Paludisme grave : la lenteur des procédures administratives paralyse la prise en charge
17 ans après l’instauration de la gratuité du traitement du paludisme simple aux enfants de 0 à 5 ans et la femme enceinte à partir du quatrième mois, ça ne marche véritablement pas parce que les formations sanitaires ne sont pas toujours outillées en kits et les médicaments, et dans les cas où les stocks sont pourvus, ils donnent lieu à des manigances mercantiles. Si dans les villes comme Yaoundé et Douala, les populations cibles bénéficient, selon les experts, à plus de 50% des avantages liés à la gratuité de cette prise en charge, ce n’est pas le cas dans l’arrière-pays.
Le Minsanté exige la gratuité de la prise en charge des enfants de 0 à 5 ans et la femme enceinte à partir du quatrième mois. Cette décision qui participe à la lutte engagée contre le paludisme par le gouvernement camerounais, à travers le ministère de la Santé publique (Minsanté), a été rendue le 13 juin 2022, par le ministre de la Santé publique, Dr. Manaouda Malachie. Il informe le public qu’il a été porté à sa connaissance que la gratuité de la prise en charge du paludisme au Cameroun en faveur des enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes, décidée par le président de la république Paul Biya, n’est pas rigoureusement observée par certaines formations sanitaires.
Pourquoi 17 ans après l’instauration de la gratuité du traitement du paludisme simple pour les enfants de cette tranche d’âge et les femmes enceintes ça ne marche véritablement pas ? Depuis la sortie du ministre de la santé publique, Dr. Manaouda Malachie, le 13 juin 2022 pour rappeler l’application sans condition de cette mesure présidentielle, les patients victimes de cette maladie ont un sourire aigre. Et pour cause, ils peinent encore à se faire soigner gratuitement dans les formations sanitaires du pays.
Ici, l’offre des services de soins en la matière laisse à désirer. « Nous faisons constamment face à des pénuries, dû à la lenteur des procédures administratives. Nous faisons des commandes en fonction du nombre de patients reçus. Cette commande est acheminée au niveau du district, celui-ci valide puis envoie à la région pour un approvisionnement. Mais cette démarche dure parfois de long mois, entre temps c’est la population qui en pâtie », explique un médecin des zones rurales, qui a sollicité l’anonymat. Par ailleurs, « Dans plusieurs formations sanitaires, les examens liés aux cas de convulsions et vomissements, symptômes du paludisme grave chez l’enfant sont jusqu’ici supportés par les parents », confie la source. De l’avis des médecins, l’accessibilité physique aux soins de santé en matière de paludisme demeure insuffisante et controversée.
D’après les statistiques, les enfants de moins de 5 ans restent très vulnérables au paludisme. Ceci parce que la maladie est la cause de consultation de la moitié des enfants en milieu hospitalier. C’est dire combien la situation reste préoccupante. Il devient difficile pour certaines personnes, notamment dans l’arrière-pays, d’accéder à certains soins de base. « Je suis venu hier avec mon père pour un paludisme grave. La prise en charge a commencé tard parce qu’il n’y avait pas tous les produits nécessaires. Les infirmières m’ont demandé d’aller en ville acheter les produits qui manquaient », raconte un témoin.
Selon de nombreux responsables de la Centrale nationale d’approvisionnements en médicaments et consommables médicaux essentiels (CENAME), ces ruptures de médicaments résultent essentiellement de mal-gouvernance hospitalière. D’après ce responsable, les hôpitaux doivent plus de 10 milliards Fcfa à la structure. Par conséquent, « nous sommes obligés d’arrêter l’approvisionnement des hôpitaux qui ne payent pas leurs factures. C’est ce qui peut expliquer le manque de médicaments ici et là. Ce à quoi il convient d’ajouter la mauvaise gestion des stocks. En plus de cela, de façon générale, c’est quand les produits sont totalement en rupture que certains envoient leurs commandes », a-t-il expliqué.
D’un autre côté, une source à la CENAME indique que ces ruptures sont aggravées du fait du blocage de conteneurs au Port autonome de Douala par les services de la douane, qui exigent le payement de certaines taxes pourtant officiellement supprimées.
Elvis Serge NSAA