Violences conjugales – Les chiffres sont évocateurs de la gravité des faits dans les cellules domestiques

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Selon les statistiques des Nations Unis, sur les violences faites aux femmes au Cameroun, 52 % d’entre elles ont subi des violences conjugales, 53% des violences depuis l’âge de 15 ans, 30,56% des violences physiques, 53,79% victimes de violences émotionnelles, 30,8% des violences sexuelles, 54,54% d’abus psychologique, 50,24% des violences économiques, 24% des adolescentes ont subi le repassage des seins et 1,4 % ont été victimes de mutilations génitales féminines.

Dans la soirée du 8 avril 2022, l’artiste nigériane, Osinachi Nwachukwu, est morte des suites de violences conjugales. Elle a passé cinq jours sous assistance respiratoire et a fini par rendre l’âme. Son mari exerçait, régulièrement, des formes de violences physiques sur cette dernière et, pire encore, demandait à sa progéniture d’y participer. C’était connu de bien de personnes, mais la chanteuse de Gospel supportait ces sévices corporels dans l’espoir que son époux allait changer de comportement.

Le mari a été interpellé par la police. Même au Cameroun, la violence physique est présente, voire récurrente dans de nombreux ménages. Mélanie Talla, la quarantaine à peine entamée est femme de ménage à Yaoundé. C’est malgré elle, qu’elle exerce cette activité. Cette mère de deux enfants a subi au cours de sa vie plusieurs violences physiques et psychologiques infligées par son époux et ses proches. « J’ai connu le calvaire. Le père de mes enfants me battait tout le temps et me privait de repas avec les enfants. Au bout de dix ans de vie commune, j’ai fait quatre avortements involontaires. Malgré cette souffrance, je résistais en pensant qu’il allait changer. Tel ne fut pas le cas jusqu’au jour où j’ai décidé de repartir chez mes parents », raconte la dame. La vie n’est non pas rose chez les tiens où elle est persécutée en longueur de journée par sa famille.

Le cas de Mélanie Talla n’est pas isolé. Comme elle, de nombreuses filles et femmes sont violentées dans leur vie. Selon les statistiques des Nations Unis publiées en décembre 2013, sur les violences faites aux femmes au Cameroun, 52 % d’entre elles ont subi des violences conjugales, 53% des violences depuis l’âge de 15 ans, 30,56% des violences physiques, 53,79% victimes de violences émotionnelles, 30,8% des violences sexuelles, 54,54% d’abus psychologique, 50,24% des violences économiques, 24% des adolescentes ont subi le repassage des seins et 1,4 % ont été victimes de mutilations génitales féminines.

Les mobiles de ces violences polymorphes sont d’ordre socioculturel à la base. Il s’agit des pesanteurs socioculturelles qui prennent des allures de violences inculquées à la progéniture dès le bas âge. Aux garçons sont enseignés les attributs de la virilité liés à l’influence, à l’autorité, à la force et au pouvoir. D’où la capitalisation, par les mâles, de la domination masculine dans le champ des rapports sociaux de sexe. Aux filles, a contrario, sont inculqués les modèles de féminité liés à la tendresse, à la douceur, à l’affectivité, à la tempérance et à la soumission. Il s’agit là de la socialisation différentielle des enfants suivant le genre. Toute chose qui structure un système de ségrégation sexiste des tâches, des rôles, des fonctions et des positions au sein de la cellule familiale. Cela confère, par la même occasion, la posture de dominateurs aux premiers et le statut de soumises aux dernières.

Si les violences conjugales touchent les femmes de toutes les catégories sociales, force est de constater que dans les ménages les plus pauvres, les mères de l’humanité sont, pour la plupart, entièrement dépendantes de leur mari autant pour les dépenses du foyer que pour les charges personnelles. Une situation défavorable que le “pater familia” finit par utiliser comme un moyen de chantage et de bestialisation de son épouse.

Au bout du compte, les problèmes de précarité pécuniaire et matérielle sont, dans la majeure partie des cas, source de violences psychologiques, voire de violences physiques. A cause de cet état de choses, certaines femmes soutiennent que trouver un mari n’est pas une sinécure. Elles sont obligées de rester avec celui qu’elles ont trouvé au prix même de leur vie.

Des jeunes filles, dès leur jeune âge, ont appris à être femmes et à supporter les affres de la vie conjugale au nombre desquelles figurent les violences sexospécifiques. Lorsqu’elles sont violentées, elles s’en vont se lamenter auprès de leur famille et auprès des réseaux associatifs religieux. Chose curieuse certaines de leurs amies et leurs mères leur expliquent qu’elles ne doivent pas mettre en danger leur mariage. Or, selon la législation camerounaise, une action n’est valable en justice que lorsque la personne concernée porte plainte.

Au regard de cette résignation, la vie matrimoniale bascule dans une espèce de vie de “martyr” à laquelle bien de femmes opprimées sont contraintes de se soumettre. Histoire de sauvegarder leurs privilèges de femmes mères, de femmes mariées, de femmes épouses et de femmes au foyer. Entre autres enjeux qu’elles visent, bon gré mal gré, préserver leur ménage ; protéger la progéniture ; éviter d’être confrontées aux représailles de la famille et de la belle-famille et user de tous les mécanismes d’action pour dissiper le regard dédaigneux et avilissant de la société.

Malheureusement, en dépit de tous ces sacrifices, signe de la résilience personnelle, le pire finit souvent par se produire au point où des femmes, au moindre des cas, sont en butte à des atrocités, à des meurtrissures, et au pire des cas, à la mort comme cela a été le cas de la femme mère bastonnée à mort hier à Douala au quartier Bepanda. Triste destin pour les femmes battues ici et ailleurs !

Elvis Serge NSAA

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