Dr Fanne Mahamat épouse Ousman: « La couverture sanitaire reste toujours insuffisante »
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Descente à Zamay, District de santé de Mokolo, de Mme le Délégué régional de la Santé Publique pour la mise à disposition sur site du matériel et médicaments sur site pour la gestion de l’épidémie de Gale
Quelle est la situation sanitaire de la Région de l’Extrême-Nord ?
La Région de l’Extrême-Nord a une population de 4 460 046 habitants desservis par 365 Formations Sanitaires répartis dans 30 Districts de santé. La couverture sanitaire reste toujours insuffisante malgré les récentes améliorations au vue des différents ratios sanitaires qui restent en deçà des normes.
Qu’en est –il des femmes enceintes qui ont accouché dans une formation sanitaire?
Le taux des accouchements assistés dans la région de l’Extrême-nord durant les années 2015, 2016 et 2017 est respectivement de 23%, 31% et 37%. On constate une évolution remarquable (7% en 2011) due aux différentes interventions (sensibilisation, plaidoyers, etc.) surtout à base communauté ; de plus en plus les femmes cessent d’accoucher à domicile. Il faut aussi noter une amélioration dans l’accueil et la qualité de la prise en charge grâce aux cascades de formation en SMNI réalisé. Sauf avis contraire d’une enquête, on constate une légère baisse des décès maternels et néonataux. Ce taux est de 23% à la semaine 23 de l’année 2018.
Existe-t –il des disparités entre les zones urbaines et les zones rurales ?
Plus de 70% de la population de l’Extrême-Nord réside en zone rurale. Les résultats de l’Enquête par grappe à indicateur multiple de 2014, a révélé des écarts entre les résidents des zones urbaines, et zones rurales en ce qui concerne les indicateurs de santé notamment la couverture vaccinale, le taux d’accouchement et le taux de consultation prénatale ou la couverture contraceptive. Au vu de ces résultats, la DRSP met tout en œuvre pour assurer l’équité dans la prestation et la qualité de ses services. L’extension du mécanisme de Financement PBF qui instaure un bonus d’équité pour soutenir les formations sanitaires les plus éloignés et en zones rurales va surement contribuer dans ce sens.
Comment utilisez-vous les Agents de Santé Communautaires (Asc) ?
Les Agents de santé communautaire (Asc) mènent les activités curatives, préventives et promotionnelles. Sur le plan curatif ils s’occupent de la prise en charge des cas simple en communauté en l’occurrence les cas de fièvre, paludisme simple, les Infections Respiratoires Aigues. Pour ce qui est des cas graves, ils sont chargés de la détection sur la base de certains signes de danger à eux appris lors des formations et de leur référence dans les FOSA (paludisme grave, malnutrition, les femmes enceintes, les cas de toux chronique et bien d’autres…)
Sur le plan préventif, ils participent dans la dispensation des médicaments lors des campagnes de masse (Chimioprévention du Paludisme Saisonnier, Poliomyélite, Moustiquaires Imprégnées à Longue Durée d’Actions…)
Sur le plan promotionnel, ils mènent des activités de sensibilisation, notamment les Causeries Educatives, les Visites à Domicile sur la base des boites à images regroupant certains thèmes spécifiques : Hygiène eau et assainissement (WASH), Vaccination, Paludisme, Malnutrition, Consultation prénatale, VIH, violence basée sur le genre…).
Y a-t-il les pesanteurs socioculturelles qui pèsent sur les indicateurs de la santé?
Bien entendu, ils en existent. Nous pouvons relever : les us et coutume ; les croyances ; l’emprise de la médecine traditionnelle dans notre contexte ; la pauvreté, etc.
A la veille des grandes vacances comment préparez-vous l’arrivée des grandes pluies et qui s’accompagnes généralement des plusieurs maladies ?
L’arrivée des pluies fait craindre les épidémies liées aux maladies hydriques et les inondations. Pour ce qui est de l’épidémie du choléra, la Région a activé l’équipe d’intervention rapide et pré positionnée les intrants pour la prise en charge des premiers cas, et, aussi potabilisation de l’eau pour la promotion de l’hygiène publique. La coordination transfrontalière avec le Nigéria est effective étant donné qu’on enregistre déjà les cas de ce côté-là.
Votre région subit de nombreuses insuffisances. Pouvez-vous nous faire le point ?
Merci pour cette question. Nous faisons face à plusieurs situations. Entre l’insuffisance en matière d’offre de santé ; insuffisance en utilisation de services et même l’insuffisance en qualité de service.
Quelles sont les difficultés auxquelles vous faites face ?
Nous avons des difficultés en ressources humaines, en équipements et infrastructures.
Que faut-il mener en termes d’actions pour améliorer les indicateurs ?
Renforcer les structures hospitalières de la région en ressources humaines qualifiés ; moderniser les plateaux techniques ; fidéliser le personnel dans les zones très enclavées et zones d’insécurité.
Outre cela quelles sont-vos besoins spécifiques ?
Besoins en ressources humaines (Spécialistes) ; renforcement du parc automobile de la Région, des hôpitaux et des Districts de Santé et le renforcement du plateau technique des hôpitaux de la Région.
Interview réalisée par Joseph Mbeng Boum