Ulcère de Buruli: 5000 à 6000 personnes nouvellement atteintes chaque année

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Troisième maladies mycobactériennes, derrière la tuberculose et la lèpre, l’ulcère de Buruli se caractérise par de gros ulcères pouvant entraîner une invalidité permanente. Les communautés vivant le long des cours d’eau sont les plus touchées.

Benjamin Mama, âgé de 13 ans se laisse examiner docilement. Son bras droit est gonflé d’un œdème, et la chair de son coude est à vif sur un diamètre de 5 centimètres. Des villageois rassemblés autour de lui observent les échanges entre son père et les médecins. Même si l’œdème a régressé, l’état de l’enfant reste préoccupant. Les docteurs souhaitent le prendre en charge, mais sa mère n’est pas là et le père est réticent à le laisser partir. Faute de mieux, un pansement propre est apposé sur la plaie du garçon, puis les médecins s’en vont. La scène se déroule le mardi 03 août 2021, dans un village d’Akonolinga qui borde le Nyong (cours d’eau), à une quatre-vingt  kilomètres de la capitale Yaoundé. L’affection dont souffre le petit garçon n’est pas une plaie banale mais un ulcère de Buruli (UB), du nom d’une région de l’Ouganda où la maladie a été décrite dans les années 1950. L’ulcère de Buruli est une maladie tropicale négligée insidieuse.

La plupart du temps, la maladie n’est identifiée que lorsque les patients ont déjà de grandes plaies ou mutilations. La plupart des patients atteints d’ulcère de Buruli ont moins de 15 ans. L’ulcère de Buruli est une maladie focale, qui touche les communautés vivant le long de plans d’eau à écoulement lent tels que les étangs, les marais et les lacs. 5000 à 6000 personnes sont nouvellement atteintes d’un ulcère de Buruli chaque année en Afrique, Asie et Amérique du Sud. Mais la prévalence atteint 0,25 % de la population dans certaines régions, et des pays comme le Bénin, la Côte d’Ivoire ou le Ghana signalent quelques milliers de cas chaque année. « On pense que de nombreux cas ne sont pas signalés, en raison de la connaissance limitée de la maladie, de l’accès restreint à un diagnostic fiable car uniquement disponible dans quelques laboratoires, de sa distribution focale et du fait qu’elle touche principalement les communautés rurales pauvres », rappelle le Pr. Yap boum, épidémiologiste à Epicentre qui dirige une étude visant à simplifier le diagnostic de l’ulcère du Buruli. L’ulcère de Buruli est infection chronique de la peau qui commence généralement par un nodule, une plaque ou un œdème qui se transforme progressivement en ulcère. Les bactéries de Buruli pénètrent sous la surface de la peau. Elles dévorent le tissu sous-cutané sans que les malades ne ressentent de douleurs ou n’aient de la fièvre.

Le traitement peut nécessiter une intervention chirurgicale

Lorsque la peau recouvrant les parties infectées se nécrose, des ulcères apparaissent. Avec le temps, il peut entraîner une destruction massive des tissus et des déformations débilitantes. Les premières manifestations cliniques ne sont pas spécifiques et la maladie évolue lentement ; beaucoup de personnes touchées ne cherchent pas à se faire soigner tant qu’il n’y a pas de nécrose cutanée majeure nécessitant une intervention chirurgicale importante et une hospitalisation prolongée. S’il n’est pas traité, l’ulcère de Buruli peut entraîner des complications. Une intervention chirurgicale, y compris un débridement important, peut être nécessaire pour enlever les tissus nécrosés, recouvrir les défauts de la peau et réparer les déformations. Dans les cas extrêmes, l’amputation ne peut être évitée. Les patients souffrant d’un ulcère de Buruli sont souvent victimes de stigmatisation et d’ostracisme dans leur communauté. Cette stigmatisation affecte leur santé mentale et ils souffrent généralement de dépression, de désir suicidaire, d’alcoolisme et de syndrome post-traumatique.

La perception du personnel médical envers les patients atteints de l’ulcère de Buruli est également l’un des facteurs qui retardent le diagnostic précoce. Certains se sentent stigmatisés et préfèrent s’adresser aux guérisseurs traditionnels qui les traitent avec plus de dévouement. Depuis de nombreuses années, le traitement de base de l’ulcère de Buruli consiste en une intervention chirurgicale. L’OMS recommande désormais une cure de 8 semaines d’antibiotiques oraux, à base de rifampicine et de clarithromycine. Cette antibiothérapie orale a rendu le traitement plus accessible aux patients, et ce, malgré la pénurie de médicaments, observé notamment pendant la pandémie Covid-19, et provoqué par la réorientation de la production vers l’azithromycine. De plus en plus de preuves montrent que les lésions précoces et limitées peuvent être traitées efficacement avec des antibiotiques seuls, sans qu’il soit nécessaire de recourir à la chirurgie et à l’hospitalisation. En plus des antibiotiques administrés pour tuer les mycobactéries, des pansements modernes à base de mousse et de composé hydrogel sont désormais appliqués sur les ulcères de Buruli pour nettoyer et guérir les plaies, mais aussi prévenir la douleur et les saignements associés aux compresses de gaze.

Elvis Serge NSAA

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