Maladies cardiovasculaires : L’Hôpital Général de Yaoundé lance une campagne de réadaptation

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Crise silencieuse, les maladies cardiovasculaires frappent de plein fouet le Cameroun. Elles constituent un véritable fléau pour la santé publique dans le pays. Loin d’être une menace lointaine, elles touchent des millions de Camerounais et représentent une cause majeure de mortalité. Le Dr TSAGUE KENGNI HN et al., Cardiologue à l’Hôpital Général de Yaoundé, il présente les objectifs de cette campagne de réadaptation.

 

Hôpital Général de Yaoundé, campagne de réadaptation

Selon les dernières données du ministère de la Santé Publique, 30% de la population camerounaise souffre d’hypertension artérielle, un facteur de risque majeur pour les maladies cardiovasculaires. Ce chiffre est particulièrement inquiétant, car l’hypertension est souvent asymptomatique et peut entraîner des complications graves si elle n’est pas traitée.

Par ailleurs, le diabète, une autre maladie chronique étroitement liée aux MCV, est également en forte progression. Ces deux pathologies, combinées à des facteurs de risque tels que le tabagisme, la sédentarité et une alimentation déséquilibrée, augmentent considérablement le risque d’infarctus du myocarde, d’accident vasculaire cérébral et d’insuffisance cardiaque.

Les maladies cardiovasculaires ont un impact considérable sur la qualité de vie des patients et sur l’économie du pays. Elles entraînent une invalidité prématurée, des dépenses de santé élevées et une perte de productivité.

Plusieurs facteurs expliquent cette situation : La génétique car certains facteurs génétiques prédisposent à l’hypertension artérielle et au diabète. Les facteurs de risque modifiables tels que tabagisme, l’alcool, une alimentation riche en sel et en graisses saturées, le manque d’activité physique et le stress sont des facteurs de risque majeurs. L’accès limité aux soins : De nombreux Camerounais, notamment dans les zones rurales, n’ont pas accès à des soins de santé de qualité. L’on cite également entre autre facteur la faible sensibilisation.

Si les chiffres sont alarmants, de nouvelles initiatives voient le jour pour améliorer la prise en charge des patients.L’Hôpital Général de Yaoundé (HGY), en partenariat avec la Cardiac Prevention Foundation (CPF), vient de lancer une campagne de réadaptation cardiovasculaire destinée aux patients souffrant d’insuffisance cardiaque, ayant subi une chirurgie cardiaque ou présentant une artériopathie oblitérante des membres inférieurs. Cette initiative, qui se déroulera du 5 août au 31 décembre 2024, offre une réduction de 80% sur les frais de réadaptation.

Selon les spécialistes, la réadaptation cardiovasculaire est un programme d’exercices supervisés et d’éducation thérapeutique qui permet aux patients d’améliorer leur qualité de vie, de réduire leurs symptômes et de prévenir les complications. Elle est particulièrement importante après un événement cardiaque, comme un infarctus ou une chirurgie, pour favoriser la récupération et réduire le risque de récidive.

Mireille Siapje

 

Réaction

« Les principales barrières à l’accès à la réhabilitation cardiovasculaire pour les patients résident principalement dans le manque d’information et l’appréhension vis-à-vis de cette spécialité de la cardiologie. »

Dr TSAGUE KENGNI HN et al. , Cardiologue, Hôpital Général de Yaoundé

  1. Qu’est-ce qui a motivé l’HGY et la CPF à lancer cette campagne de réadaptation cardiovasculaire ? Quels sont les objectifs spécifiques de cette campagne ?

Nos motivations sont liées à nos objectifs qui visent à rendre accessible la réadaptation au camerounais moyen et surtout faire connaitre cette branche de  la cardiologie qui a un impact énorme  en terme  d’amélioration de la qualité  de vie des patients. L’autre idée c’est l’amélioration de la compliance thérapeutique, meilleure gestion de la maladie et donc moins de rechute et réduction de la morbi-mortalité liée à ces maladies cardiovasculaires chroniques.

  1. Pourquoi avoir choisi ces pathologies particulières (insuffisance cardiaque, post-chirurgie cardiaque, artériopathie oblitérante) ?

Ce sont celles dont les bénéfices ont été  prouvés sur le plan scientifiques. Ce sont les principales indications de la Réadaptation  cardiaque.

  1. Envisagez-vous d’élargir cette offre à d’autres pathologies ou à d’autres populations ?

Oui, il est envisageable d’élargir l’offre de réhabilitation à d’autres pathologies et populations, en ciblant notamment toutes les conditions qui diminuent la capacité fonctionnelle des patients. Cela inclut ceux à haut risque cardiovasculaire, tels que les hypertendus, les diabétiques, les personnes souffrant d’obésité morbide et d’insuffisance rénale, ainsi que les patients atteints de cancers. En intégrant ces groupes dans les programmes de réhabilitation, on pourrait non seulement améliorer leur qualité de vie, mais également réduire le risque de complications et favoriser une meilleure gestion de leur santé globale.

  1. Quelles sont les principales barrières à l’accès à la réadaptation cardiovasculaire pour les patients ?

Les principales barrières à l’accès à la réhabilitation cardiovasculaire pour les patients résident principalement dans le manque d’information et l’appréhension vis-à-vis de cette spécialité de la cardiologie. Beaucoup de patients ont du mal à assimiler l’activité sportive et les interventions psychologiques comme des traitements ayant un impact significatif sur leur maladie. De plus, le coût des programmes de réhabilitation représente un obstacle majeur, rendant ces services inaccessibles pour certains patients, ce qui limite leur capacité à bénéficier d’une prise en charge complète et efficace.

 

  1. Quel bilan tirez-vous de la première phase de la campagne ? Comment avez-vous évalué l’impact de la campagne sur les patients ? Quels indicateurs avez-vous utilisés ?

Au terme de la première phase, 33 patients ont été réadaptés avec succès, affichant une nette amélioration de leurs capacités fonctionnelles à l’effort, de leur qualité de vie et de leur confiance en soi. Les critères permettant d’évaluer cette amélioration incluent une augmentation de la distance parcourue lors du test de marche de 6 minutes, une meilleure capacité fonctionnelle mesurée en METs lors de l’épreuve d’effort, ainsi qu’une amélioration des scores de qualité de vie, évalués par des questionnaires tels que l’EuroQol à 5 dimensions, le Minnesota Living With Heart Failure Questionnaire (MLHFQ) et le Diagnostic Educatif Rapide dans l’Insuffisance Cardiaque (DERIC). Dans la phase 3, les patients poursuivent désormais leurs activités sportives à domicile, ayant acquis une connaissance approfondie de leurs limites ainsi que des bonnes pratiques à adopter et des comportements à éviter.

 

  1. Quelles sont les améliorations que vous envisagez d’apporter pour la seconde phase de la campagne ?

Pour la seconde phase de la campagne, nous envisageons plusieurs améliorations significatives afin d’optimiser notre unité de réhabilitation cardiovasculaire ambulatoire. Tout d’abord, l’acquisition d’équipements supplémentaires est essentielle, notamment la télémétrie pour une surveillance plus efficace des patients, ainsi que du matériel dédié à la gymnastique pour améliorer la coordination, au renforcement musculaire et à l’endurance dynamique. De plus, nous prévoyons d’investir dans des outils pour l’éducation thérapeutique, afin d’informer et d’impliquer davantage les patients dans leur parcours de soins. Enfin, former un personnel supplémentaire est crucial pour assurer la pérennité de l’activité et garantir un encadrement de qualité tout au long du processus de réhabilitation.

Propos recueillis par Mireille Siapje

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