Le “Papy Groove” était âgé de 86 ans. Il est mort mardi 24 mars des suites du Covid-19, la maladie provoquée par le nouveau coronavirus. Si ses fans à travers le monde sont en larme, sa mort interpelle le Cameroun à prendre les mesures plus drastiques pour limiter la propagation de cette pandémie.
Manu Dibango est mort. Personne n’est à l’abri du coronavirus. La prévention reste le meilleur moyen de protection. La famille du chanteur et saxophoniste a annoncé, mardi 24 mars, son décès des suites du Covid-19, la maladie provoquée par le coronavirus. “Chers parents, chers amis, chers fans, une voix s’élève au lointain… C’est avec une profonde tristesse que nous vous annonçons la disparition de Manu Dibango, notre ‘Papy Groove’, survenue le 24 mars 2020 à l’âge de 86 ans, des suites du Covid-19”, a-t-elle déclaré.
Arrivé à Marseille en 1949 alors qu’il était
adolescent, fait Chevalier de la Légion d’honneur en 2010,
l’artiste camerounais était encore en pleine forme et en tournée l’an
passé pour ses 60 ans de carrière avec son Safari Symphonique mêlant
jazz et musique classique, un programme dont il nous avait parlé en
juillet 2019 avec sa bonne humeur et son dynamisme inaltérables. Manu Dibango était un géant par sa taille et son
talent, mais aussi par sa gentillesse et son enthousiasme communicatif.
Le 18 mars, la contamination de l’artiste avait été
annoncée sur sa page Facebook. Mais ce communiqué nous donnait
alors l’espoir que le solide colosse, qui avait traversé plus de 86 années de
vie terrestre en conservant cette pêche inoxydable, surmonterait ce terrible
coup dur. Cela n’aura pas été le cas. À cause des règles du
confinement, “les obsèques auront lieu
dans la stricte intimité familiale, et un hommage lui sera rendu ultérieurement
dès que possible”, indique la famille dans son
communiqué.
Géant de la musique africaine, Manu Dibango est la première personnalité à
avoir succombé au Covid-19 en France.
Né le 12 décembre 1933 à Douala, au Cameroun, de son vrai
nom Emmanuel N’Djoké Dibango, tout au long d’une longue et dense
carrière, Manu Dibango a traîné sa haute silhouette et son large sourire
reconnaissables entre mille sur les cinq continents. C’est en Europe qu’il a
posé ses valises, s’installant en France à partir de 1949.
Activiste de l’abolition des frontières entre les genres musicaux, il a abordé
de multiples styles, collaboré avec de grands musiciens africains comme Youssou
N’Dour et Angélique Kidjo, des rock stars comme Peter Gabriel et Sting, des
chanteurs français comme Serge Gainsbourg, Nino Ferrer ou Dick Rivers, des
musiciens classiques, et bien sûr des gens du jazz comme Herbie Hancock, Bill
Laswell ou, en France, le bassiste Jérôme Regard et le tubiste Didier Havet,
rendant notamment hommage au saxophoniste américain Sidney Bechet dans un album
en 2007.
L’un de ses grands tubes, l’irrésistible Soul Makossa, inspiré d’un
rythme du mouvement éponyme, sorti en 1972, a séduit un certain Michael Jackson
qui l’a clairement cité à la toute fin de son électrisant Wanna Be
Startin’ Somethin’, sans le créditer dans Thriller (1982)
son album au triomphe planétaire. Un procès et un accord financier suivront.
Rebelote quelques années plus tard avec la chanteuse Rihanna.
Au Cameroun, les regards sont tournés vers le palais d’Etoundi. Le pays enregistre 66 cas confirmés. Les spécialistes en santé publique appellent à un confinement des villes touchées par cette pandémie.
Joseph MBENG BOUM