Résistance aux antimicrobiens : Les chiffres au Cameroun sont alarmants

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La résistance aux antimicrobiens est passée de 55 % environ en 2010 à 73 % en 2017 pour les principaux germes responsables de ces infections qui est l’ampicilline. De plus, pour les infections génitales, notamment la gonorrhée, on observe une résistance élevée à l’ampicilline, avec des taux de résistance allant de 80 à 93 % vis-à-vis de la pénicilline et d’autres antibiotiques comme la tétracycline.

Fièvre chez l’enfant, douleurs articulaires, infections urinaires… Face à ces maux, nombreux sont ceux qui, au Cameroun, cèdent à l’automédication, souvent avec des médicaments de la rue ou sur les conseils de proches. Une pratique dangereuse qui favorise le développement de la résistance aux antimicrobiens, une menace pour la santé publique. Ce matin du 11 février 2025, Nick, un petit garçon de 3 ans, a de la fièvre. Ses parents, tous deux occupés par leur travail, laissent le soin à sa grande sœur de 17 ans de gérer la situation. Celle-ci, sur les conseils de sa voisine, donne à Nick un Efferalgan pour faire baisser sa température. Un réflexe courant, mais dangereux. « L’automédication est un problème de santé publique au Cameroun », alerte Marie Kobela Mbollo, pédiatre et présidente de la Société Camerounaise d’Infectiologie. « Les gens ont tendance à se soigner eux-mêmes ou à suivre les conseils de leur entourage, sans consulter un médecin. Cela peut entraîner un mauvais usage des médicaments, notamment des antibiotiques, et favoriser l’apparition de résistances ».

Le cas de Nick est loin d’être isolé. Paul, un jeune homme souffrant de douleurs articulaires et de fièvre, se voit conseiller par un “dicta” de son quartier de prendre de l’arthemeter et du fer. Cyrille, qui a des démangeaisons au niveau de ses organes génitaux et des difficultés à uriner, se tourne vers un naturopathe. Quant à Geremy, il soulage ses maux de ventre avec des médicaments achetés dans la rue. « Ces pratiques sont très préoccupantes », s’inquiète Marie Kobela Mbollo. « Les médicaments de la rue sont souvent de mauvaise qualité, voire contrefaits. Ils peuvent être inefficaces, voire dangereux pour la santé. De plus, l’automédication retarde le diagnostic et la prise en charge des maladies, ce qui peut entraîner des complications graves ».

La résistance aux antimicrobiens est un phénomène mondial qui se développe lorsque les bactéries, les virus, les champignons ou les parasites deviennent insensibles aux médicaments utilisés pour les combattre. Cette résistance rend les infections plus difficiles à traiter et augmente le risque de complications, voire de décès.

Selon les chiffres, en 2019, la résistance bactérienne aux antibiotiques a causé directement 1,27 million de décès et a indirectement contribué à 4,95 millions de décès supplémentaires par an. En 2021, plus de 450 000 personnes ont été touchées par des formes de tuberculose résistante aux médicaments. Au Cameroun, l’estimation de la résistance à l’ampicilline, un antibiotique couramment utilisé pour traiter les infections urinaires, est alarmante. La résistance est passée de 55 % environ en 2010 à 73 % en 2017 pour les principaux germes responsables de ces infections. De plus, pour les infections génitales, notamment la gonorrhée, on observe une résistance élevée à l’ampicilline, avec des taux de résistance allant de 80 à 93 % vis-à-vis de la pénicilline et d’autres antibiotiques comme la tétracycline.

« La résistance aux antimicrobiens est une menace pour la santé publique », souligne Marie Kobela Mbollo. « Elle compromet les progrès réalisés dans la lutte contre les maladies infectieuses et risque de nous ramener à l’ère pré-antibiotique, où les infections les plus banales pouvaient être mortelles ».

Face à ce fléau, la Société Camerounaise d’Infectiologie appelle à une prise de conscience collective. « Il est essentiel d’informer et de sensibiliser la population sur les dangers de l’automédication et sur l’importance de consulter un médecin en cas de problème de santé », insiste Marie Kobela Mbollo. « Nous devons également renforcer la formation des professionnels de santé et améliorer l’accès aux médicaments de qualité. La lutte contre la résistance aux antimicrobiens est un enjeu majeur de santé publique. Elle nécessite une action coordonnée de tous les acteurs, des autorités sanitaires aux professionnels de santé, en passant par la population.

Elvis Serge NSAA

 

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