La Santé Infantile au Cameroun : Un Défi Persistant
La santé infantile est un enjeu majeur au Cameroun, où de nombreux défis subsistent malgré les efforts déployés par le gouvernement et les organisations non gouvernementales. Avec un taux de mortalité infantile de 69 décès pour 1 000 naissances vivantes en 2021, le pays reste l’un des plus touchés par cette problématique en Afrique subsaharienne (Banque Mondiale, 2023).
Maman allaitant son bébé dans un centre de santé à Batouri
Les causes de cette mortalité élevée sont multiples, allant des maladies infectieuses aux problèmes de nutrition. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), environ 24 % des enfants de moins de cinq ans souffraient de malnutrition aiguë en 2022, un chiffre qui souligne l’urgence d’agir. La plupart de ces cas sont liés à des situations de pauvreté et à un accès limité aux soins de santé.
Les efforts du gouvernement camerounais, soutenus par des partenaires internationaux, se concentrent sur la vaccination et l’amélioration des infrastructures sanitaires. En 2022, 85 % des enfants ont reçu les vaccins essentiels, un taux qui témoigne des progrès réalisés dans la lutte contre des maladies comme la rougeole et la poliomyélite. Cependant, des disparités régionales persistent, certaines zones rurales n’ayant pas accès aux services de santé de base.
Le Programme de l’UNICEF au Cameroun met l’accent sur l’éducation des parents et des communautés concernant la nutrition et les soins préventifs. En 2023, plus de 1,5 million d’enfants ont bénéficié de programmes de sensibilisation à la nutrition, mais il reste encore beaucoup à faire pour atteindre tous les enfants vulnérables.
Enfin, la pandémie de COVID-19 a exacerbé les défis existants en matière de santé infantile. Les perturbations dans les services de santé ont conduit à une baisse des consultations de routine et à une augmentation des maladies évitables qui auraient pu être traitées. Selon une étude de l’UNESCO, la fermeture des écoles a également eu un impact négatif sur la santé mentale et le bien-être des enfants.
Mireille Siapje
Le Cameroun fait face à une crise de santé infantile. Malgré les initiatives gouvernementales et les efforts d’ONG, le taux de mortalité infantile reste élevé. Un récent forum a souligné le rôle crucial des médias dans l’amélioration de cette situation, en particulier en matière de vaccination et de nutrition. Jules Elobo, Coordonnateur national du REMAPSEN, a participé à ce forum et met en avant, l’importance de sensibiliser le public sur ces enjeux dans une interview
« La promotion des bonnes pratiques de santé, y compris la vaccination, et de nutrition en Afrique passe aussi par une bonne information des populations. »
QUESTION : qu’est ce qui a motivé l’organisation de ce premier forum sur les médias et la santé infantile en Afrique ?
REPONSE : Il faut dire que les données officielles publiées par l’OMS et l’UNICEF font apparaître la plus forte baisse ininterrompue des vaccinations infantiles enregistrée depuis une trentaine d’années en Afrique subsaharienne. Les nombreux facteurs qui expliquent cette baisse, sont entre autres, l’augmentation du nombre d’enfants vivant dans des zones en proie à des conflits où l’accès à la vaccination est souvent difficile, la progression des fausses informations (fake news) et les problèmes liés à la gestion des pandémies telles que la COVID-19. Ce recul historique des taux de vaccination intervient dans le contexte d’une hausse rapide des taux de malnutrition aiguë sévère. Or, un enfant souffrant de malnutrition voit déjà son immunité affaiblie et les vaccinations manquées, ce qui signifie que les maladies infantiles courantes peuvent devenir rapidement mortelles pour les enfants. Les effets cumulés d’une crise alimentaire et d’un déficit croissant de la vaccination avec comme conséquence la survenue d’épidémies comme la rougeole, la diphtérie, la poliomyélite et d’autres maladies évitables menacent la survie même des enfants. Un travail de communication s’impose donc pour sensibiliser les communautés et les décideurs de la nécessité et l’urgence d’agir pour sauver des vies d’enfants. D’où l’organisation avec l’appui de l’Unicef du premier forum des médias sur la santé infantile, la vaccination et la nutrition. L’objectif étant d’amener les journalistes à s’impliquer dans la lutte contre la malnutrition et à promouvoir la vaccination et la santé chez les enfants à travers les médias.
Question : Quels sont les principaux enjeux liés à la santé infantile, à la vaccination et à la nutrition en Afrique de l’ouest et du centre ? Notamment au Cameroun ?
Réponse : Les enfants souffrants de malnutrition et plus particulièrement ceux souffrant de malnutrition aigüe sévère courent un risque plus élevé d’être victimes des maladies de l’enfance courantes comme la diarrhée, la pneumonie et le paludisme. D’ailleurs les facteurs liés à la nutrition contribuent à environ 45% des décès chez les enfants de moins de 5 ans selon l’OMS. Les objectifs de développement durable (ODD) adoptés par l’organisation des nations unies en 2015 ont été élaborés pour promouvoir une vie en bonne santé et le bien-être pour tous les enfants. En 2019, 122 pays ont atteint l’objectif des ODD en matière de mortalité des enfants de moins de 5 ans et 20 autres pays devraient atteindre l’objectif d’ici 2030 si les tendances actuelles se poursuivent. Si à l’échelle mondiale les progrès se sont accélérés en matière de réduction du taux de mortalité des moins de 5 ans, l’Afrique de l’ouest et du centre reste la région où ce taux est le plus élevé au monde, avec un enfant sur 8 qui meurt avant son 5e anniversaire. Au Cameroun sur 1000 naissances vivantes, 47 enfants n’atteignent pas l’âge de 5 ans. Pourtant, la plupart de ces décès seraient évitables si les systèmes de santé étaient renforcés dans leur ensemble.
Question : Comment les médias peuvent-ils contribuer à relever ces défis ?
Réponse : Les médias sont de véritables instruments de promotion de la santé infantile. Investis de la mission régalienne d’informer et d’éduquer, les médias sont des partenaires importants dans le changement de comportement des populations, face aux nouveaux défis en Afrique. Ainsi, la promotion des bonnes pratiques de santé, y compris la vaccination, et de nutrition en Afrique passe aussi par une bonne information des populations. Si les conflits armés, peuvent conduire des populations à être privées d’information à cause des difficultés liées à la difficile circulation dans les zones de conflits pour les autres acteurs, les médias sont de puissantes alternatives pour combler ce vide de la communication sur les maladies infantile ; car, les ondes ne connaissent pas de frontière et transcendent les clivages. Les médias sont des outils de plaidoyer auprès des décideurs pour de meilleurs résultats en promotion de la santé infantile, de la vaccination y compris la polio et de la nutrition.
Question : quels étaient les objectifs spécifiques de ce forum ?
Réponse : Parmi ces objectifs spécifiques à atteindre, nous avons la formation d’une soixantaine de journalistes à la maîtrise des questions liées à la promotion de la santé infantile, la vaccination et la nutrition en Afrique. L’implication de ces journalistes des pays à accompagner les acteurs nationaux et internationaux dans la promotion de la santé infantile. Et puis sur le plus long terme, il est question de continuer à informer les populations des pays de la région sur les moyens de prévention et prise en charge des maladies infantiles, y compris par la vaccination, et de la malnutrition par une intensification des productions médiatiques.
Question : quels types d’acteurs ont participé à ce forum ?
Réponse : Une soixantaine de journalistes venus de plusieurs pays Africains et une équipe d’experts de l’UNICEF, ont pris part aux travaux de ce forum des Médias sur la Santé Infantile, la Vaccination et la Nutrition en Afrique. Le forum était organisé par le REMAPSEN et placé sous le haut parrainage de Mme le Premier Ministre de la République du Togo et sous la co-présidence du Ministre de la Santé et de l’Hygiène Publique et de la Ministre de la Communication et des Médias, Porte-parole du gouvernement Togolais. L’organisation de ce forum a bénéficié de l’appui technique et financier de l’UNICEF.
Question : quels ont été les principaux thèmes abordés ?
Réponse : Les travaux ont véritablement démarré par une communication inaugurale qui a fait un état des lieux de la santé infantile en Afrique de l’Ouest et du Centre, et puis s’en sont suivies les communications sur les principales maladies infantiles en Afrique, les conséquences sur le développement des enfants. Les efforts pour accélérer la réduction de la mortalité infanto-juvénile ont également été abordé tout comme la santé du bien-être des adolescents en Afrique de l’ouest et du Centre. Le VIH /sida chez les enfants, les soins de santé primaire et la santé communautaire pour l’accès équitable et la qualité des soins, les enjeux de la vaccination contre les maladies infantiles en AOC, les défis liés à l’introduction des nouveaux vaccins sans oublier la nutrition des enfants en Afrique de l’Ouest et du Centre.
Question : Quels sont les principaux résultats et enseignements tirés de ce forum ?
Réponse : Les résultats obtenus sont entre autres ces connaissances acquises par les journalistes participants pour lutter contre la malnutrition et promouvoir la santé infantile, la vaccination et la nutrition en Afrique de l’ouest et du centre. Les médias des pays participants œuvrent désormais pour une meilleure visibilité des actions de promotion de la santé infantile, la vaccination et la nutrition par de larges couvertures médiatiques sans oublier les productions médiatiques (émissions télé, radio, publications presse écrite et presse en ligne) sont diffusées dans les pays participants sur la santé infantile, la vaccination et la nutrition tout ceci pour que les populations de nos pays soient mieux informées sur les moyens de prévention contre les maladies infantiles.
Question : quelles sont les prochaines étapes pour le REMAPSEN dans ce domaine ?
Réponse : Au terme de ce forum riche en enseignement, il a été recommandé aux coordinations nationales du REMAPSEN de procéder en accord avec les bureaux pays de l’UNICEF, à la restitution des travaux aux autres membres du réseau et à d’autres journalistes du pays intéressés par les questions de santé infantiles, de la vaccination et de la nutrition. Il ya aussi la mise en œuvre et le suivi par chaque pays participant des recommandations issues de ce forum.
Question : comment envisagez-vous de pérenniser les actions entreprises dans le cadre de ce forum ?
Réponse : Dans le cadre de la pérennisation des acquis du forum de Lomé, le REMAPSEN se propose d’élaborer avec l’appui technique des principaux partenaires, un projet médiatique impliquant les différents aspects débattus au cours des travaux. Un plan d’action sera également élaboré et exécuté sur les années 2024 et 2025 par les médias des 24 pays participants. Une évaluation annuelle sera faite pour mesurer l’impact des messages conçus et diffusés par les médias avec l’implication des ministères techniques des pays et les partenaires nationaux et internationaux.
Interview réalisée par Mireille Siapje
Lire aussi : Insécurité dans les hôpitaux : Un nouveau vol de nourrisson à Yaoundé alerte les populations