc., il y a aucun programme réservé à la santé mentale, sur toute la panoplie des programmes sur la santé au Cameroun », se désole le Dr Laure Menguene.

 Depuis le 27 novembre 2021, sous l’initiative de la Communauté urbaine de Yaoundé (CUY), en collaboration avec le ministère de la Santé publique, (MINSANTE), environ 450 PAMME sont prises en charge en communautés et en milieu hospitalier du village de l’amour (VDA), situé au sein de l’hôpital Jamot de Yaoundé.

Psychiatre et présidente du Comité d’organisation de la campagne de sensibilisation pour la prise en charge des PAMME), vise une réorganisation des services d’hébergement pour répondre aux besoins diversifiés de cette population.

Elvis Serge NSAA

Réaction

Dr Laure Menguene, Psychiatre et Présidente du Comité d’organisation de la campagne de sensibilisation pour la prise en charge des PAMME

« Le processus de socialisation passe par la rééducation »

« Concernant le retour des PAMME à Domicile, on a plusieurs situations, certaines sont contentes, d’autres septiques au vue du trouble de comportement que la personne avait avant le traitement, certaines  mécontentes car la stabilisation de la personne menace les intérêts de la famille ( héritage).On a aussi le cas récent d’un PAMME pris en charge au village de l’amour que la famille a pris pour un revenant.

En ce qui concerne la séparation c’est les deux, la joie et la tristesse. La joie parce que la personne réintègre son milieu de vie, situation très importante pour son bien-être. La tristesse parce que le site s’appelle village de l’amour, après avoir passé des mois d’interaction avec un individu, on commence à s’attacher et une séparation n’est dans ce contexte jamais facile.

Le processus de socialisation passe par la rééducation à savoir se laver tous les matins, brosser ses dents, changer ses habits, se coiffer, faire le ménage, cuisiner, faire les travaux champêtre etc…, leur faire comprendre l’importance et la nécessité de travailler…etc., à travers les entretiens, les psychoéducations on interagit avec eux, le site est ouvert aux familles qui leurs rendent visite, donc les PAMME ne sont pas abandonnés et enfin la réinsertion à proprement parler dans le site

Comme activités nous avons la prise en charge médicale (santé mentale et organique), les psychothérapies, les psychoéducations, l’ergothérapie, la musique thérapie, le sport, les offices religieux ».

Propos recueillis par Elvis Serge NSAA

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