Infirmité Motrice Cérébrale: Les défis de la prise en charge dans l’Adamaoua
Le Cameroun s’est joint au monde entier pour célébrer le 6 octobre dernier, la journée mondiale de la paralysie cérébrale. Placée cette année sous le thème, paralysie cérébrale : comprendre et lever les tabous ; gage d’une amélioration de de la prise en charge et de la prévention.
L’IMC, ou Infirmité Motrice Cérébrale, est, selon les spécialistes, un trouble permanent du développement moteur résultant de lésions survenues au cerveau avant, pendant ou peu après la naissance. Cela affecte les mouvements, l’équilibre et la posture de l’enfant. Les enfants atteints d’IMC peuvent présenter une raideur musculaire (spasticité), des mouvements involontaires ou encore des problèmes de coordination. C’est une condition complexe qui peut varier en intensité d’un enfant à l’autre.
Préjugés et stigmatisation
Dans la région de l’Adamaoua, cette affection fait l’objet de curiosité et des idées reçues. Pour plusieurs personnes, cette maladie est le résultat des sectes pernicieuses dans lesquelles les parents de ces enfants seraient entrés pour s’enrichir. « Je peux vous dire que cette maladie n’est pas simple. Ce sont des enfants serpents et la solution c’est de les déposer au bord d’une rivière pour s’en débarrasser. En plus, quand on observe bien, les parents qui ont des enfants pareils sont d’une certaine classe sociale » avance Zeh, habitant de Ngaoundéré. Selon ce dernier, c’est la conséquence du pacte des parents pour la richesse. « Sans doute, ces enfants ont été vendus en contrepartie de la richesse des parents ». Dans les communautés, de centaines d’enfants sont retirés des centres de prise en charge.
Dans la ville de Ngaoundéré par exemple, les centres de prise en charge ne courent pas les rues. Une initiative installée il y a moins de 5 ans subsiste tant bien que mal dans la prise en charge et le suivi de ces enfants. Selon la promotrice, Carine Djouellah, la prise en charge de ces enfants fait appel à plusieurs spécialistes. « Elle implique la kinésithérapie pour améliorer la mobilité, l’orthophonie pour aider à développer le langage, et parfois l’ergothérapie pour adapter l’environnement de l’enfant. Nous travaillons également avec des psychologues et des éducateurs spécialisés pour stimuler l’enfant et favoriser son inclusion sociale » dit-elle. Son centre accueille plus de 20 enfants issus de différents milieux. Ces enfants sont suivis au cas par cas. « Nous suivons 24 enfants atteints d’IMC. Chaque enfant bénéficie d’un programme de prise en charge personnalisé, adapté à ses besoins spécifiques. Nous travaillons en étroite collaboration avec les parents pour s’assurer que le suivi continue également à domicile ».
Face à la demande sans cesse croissante, le centre se trouve aujourd’hui à l’étroit. « Nous militons activement pour que davantage de centres soient créés, surtout dans les zones rurales ».
Insuffisance du plateau technique
La multiplication des hôpitaux avec l’affectation des spécialistes, comme au Centre Hospitalier Régional de Ngaoundéré arrive comme un coup de pouce. Au-delà de l’affectation du personnel médical dans les hôpitaux, l’appui au centre de dame Carine pourrait être une bouffée d’oxygène pour ces enfants qui ne demandent qu’à être suivis de manière adéquate. « Nous ne recevons absolument aucun soutien de l’État, aucune subvention pour couvrir les besoins. Nous avons besoin d’un engagement conséquent des pouvoirs publics, que ce soit en termes de financement, de formation des professionnels ou de mise à disposition de matériel spécialisé ».
Unique centre connu de certains parents, ce dernier fonctionne grâce à l’appui des parents qui y font suivre leurs progénitures. Pour eux, si la communauté pouvait davantage investir dans l’accompagnement, aucun enfant IMC ne serait abandonné à son triste sort. « Que les municipalités investissent dans ce centre, ce serait une œuvre salutaire. Ça va contribuer à soulager la peine de ces enfants » souhaite Belmondo, parent.
Enseignante de formation et mère d’une fille IMC, madame Carine Djouellah fait office de pionnière dans la prise en charge des enfants IMC. Aujourd’hui, le regret de cette dame est le décès du bébé Adonaï dont les parents faute de moyens ont perdu leur enfant.
Par Jean Besane Mangam
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