Automédication : plus qu’une habitude aux conséquences sur la santé publique

0
53

Le recours aux médicaments sans prescription médicale, est un phénomène préoccupant qui touche l’ensemble du Cameroun, et particulièrement les régions rurales et les petites villes du Nord.  Loin d’être une pratique anodine, elle représente un danger pour la santé publique.

Au Cameroun, l’automédication est un phénomène largement répandu.  Que ce soit pour des maux de tête, des douleurs abdominales, une grippe ou tout autre malaise, de nombreux camerounais, notamment dans le Nord, ont pris l’habitude de se soigner eux-mêmes, sans consulter un professionnel de santé.  Cette pratique n’est pas limitée aux symptômes bénins.  Trop souvent, des affections plus graves, dont les symptômes peuvent mimer des maladies courantes (une grippe masquant une tuberculose par exemple), sont également traitées par automédication, retardant ainsi le diagnostic et le traitement approprié, avec des conséquences potentiellement fatales.  Cette pratique, bien qu’observée partout au Cameroun, semble particulièrement ancrée dans les zones rurales et les petites villes du Nord, où l’accès aux soins médicaux est souvent limité.

Les raisons d’une pratique dangereuse

Plusieurs facteurs expliquent la persistance de l’automédication au sein de la population. Le coût élevé des soins médicaux et des médicaments en pharmacie est un obstacle pour de nombreuses familles.  Face à cette réalité économique, le recours aux médicaments vendus à la sauvette, souvent à des prix défiant toute concurrence, apparaît comme une solution plus accessible, même si elle est extrêmement risquée.  Un comprimé coûtant 5000 FCFA en pharmacie peut se trouver à moins de 1000 FCFA dans la rue.  Cette différence de prix significative incite de nombreux citoyens à opter pour l’achat de médicaments de la rue, souvent consommés sans aucune prescription médicale. Au-delà du facteur économique,  l’habitude joue également un rôle non négligeable.  De nombreuses personnes ont grandi en observant des proches se soigner eux-mêmes sans consulter un médecin,  prenant ainsi ces pratiques pour acquises et les reproduisant à leur tour.  Cette transmission intergénérationnelle contribue à la banalisation de l’automédication et à son maintien comme une pratique culturelle profondément ancrée.  La méconnaissance des risques liés à l’automédication, conjuguée à une confiance excessive dans certains médicaments ou remèdes traditionnels, renforce encore le phénomène.

Les risques et conséquences de l’automédication

L’automédication présente des dangers considérables pour la santé.  Le diagnostic erroné, la prescription inadaptée et le dosage incorrect sont autant de facteurs qui peuvent aggraver la maladie initiale, voire entraîner de nouvelles complications.  L’intoxication médicamenteuse est une conséquence potentiellement fatale de la prise de médicaments sans contrôle médical.  Les allergies médicamenteuses, parfois sévères, constituent un autre risque.  Enfin, et c’est peut-être la conséquence la plus répandue, l’usage abusif d’antibiotiques ou d’autres médicaments sans suivi médical favorise l’apparition de résistances aux traitements, rendant les infections de plus en plus difficiles à traiter.  L’automédication peut donc avoir un impact direct sur l’efficacité des traitements futurs, non seulement pour l’individu concerné, mais aussi pour la communauté dans son ensemble.

Un appel à la vigilance et à la responsabilisation

L’automédication est une pratique dangereuse qui menace la santé publique.  Elle engendre des dépenses de santé inutiles, voire catastrophiques, pour les familles déjà confrontées à des difficultés financières.  Elle retarde le diagnostic et le traitement des maladies, et augmente le risque de complications et de décès.  Elle contribue à la résistance aux traitements, rendant les soins plus complexes et plus coûteux.  Il est donc important de sensibiliser la population aux dangers de l’automédication et de promouvoir une culture de la prévention et de la consultation médicale.  L’accès à des soins de santé de qualité et à des informations fiables sur les risques liés à l’automédication est un élément essentiel pour lutter contre ce phénomène.

Marcus DARE

A lire aussi: Alerte : le Minsanté Ordonne le retrait de trois sirops pédiatriques contaminés

Réaction

« Toutefois, il est important d’avoir toujours l’avis médical d’un praticien de la santé »

Dr Elemva Nkoumba Melvin, Pharmacien.

L’automédication se comprend comme étant l’initiative personnelle, individuelle que peut prendre un individu, ou un groupe de personne qui peuvent ressentir des symptômes connus, ou encore la personne peut être habituée à ces symptômes et décide de son propre chef se faire établir un diagnostic et cherchant à se procurer des médicaments pour atténuer ces manifestations. Les effets néfastes de l’automédication sont nombreux. L’automédication peut provoquer des résistances notamment aux antibiotiques et cela engendre de nombreux problèmes de santé publique actuellement. On peut être confronté à un mauvais dosage, à une toxicité chronique ou aigue. On peut faire l’objet d’une allergie pouvant être fatale. L’automédication peut aussi entraîner une dégradation des organes vitaux à cause qu’on ne maitrise pas toujours la source de provenance des médicaments qu’on se procure et de nature moléculaire. Il peut également y voir interaction médicamenteuse parce que n’ayant pas des compétences requises pour maîtriser les associations médicamenteuses, il est très difficile pour celui qui se lance dans cette entreprise de maitriser les conséquences de mélange que ce soit un médicament et un type d’aliment ou de boisson. Toute association non maîtrisée est potentiellement toxique. Il y’a des médicaments qu’il faut absolument une ordonnance dûment signée par un médecin ou par un prescripteur habilité en fonction du type de médicament à prescrire. Par contre, il y’a d’autres qui peuvent être servis dans les officines ce qui nous appelons les médicaments conseils.  Ces médicaments peuvent être servis à une personne qui arrive par exemple dans une pharmacie disant qu’elle a par exemple de la fièvre, des maux de tête. Il y’a par exemple des antalgiques qui peuvent être dispensées à la personne. Malgré que c’est possible d’avoir des médicaments, cela ne veut pas dire qu’il faut aller à une automédication. Même si vous avez des courbatures ou des céphalées, il est recommandé de s’approcher des prescripteurs, ou des médecins ou même dans une officine afin de demander conseil pour une bonne prise en charge car plusieurs maladies peuvent présenter des symptômes identiques. Cependant, les détails que le malade va donner permettra au médecin de détecter ce qui ne va pas et poser le diagnostic qu’il faut. Et le pharmacien conseille et dirige mieux le patient vers un médecin pour une meilleure prise en charge. Toutefois, il est important d’avoir toujours l’avis médical d’un praticien de la santé. Cela permet d’éviter les situations incontrôlables.

Propos recueillis par Marcus DARE

Leave a reply