À l’occasion du 75ème anniversaire de la Convention de Genève, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a organisé une formation à l’intention des journalistes de la région de l’Extrême-Nord du Cameroun. Cette initiative, qui s’est déroulée du 27 au 28 août 2024 à Maroua, avait pour objectif de familiariser les hommes et femmes des médias avec les missions et les actions du CICR, et de promouvoir une meilleure compréhension du Droit International Humanitaire (DIH).
La région de l’Extrême-Nord traverse une période difficile marquée par des défis sécuritaires et humanitaires complexes. Dans ce contexte, le respect du Droit International Humaine devient un enjeu crucial pour la protection des populations civiles et la sauvegarde de la dignité humaine. Les journalistes, en tant que relais d’information essentiels, jouent un rôle primordial dans la diffusion de connaissances et la promotion du respect des règles humanitaires. « Nous pensons que cet 75ème anniversaire de la convention de Genève est une bonne occasion pour renforcer les capacités des journalistes dans le traitement des informations relatives à ce que nous faisons comme activité et de partager les problèmes auxquels font face les personnes civiles » a déclaré Joël Fortuné, Chef de la sous-délégation du CICR Maroua
Une formation immersive pour une meilleure compréhension du DIH
La formation, dispensée par des experts du CICR abordaient des thèmes essentiels tels que : les principes fondamentaux du DIH et son application dans les conflits armés et les situations de violence, le rôle du CICR dans la protection des civils, des prisonniers de guerre et des personnes déplacées, les défis liés au respect du DIH dans les contextes de conflits armés et de violence, le traitement médiatique des situations humanitaires et le respect de l’éthique journalistique. Un accent particulier a été mis sur le rôle crucial des médias dans la diffusion d’une information objective, responsable et conforme aux règles du DIH. Les participants ont été sensibilisés aux enjeux éthiques liés à la couverture des situations humanitaires et ont été guidés sur les meilleures pratiques pour une information digne et respectueuse.
Des ateliers pratiques et des échanges interactifs
Au-delà des exposés théoriques, la formation s’est articulée autour d’ateliers pratiques et de sessions de discussions interactives. Les participants ont eu l’occasion de s’approprier les concepts clés du DIH et de réfléchir aux meilleures pratiques pour une couverture médiatique responsable et éthique des situations humanitaires. Ils ont également eu l’opportunité de partager leurs expériences et de poser des questions aux experts du CICR, créant ainsi un dialogue constructif et enrichissant. « Après deux jours de formation, on a essayé de faire le tour de ce qu’est le droit international humanitaire, dans quels cas de conflit on peut parler de telle ou telle situation. Pour moi en tant que journaliste, ça me permet de rafraichir ma mémoire par rapport à toutes ces considérations, de ne pas être pris court dans une situation de terrain, ou de savoir quand je dois m’engager par exemple comme correspondant de guerre ou comme reporter simplement de crise » a précisé Jean Pierre Congé, Journaliste CRTV Extrême-Nord.
Une collaboration essentielle pour une information juste et humanitaire
L’initiative du CICR témoigne de son engagement à collaborer avec les journalistes pour promouvoir le droit international humanitaire et le respect des règles humanitaires. Cette collaboration durable est essentielle pour garantir la protection des victimes et la sauvegarde de la dignité humaine, même en temps de guerre ou de violence. Cette formation représente un pas important dans la sensibilisation des journalistes de l’Extrême-Nord au DIH. Le CICR s’engage à poursuivre ses efforts pour promouvoir le respect du droit international humanitaire dans la région et à soutenir les journalistes dans leur mission d’informer le public de manière responsable et éthique.
Samuel ADJEWA
“Le journaliste ne doit pas dire tout”.
L’objectif principal de cette formation, qui était dédiée à la sensibilisation des journalistes de l’extrême-nord au droit international humanitaire, était premièrement de rappeler aux participants leur statut, qui, au regard du droit international humanitaire, est un statut de civil.
Les journalistes, au regard du DIH, sont considérés comme des civils. Et en tant que tels, ils sont protégés par ces textes. Il s’agit donc d’une protection générique, puisque l’article 79 du premier protocole additionnel dit que les journalistes sont protégés, mais à condition qu’ils ne participent pas ou qu’ils ne prennent pas part aux hostilités.
Cela veut dire qu’ils doivent garder leur qualité, leur statut de civils, lorsqu’ils sont en couverture dans les zones de conflit ou dans les conflits, pour pouvoir continuer d’être respectés. Le droit humanitaire distingue également le correspondant de guerre de la presse militaire.
La presse militaire ici, c’est un militaire formé, mais qui a choisi de faire la communication de guerre et qui accompagne ses troupes ou ses pairs sur les champs de bataille. Il est donc un militaire et peut être intentionnellement visé par la partie adverse lorsque nous sommes dans le cadre d’un conflit armé international.On a à côté de la presse militaire les correspondants de guerre qui sont effectivement des civils, des journalistes civils, mais qui accompagnent les forces armées à condition d’être accrédités par les forces armées.
Ils doivent donc être accrédités et s’ils sont capturés dans le cadre des conflits armés internationaux, là encore j’insiste, ils pourront bénéficier du statut de prisonniers de guerre. Il faut dire que dans le cadre des conflits armés non internationaux, il n’y a pas de statut de prisonnier de guerre. Et si un journaliste est arrêté en lien avec la situation, le droit international exige quand même qu’il soit traité avec humanité, qu’on respecte les garanties judiciaires à son égard.Et si jamais pendant ce conflit-là de nature interne, si on lui reproche des choses, qu’on respecte tout simplement les principes du droit à un procès équitable.Donc voilà un peu le premier objectif qui était de leur dire le droit humanitaire vous protège.
Le deuxième objectif était surtout d’appeler le journaliste qui couvre des guerres, des conflits armés, qui couvre des situations dangereuses à sa responsabilité personnelle.Le journaliste, s’il est là, il fait un travail, un service public d’information, il doit être averti des dangers lorsqu’il couvre des conflits armés et être responsable lorsqu’il s’engage à publier certaines informations. Parce qu’en période de conflit, ce n’est pas tout qui doit être dit par le journaliste. Il y a la façon de le dire et surtout, ce n’est pas tout qui doit être dit.D’autre part, le journaliste dans le cadre de cette formation, on a vu comment lors du génocide rwandais, la radio Milles collines a contribué directement et indirectement à l’extermination d’un groupe, d’une communauté alors même que le rôle du journaliste c’est d’interpeller, c’est d’appeler l’attention et d’informer surtout la population et non d’inciter un groupe contre un autre. Donc il y avait ce double objectif dans notre formation.
Propos recueillis par Samuel ADJEWA
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