Dr Sandrine Tene-kene, médecin vétérinaire

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« Nul n’est censé ignorer la loi, tous les propriétaires d’animaux de compagnie sont obligés de vacciner leurs animaux contre la rage »

Est-ce qu’on peut mieux comprendre ce texte ?

 Effectivement, ce thème est parleur, ce thème se veut intentionnel parce que la rage est une maladie qui est une zoonose majeure, est une zoonose prioritaire au Cameroun. C’est une maladie virale qui est mortelle à 100% lorsque les symptômes sont déclarés. Mais paradoxalement, c’est une maladie qui est totalement prévisible, c’est-à-dire qu’on peut prévenir cette maladie par la vaccination. Maintenant, il se fait qu’aujourd’hui, malheureusement, la maladie continue à s’y vivre et il y a des obstacles.

Il y a des obstacles qui sont identifiés et il est question cette année d’identifier ces obstacles et de les lever, de travailler justement à ce qu’ils ne soient plus et que les objectifs d’élimination, d’éradication complète de cette maladie soient atteints.

Une zoonose majeure est mordue par un chien ou par un animal, atteinte de rage, que faut-il faire ? Les premiers conseils utiles ?

 Alors, les premiers conseils utiles, c’est de vous occuper rapidement de la personne mordue. La personne mordue doit laver sa plaie à grande eau, avec de l’eau et du savon. Simplement, notre savon de ménage fait l’affaire. Vous lavez rapidement votre plaie à grande eau. Après l’avoir fait, vous pouvez vous enquérir déjà de l’état du chien qui vous a mordu, de l’état de vaccination.

Est-ce que c’est un chien qui est vacciné contre la rage ? Est-ce que c’est un chien qui est un propriétaire ? Dans ce cas, le propriétaire est tenu de vous donner, de vous déclarer, de vous montrer le carnet  de vaccination parce qu’on ne déclare pas un chien vacciné oralement. Il doit avoir une preuve, un carnet dûment rempli. Souvent, les profanes ne savent pas lire, puisque ce n’est pas votre domaine.

Le conseil qu’on vous donne, c’est d’emmener ce carnet chez un vétérinaire qui va vous attester que le carnet est dûment rempli. Après cela, selon l’état de sérologie du chien et même la circonstance de morsure, parce qu’on a des circonstances normales. Si vous avez provoqué un chien, c’est normal qu’il vous morde.

Mais les circonstances anormales, souvent, c’est un chien qui a changé de comportement. Des circonstances qui peuvent évoquer une éventuelle rage chez l’animal mordeur, une éventuelle maladie chez l’animal mordeur. Vous allez vous rendre vers les centres de vaccination agréés pour suivre ce qu’on appelle la prophylaxie pour cette position, c’est-à-dire des soins que vous pouvez prendre après avoir été mordu et lorsque vous suspectez cette morsure étant contaminé.

Maintenant, pour l’animal mordeur, il va aller vers les services vétérinaires compétents pour suivre une série de consultations qu’on appelle la mise en observation. C’est une série de consultations qui permettent de mener l’enquête sur la circonstance de la morsure. Je vous le disais tout à l’heure, il y a des circonstances normales et aussi sur les symptômes.

Est-ce que ce chien qui a mordu est en train de manifester des symptômes qui peuvent évoquer un cas de rage ?

La vaccination au Cameroun se fait dans les services déconcentrés du ministère de l’élevage, dont toute cette délégation d’arrondissement et départementale que vous allez voir. Vous allez amener le chien vers cette délégation pour que cette mise en observation se fasse. À la sortie de la mise en observation, le vétérinaire officiel va attester du fait que soit l’animal ne manifeste aucun symptôme, alors la morsure n’est très probablement pas infectieuse, ou alors l’animal a manifesté des symptômes.

Très souvent, un animal qui manifeste des symptômes ne survit pas à cette période, parce que cette période de mise en observation dure deux semaines. Très souvent, l’animal meurt avant la fin de la mise en observation, et le vétérinaire officiel tient les conclusions en envoyant la tête de l’animal au laboratoire national vétérinaire pour demander la confirmation du cas de rage.

Docteur Sandrine Tene-kene, qu’est-ce que le législateur a prévu en cas de morsure par un chien errant dont le propriétaire n’hésitait pas ?

Devant le législateur, c’est le propriétaire qui répond. Lorsque vous êtes en face d’un chien errant, malheureusement, vous êtes le plaignant, mais il n’y a pas d’accusé. Donc, vous allez devoir gérer la plaie en allant rapidement vous faire prendre en charge dans le centre de vaccination internationale dont je parlais. Maintenant, lorsqu’il y a un propriétaire, c’est le propriétaire qui répond.

C’est-à-dire, lorsque vous êtes un propriétaire, par exemple, qui refuse d’abdiquer, qui ne montre pas la preuve de vaccination de son chien, qui même se retrouve parfois dans une position où on confirme que le chien n’est pas vacciné, parce que la vaccination obligatoire au Cameroun, c’est le vaccin contre la rage. C’est d’ailleurs pour ça que l’État, chaque année, met disponible ce vaccin pour le plus grand public, parce que c’est le vaccin obligatoire. Et donc, comme nul n’est censé ignorer la loi, tous les propriétaires d’animaux de compagnie sont obligés de vacciner leurs animaux contre la rage.

Maintenant, lorsqu’on se retrouve en cas de non-vaccination, et si, malheureusement pour vous, le propriétaire, le plaignant, est une personne qui est disposée à faire avancer cette affaire devant les juridictions, vous n’allez jamais obtenir gain de cause, parce que vous êtes justement en infraction.

 Est-ce que la rage concerne uniquement les chiens, ou bien il y a d’autres mammifères ou d’autres animaux qui sont concernés par la rage ?

Effectivement, il y a d’autres mammifères et d’autres animaux qui sont concernés par la rage. On a votre chien pour mordre notre chien et le contaminer. On a les vaches, on a les mammifères comme les vaches, les chevaux, qui ont fait la rage. Mais souvent, c’est parce qu’elles étaient mordues parfois par des chauves-souris, qui elles aussi avaient la rage. Donc il y a la chauve-souris aussi. Il y a les carnivores sauvages, le chacal, le loup, qui peuvent faire la rage. Donc on a le singe aussi, on a le chat, on a le chat qui peut faire la rage. Donc les animaux à sang chaud, mammifères et l’homme y compris, peuvent faire la rage.

Il faudrait vacciner tous ces animaux ?

Effectivement, il faut vacciner tous ces animaux. Le chat que vous avez à la maison, le singe, le chien, il faut les vacciner. Bon, les cas de rage et des ruminants à la vache, c’est des cas très exceptionnels, mais ça peut arriver.

Pour ces journées qui s’annoncent pour le 28 septembre prochain, votre association, qu’est-ce qui est organisé pour que les populations soient plus proches de vous ?

Effectivement, puisque nous avons comme domaine d’action la communication de risque, c’est-à-dire communiquer en termes de risque, communiquer sur les risques, nous avons approché en tant qu’association trois délégations régionales du ministère de l’élevage, centre, littoral, ouest, et nous avons proposé à messieurs les délégués régionaux de les assister dans leur déploiement cette année. Et particulièrement, nous avons pu mobiliser des cabinets vétérinaires privés afin que chaque cabinet vétérinaire privé puisse descendre dans les écoles qui se trouvent dans leurs aires de travail respectives pour la sensibilisation contre les dangers de la rage. Nous croyons que, nous savons, les données nous disent que la population la plus concernée, c’est les enfants lorsqu’on parle de morsures.

Nous sommes en période de rentrée scolaire, c’est aussi une occasion. Et l’autre chose aussi, c’est qu’un enfant informé sur les bons réflexes sur la maladie va être un adulte qu’on a gagné. Et de deux, l’enfant sensibilisé sur les dangers de la maladie va informer aussi sa famille, dont nous avons préférentiellement choisi de travailler dans le milieu scolaire parce que c’est un milieu qui est propice à la diffusion de la bonne information.

L’autre chose aussi, c’est que cela va permettre justement aux vétérinaires, particulièrement les vétérinaires privés, d’être visibles, d’être efficaces, justement d’être utilisés. L’autre chose aussi, c’est que les vétérinaires privés sont à l’avant-garde des événements de santé. C’est nous, en tant que vétérinaires privés, parce que par ailleurs je suis vétérinaire privé aussi, chez une clinique, c’est nous qui sommes informés souvent des premiers cas, des suspicions lorsque vous avez des personnes qui sont mordues.

C’est nous qu’on appelle lorsqu’on a des cas bizarres. C’est souvent nous qu’on appelle. C’est nous qui référons, qui renvoyons les informations souvent vers les délégations d’arrondissement et départementales.

Et aujourd’hui, c’est l’occasion aussi pour les vétérinaires de descendre et de donner la bonne information. Donc, nous sommes là pour justement magnifier le partenariat public-privé qui est prôné par l’OMSA, c’est-à-dire l’Organisation Mondiale de la Santé Animale, et qui est prôné aussi par notre ministère de tutelle, le ministère de l’élevage des pêches et des industries animales.

Est-ce qu’on peut avoir le chronogramme de descente sur le terrain ?

Bon, le chronogramme est établi. Nous avons, particulièrement dans ces trois régions, nous avons pu mobiliser une cinquantaine de cabinets vétérinaires quand même, avec pratiquement 130 écoles qui sont ciblées, qui vont recevoir la bonne information concernant la rage. C’est déjà une première victoire. Maintenant, les chronogrammes sont diffus, mais la journée mondiale de la rage, c’est le 28 septembre.

Donc, après le 28 septembre, les vétérinaires vont investir ces écoles, chacun selon le chronogramme qui leur sera imposé par les chefs d’établissement précisément. Et nous nous sommes donnés un mois, entre le 28 septembre et le 28 octobre, pour justement balayer ces 130 écoles qui ont été ciblées. Mais parallèlement, nous avons le ministère de l’Élevage qui a un déploiement particulier chaque année.

Cette année, ce déploiement sera encore particulier, notamment avec monsieur le ministre qui va faire le lancement de la campagne de vaccination ce samedi 28. Et aussi, la vaccination se fera dans toutes les délégations régionales et départementales d’arrondissement du ministère de l’Élevage, sur toute l’étendue du territoire national. Donc, c’est vraiment un déploiement particulier qui est organisé chaque année par le gouvernement.

Et cette année aussi, l’association vient aider en magnifiant le partenariat public-privé. Donc, retenir que nous sommes tous des acteurs, chacun à son niveau, nous qui sommes dans le domaine de la santé animale, nous sommes tous des acteurs dans la diffusion de ce message de sensibilisation. L’autre chose aussi, c’est qu’aujourd’hui, nous nous rendons compte que le concept One Health devient une évidence, ou un concept selon lequel il y a une interdépendance entre la santé de l’animal, de l’humain et de l’environnement.

Voilà une maladie dite animale, mais qui est en train de causer des décès humains. Donc, le vétérinaire, aujourd’hui, reste une partie prenante, incontournable dans la lutte contre les zoonoses émergentes et ré-émergentes.

Propos retranscrits par Elvis Serge NSAA

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