Hépatites virales : Les experts d’Afrique subsaharienne se réunissent à Douala du 26 au 27 mai 2023

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Au cours des « Douala hépatology days », ils vont partager leurs expériences et formuler des stratégies dans l’optique de lutter contre ces maladies.

L’hépatite virale est une inflammation du foie causée par un virus. D’après les gastro-entérologues, il existe au moins 05 types d’hépatites virales qui sont bien connus, à savoir : l’hépatite A, l’hépatite B (ou VHB), l’hépatite C (ou VHC ou Hep C), l’hépatite D et l’hépatite E. ces maladies si elles ne sont pas détectées à temps, peuvent entrainer des complications graves chez le patient. Une sensibilisation s’impose donc. C’est dans cette logique, que les hépato-gastroentérologues Camerounais réunis autour d’une société savante, la Société camerounaise de Gastro-entérologie (SCGE), ont initié des actions de sensibilisation en vue lutter contre les hépatites virales.

Les « Douala hépatology days » qui se sont tenues pour la première fois en 2022, ont pour objectif principal de réunir les experts dans ce domaine autour de cette maladie afin de trouver des solutions adaptées dans le combat contre ces maladies. Pour cette deuxième édition, pendant deux jours, les hépato-gastroentérologues camerounais et leur confrère de la Côte d’Ivoire, de la République démocratique du Congo, du Burkina Faso, du Sénégal et du Gabon vont tout d’abord, promouvoir la lutte contre les maladies du foie en Afrique subsaharienne. Ensuite, élaborer des recommandations qu’ils vont proposer à leurs différents ministères de la Santé pour améliorer les processus de lutte contre les hépatopathies dans les différents pays.

Fibrose hépatique

Plus de 150 gastroentérologues, sont attendus au cours de cette rencontre. Plusieurs thématiques seront abordées. Notamment : « Traitement du CHC en 2023 : quelles stratégies pour l’Afrique ? » ; « Place de de la recherche du génotype du VHC dans le bilan pré thérapeutique » ; « Epidémiologie de l’hépatite C en Afrique noire » ; « Atteintes glomérulaires au cours de l’infection par le virus de l’hépatite C », « Place des marqueurs non-invasifs pour l’évaluation de la fibrose hépatique dans le VHB », etc.

Ghislaine DEUDJUI

Interview : Pr Eloumou Bagnaka Servais Albert

Pr Eloumou Bagnaka Servais Albert, Directeur de l’hôpital de District de Bangue

« L’Afrique est dans une zone de forte endémicité de l’hépatite virale B » 

Le Directeur de l’hôpital de District de Bangue, par ailleurs Secrétaire général de la SCGE et Secrétaire général de la Société africaine d’hépato-gastro entérologie et endoscopique digestive (SAHGE) donne les raisons de l’organisation de cette rencontre.

Il se tiendra du 26 au 27 mai à Douala, la deuxième édition de « Douala hepatology days ». Quels sont les enjeux de cette édition ?

Douala Hepatology Days au départ est un colloque qui réunit les experts en matière de prise en charge et de gestion des maladies du foie notamment infectieuses, comme les hépatites virales. Il s’agit ici de l’hépatite virale B et de l’hépatite Virale C qui sont ces hépatites qui évoluent vers la chronicité et qui peuvent se compliquer. Il s’agit aussi des autres hépatopathies, c’est-à-dire des autres maladies du foie telles que les maladies émergentes comme la stéatohépatite, qu’on appelle habituellement la Nash ou encoure des maladies beaucoup plus rares, comme les maladies cholestatique du foie ou les maladies auto-immunes. Donc, il est question que ces experts se réunissent pour pouvoir communiquer là-dessus et surtout réfléchir sur la façon de dépister ces maladies, de les prendre en charge de façon globale. L’année dernière, nous l’avons fait dans le cadre de la faculté de médecine et cette année, nous nous sommes dit qu’il fallait élargir un peu plus. Et, sous le pilotage de la société camerounaise de gastroentérologie, inviter les experts étrangers pour essayer de façon plus large, de parler de la prise en charge des maladies du foie en Afrique.

Le thème de cette deuxième édition est : « Hépatopathies en Afrique ». Quel est le constat sur le continent africain en général et au Cameroun en particulier ?

Nous avons constaté qu’en Afrique en général, pour ce qui est des hépatites virales, l’Afrique est dans une zone de forte endémicité de l’hépatite virale B. C’est-à-dire que les pays africains, surtout en Afrique subsaharienne, l’hépatite virale b est au-dessus de 7% plus précisément 7,5% donc environ 8%. Donc les pays d’Afrique subsaharienne, paient un lourd tribut en termes d’infection de l’hépatite virale B. Pour ce qui est de l’hépatite virale C, les pays africains sont aussi au-devant de la scène, notamment l’Egypte en Afrique du Nord, qui a près de 15% de prévalence. Le Cameroun, plus particulièrement pour ce qui concerne l’hépatite B est à près de 12% de prévalence et pour l’hépatite C est à environ 5,6% plus précisément. Vous voyez que c’est assez élevé, plus élevé que les patients qui sont infectés par le VIH. Il est donc intéressant que le public sache et que nous les experts que l’on donne des pistes de prise en charge et des recommandations. Celles-ci seront soumises aux autorités, afin qu’elles puissent s’appuyer là-dessus pour les divulguer en termes de prise en charge de la population générale. Dans le monde, nous avons près de 240 millions de personnes porteuses du virus de l’hépatite B et près de 150 millions qui portent le virus de l’hépatite C et parmi tout ce monde-là près de 80% réside en Afrique, de ces personnes qui sont porteuses de l’hépatite B et C près de 30% évoluent vers la cirrhose et le cancer du foie. Et près de 600 000 personnes décèdent chaque année des complications des hépatites virales B et C.

Est-ce que les mesures prises jusqu’à présent par le gouvernement permettent de lutter contre ces différentes maladies ?

En ce qui concerne le Cameroun, l’Etat à travers le ministère de la Santé Publique et d’autres secteurs, font déjà beaucoup dans la prise en charge des hépatites virales, mais est- ce que c’est assez ? Nous pensons qu’il y a encore à faire. Actuellement, le traitement est pris en charge et subventionné si on peut le dire. Il est à un coût abordable, pour ce qui est de l’hépatite B c’est 2000F par mois, pour ce qui est de l’hépatite C, c’est encore un peu cher mais le gouvernement fait beaucoup d’efforts parce que là on part d’un montant à près 600 000 par mois à 100 000Fcfa par mois. Ça ne cesse de régresser. Le gouvernement fournit des efforts dans la prise en charge mais nous souhaitons qu’il fasse encore plus. Il est impératif que l’on puisse faire des recommandations sur les examens à faire avant le traitement, parce que c’est souvent ce qui coûte beaucoup plus cher. Que l’on puisse proposer, nous en tant que société savante au Ministère de la Santé, les examens qui ne coûtent pas chers pour la prise en charge ou le bilan pré-thérapeutique, avant de mettre le malade sous traitement. Maintenant pour ce qui concerne les autres hépatopathies, que l’on puisse mettre à la disposition des praticiens, les outils pour pouvoir les dépister, notamment la stéatose hépatite, parce que c’est la maladie émergente qui va toucher le foie dans les prochaines années. Maintenant que l’Hépatite C aura tendance à disparaitre parce que traiter et guérir, nous avons la stéatohépatite qui commence à être un problème chez nous. Tout ceci à cause de l’occidentalisation de la vie, l’alcoolisme, la sédentarité, qui fait que la prévalence des obèses ait augmenté et du coup cette maladie si nous ne faisons pas attention, si nous ne commençons pas à la prévenir dès maintenant, elle va être comme USA aujourd’hui, le prochain problème hépatite dans la société.

Est-ce que les gens observent toujours une certaine méfiance face au vaccin pour ce qui est de l’hépatite ?

Il y a une grande adhésion au e Vaccin, notamment chez les femmes enceintes, les parents, même la grande population en général. Les patients adhèrent à la vaccination contre l’hépatite virale B. Avant de se faire vacciner, il faut se faire dépister parce que les hépatites, ce sont des maladies très silencieuses. Elles deviennent symptomatiques, lorsque nous sommes en face des complications. C’est pour cela qu’il faut faire beaucoup de publicité autour, pour que les gens sachent ce que c’est que les hépatites virales, notamment les hépatites virales B et les hépatites virales C. ce sont des maladies très silencieuses, mais qui peuvent entrainer des complications notamment la Cirrhose et le Cancer du foie.

Quelles sont les difficultés que rencontrent les hépato-gastroentérologues au Cameroun ?

Les difficultés que nous rencontrons sont les difficultés que tous les praticiens rencontrent. Mais lorsqu’il faut faire nos campagnes pour la lutte contre les hépatites virales, nous observons qu’autant les sociétés de la place peuvent accompagner les cardiologues pour les maladies du cœur, autant les gastro-entérologues la porte nous est presque très souvent fermée. Lorsqu’on va rencontrer les responsables pour leur parler de l’hépatite, ils ne nous écoutent pas beaucoup, mais nous sommes souvent surpris de les voir en consultation avec les membres de leur famille qui viennent pour des problèmes liés au cancer du foie, une cirrhose, ou une hépatite. Mais quand on leur demande de nous soutenir dans la lutte contre les hépatites virales, on voit très peu de sociétés citoyennes qui nous accompagnent

En 2022, il y a eu la première édition, et la deuxième cette année, pourquoi renvoyer l’acte 3 en 2025 ?

Ceci à cause des difficultés de sponsoring et nous voulons en 2025 faire quelque chose de beaucoup plus grand, c’est-à-dire impliquer plus de pays. Les pays lusophones, les pays anglophones, les pays du Magreb. Nous voulons produire un plaidoyer auprès de notre hiérarchie (Ministère de la Santé, ndlr) pour nous accompagner et aussi voir quelques entreprises citoyennes qui vont pouvoir nous permettre de faire de cette 3è édition, une édition vraiment digne des pathologies que nous voulons promouvoir et traiter.

Propos recueillis par Ghislaine DEUDJUI

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