Interview: Denis Ngara Bonguen

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« Administrer un comprimé de Mebendazole réduirait de 95% les facteurs de risque»

Selon l’expert de santé publique, coordonnateur régional du programme de lutte contre les Maladies tropicales négligées, pour ces enfants qui ne bénéficient pas de ces molécules, s’exposent à des fatigues générales, des douleurs abdominales, l’anémie généralisée et une porte ouverte aux différentes infections et aux autres maladies. Sur le plan des performances scolaires, on a un retard du développement cognitif qui s’observe généralement par ce que l’enfant est dispersé, il est dégradé par ces maladies; il y a un développement cognitif retardé, donc les performances scolaires également seront retardées.

En prélude à la campagne de déparasitage des enfants de 05 à 14 ans, vous avez organisé à la délégation régionale de la santé publique du Centre un briefing des journalistes. Pourquoi associer les hommes des médias à cette campagne de déparasitage?

Nous avons sollicité la participation des hommes des médias à cette campagne par ce que bien évidemment c’est un secteur qui nous apporte plus dans la mobilisation des populations, dans l’atteinte des cibles en matière de sensibilisation et d’information surtout pour qu’ils puissent nous aider à atteindre les parents qui vont soumettre ces enfants au déparasitage qui va se tenir du 29 avril au 15 mai.

Quelles sont vos attentes à la sortie de ce briefing?

Ce briefing a permis dans un premier temps que nous puissions exposer les enjeux de ces différentes maladies, notamment le  Praziquentel, la schistosomiase et les Helminthiases aux médias, présenter ces enjeux et l’ampleur de la maladie dans un premier temps, pour qu’ils puissent en retour nous aider dans la mobilisation, la sensibilisation de masse des populations dans le cadre de ce déparasitage. De manière précise, ils auront à aller vers les établissements qui couvrent ces cibles; ils vont permettre à ces établissements d’ouvrir les portes par leur sensibilisation de masse. Ils vont permettre à ces établissements d’ouvrir les portes pour que les personnels de santé viennent et que les enseignants administrent le Mebendazole et le Praziquentel à ces enfants. Ils ont donc une action majeure dans la sensibilisation de masse et dans la sensibilisation interpersonnelle.

Si on s’arrête dans la région du Centre, d’après les statistiques que vous avez, quels sont les départements et les arrondissements les plus endémiques?

 La région du Centre compte 32 districts de santé, dans lesquels 16 districts sont hyper endémiques ou méso-endémiques à la schistosomiase et les 16 autres le sont aux Helminthiases. L’hyper-endémicité est beaucoup plus marquée dans le district de Djoungolo, le district de Nkolbisson, et le district de Ndikiniméki, en ce qui concerne la schistosomiase. D’ailleurs, à Ndikiniméki, nous traitons généralement toutes les tranches de la population, tous les enfants jusqu’aux adultes. En ce qui concerne la géohelminthiase, le district d’Ayos est un district hyper-endémique aux géohelminthiases.

Si on observe l’impact, l’ampleur de cette maladie et les effets qui sont observés chez les enfants, notamment les hématuries qu’on observe souvent ou bien des hépatomégalies, les atteintes du foie, on peut résolument comprendre pourquoi le ministre de la Santé publique, Dr Manaouda Malachie, est fortement impliqué dans ce déparasitage qui cible ces enfants. C’est une action forte du ministère de la santé publique, une action conjointe avec le ministère de l’Education de base et également le ministère des Enseignements secondaires. Nous bénéficions également de cette synergie d’action de l’implication du ministère de l’Eau et de l’énergie, qui nous aide dans la construction des forages et des latrines bien aménagées dans les établissements.

D’après vous, qu’est ce qui peut expliquer cette forte endémicité dans ces districts dont vous avez fait allusion?

Cette endémicité, notamment la schistosomiase ou encore la bilharziose, est extrêmement favorisée par les facteurs de risques qui ont trait à l’environnement. Dans un milieu insalubre et propice au développement des schistosomes, on a une prolifération majeure de la transmission des schistosomiases mais beaucoup plus par les comportements inadéquats, l’insalubrité qui mine notre société et les comportements inadéquats de nos jeunes enfants car ils sont hyperactifs, donc généralement sujets à ces contaminations incessantes qui se résument à deux grands facteurs à savoir : le comportement et puis l’environnement.

D’après vous, comment on peut donc présenter cette maladie, quels sont les symptômes qui peuvent permettre à parent de détecter ou alors à un responsable du système éducatif de repérer cette maladie à l’un de ses élèves?

Il faut dire déjà que les vers intestinaux et les schistosomiases sont des maladies parasitaires qui se manifestent par les effets impactés par des vers qui sont pour la schistosomiase les vers plats et pour les vers intestinaux les vers ronds. Ces vers produisent des effets sur la santé des enfants, si on parle des hématuries telles qu’on observe notamment l’écoulement de sang dans les urines au moment de la miction chez les enfants et même chez les adultes.

 C’est un effet majeur; c’est même une complication déjà. Quand on va vers les seuils de complications élevées, nous arrivons à des atteintes du foie et des atteintes de la rate. Lorsque ces organes sont atteints, le pronostic vital de l’enfant généralement est engagé. Voilà, nous arrivons également à des complications telles que des occlusions intestinales pour des géohelminthiases qui nous poussent à des actes chirurgicales pour pouvoir extraire tous les vers qui créeraient ces bouchons dans le gros intestin de l’enfant.

Vous comprenez que par ce simple geste, administrer un comprimé de Mebendazole à un enfant ou bien quelques comprimés de Praziquentel à ces enfants-là réduiraient de 95% ces facteurs de risque qui sont élevés et les complications qui sont élevés. Et réduiraient de 95% les risques de décès par ce que, quand on est dans les complications élevées, le décès est tout aussi évident.

Ce que nous souhaitons c’est que les parents ouvrent résolument leur porte à ces interventions là et qu’ils laissent les enfants se faire déparasiter en milieu scolaire. Car ces déparasitages sont encadrés par le ministère de la Santé et par les professionnels de santé. Donc il n’y a aucun risque par rapport à ces médicaments qui sont de bonne qualité et qui sont certifiés.

Quelles sont les conséquences sanitaires à long terme auxquelles sont exposés les enfants qui refusent ou qui hésitent à se faire déparasités?

Généralement, un enfant qui ne bénéficie pas de son déparasitage régulier qui peut se faire tous les six mois à domicile, ou dans un contexte d’épidémie ou alors de riposte à une épidémie quelconque on peut le faire de manière ciblée et spontanée comme on le dit. Pour ces enfants qui ne bénéficient pas de ces molécules, généralement nous avons des effets immédiats, des signes d’alerte chez enfants comme des fatigues générales, des douleurs abdominales et, quand on va vers des complications, des anémies généralisées qui se produisent très souvent. Et lorsqu’on a une anémie déjà, impactée c’est une porte ouverte, on a un  système de défense qui est affaibli c’est donc une porte ouverte aux différentes infections et aux autres maladies, parce que, sur le plan médical, l’enfant est diminué.

Sur le plan des performances scolaires, on a un retard du développement cognitif qui s’observe généralement par ce que l’enfant est dispersé, il est dégradé par ces maladies; il y a un développement cognitif retardé, donc les performances scolaires également seront retardées. A termes si on cumule ces différents effets, vous voyez que c’est un enfant que nous perdons progressivement et qui deviendra un poids pour la société au lieu d’être un bienfait, un bénéfice pour la société.

Lors de votre présentation, vous avez insisté sur les différents types de cancers dont peuvent être victimes ces enfants. Est-ce que vous pouvez donner plus d’explications là-dessus?

Absolument ! Dans le cadre de la schistosomiase, nous avons dit qu’il y a des atteintes qui se font au niveau du foie, de la rate et au niveau de la vessie quand on est dans les complications. D’après les chiffres de l’OMS, les cancers et la vessie ont pour principal cause la schistosomiase, dont l’une des premières causes au monde du cancer de la vessie diagnostiqué est imputable à la schistosomiase car c’est une complication majeure. Et puis on va aussi vers les cancers du foie lorsqu’on a une atteinte du foie sévère et non gérée à temps.

Si on revient sur la campagne de déparasitage qui a lieu du 29 avril au 15 mai prochain, est ce que vous pouvez donner les chiffres sur le nombre d’enfants à déparasiter, le personnel mobilisé pour pouvoir atteindre les objectifs et la logistique qui accompagne la campagne de déparasitage ?

D’un point de vue stratégique, la campagne est pilotée au niveau national, au sein d’un comité de pilotage national qui est dirigé par le Ministre de la santé, le Dr. Manaouda Malachie, et il est épaulé en cela par son homologue de l’éducation de base, le Pr. Laurent Serges Etoundi Ngoa et le ministre des Enseignements secondaires. C’est une synergie d’action des trois départements ministériels au niveau national qui décline ses instructions beaucoup plus bas.

Au niveau régional, nous travaillons également de conseil avec les délégations régionales de ces sectoriels et nous associons le Miné qui nous accompagne dans la construction des forages et l’aménagement des latrines dans les établissements scolaires. En ce qui concerne le traitement proprement dit, nous servons des enseignants des classes, des chefs d’établissements du primaire et du secondaire qui sont formés par notre personnel technique, à qui donc nous octroyons toutes les ressources financières, médicaments et logistiques en terme de matériel et outils à utiliser pour la collecte des données et fort de la disponibilité de ces outils et de ces matériels, les enseignants vont effectuer les traitements dans leurs salles de classes respectives. Et ils vont dresser des rapports qui vont remonter plus loin.

D’après le processus qui a déjà été lancé, nous avons procédé au renforcement des capacités de tous les délégués départementaux de la région du Centre, tous les inspecteurs d’arrondissements des sectoriels, et ils ont donc commencé à former les directeurs d’écoles depuis le 29 avril dernier pour ce qui est du Mfoundi et enchainer immédiatement avec les traitements qui devrons durer cinq jours. C’est donc une logistique vraiment forte qui est impliquée dans cette campagne, et toutes ces actions se font sous le regard du délégué régional de la santé publique du Centre.

Si c’est important d’évoquer le nombre qui s’est déparasité, on a parlé de 1053000 enfants…

Absolument ! Nous avons une cible bien précise par rapport à la tranche d’âge qui est de toucher les enfants de 05 à 14 ans, mais toucher un 1053000 d’enfants dans la région du Centre c’est un traitement qui va dénoter beaucoup d’enjeux et qui nous pousse à vraiment mettre en place toutes les ressources nécessaires pour qu’on y arrive.

Et pour ces enfants qui ont bénéficié de cette campagne de déparasitage, en cas d’effets secondaires, quelle est la stratégie à adopter?

Nous avons pour la gestion des effets secondaires des pharmaco vigiles qui sont formés par district de santé. Ce sont des pharmaciens à la base et leurs capacités sont renforcées sur la détection des effets secondaires, le suivi de ces effets secondaires donc d’un point de vue de ressources humaines, nous avons par district de santé un dispositif pour la gestion de ces effets secondaires pilotés par les pharmaco vigiles. Les formations sanitaires quant à elles sont appelées à prendre en charge systématiquement et gratuitement tout effet secondaire qui sera référé par un établissement au cours du traitement suivant les prescriptions du Ministre de la santé publique, le Dr Manaouda Malachie.

Quelle attitude devrait adopter les parents pour que les enfants qui prennent les médicaments n’aient pas un malaise ?

Alors ce que nous demandons aux parents et aux enfants généralement et c’est transcrit dans les supports de communication et les fiches d’informations que nous transmettons aux parents, c’est que ceux-ci amènent leurs enfants le jour du traitement avec quelque chose à manger suffisamment au goûté et suffisamment d’eau. Il est vraiment important pour ces enfants de pouvoir manger suffisamment et de boire beaucoup d’eau pendant le traitement pour éviter la survenue des légers effets secondaires, et je devrais noter que ces effets sont pour la plupart du temps mineurs, ils sont légers et passagers, ils finissent toujours par passer. Dans le déparasitage systématique, il peut être gênant pendant 4h de temps et après, l’enfant se porte toujours bien mieux néanmoins, il faut insister sur bien manger et boire suffisamment d’eau avant et après la prise des médicaments.

Pourquoi insister sur la cible 05 -14 ans ?

La cible 05 -14 ans est une cible vulnérable, exposée à ces différentes contaminations de par les gestes essentiels qu’ils posent tous les jours, notamment des gestes liés à l’insalubrité, au comportement de manière majeure. C’est une cible vulnérable beaucoup plus que la cible adulte, mais sinon toutes les tranches d’âges sont concernées par ces infestations, et nous agissons seulement sur les cibles sensibles que nous pouvons protéger et qui sont les plus exposées par ce que regroupée au sein de l’établissement de manière permanente, ça crée un risque important de contamination.

Pour terminer, en terme de prévention, qu’est ce qui est recommandé aux familles, aux responsables et aux chefs des quartiers ; qu’est-ce qu’ils doivent faire pour que les enfants de cette tranche d’âge ne tombent pas malade?

Il faut dire que dans le cadre de la prévention, nous avons plusieurs types de préventions qu’on met en place. Il y a une prévention collective qui est supportée par le service technique du Ministère de la santé publique à travers leur délégation régionale, qui consiste à apporter des points d’eau potable aux différents établissements tel que ça s’est fait dans le district de santé de Ndikiniméki; sur 4 ans, le projet a pu construire 26 forages qui étaient logés aux abords des établissements de telle sorte que ça puisse profiter à la fois aux élèves et aux populations riveraines.

On a pu aménager des latrines pour éviter que les enfants défèquent à l’air libre; c’est ça la prévention collective qui permet que le plus grand nombre bénéficie de ces offres-là qui vont réduire les facteurs de transmissions. Maintenant, il y a la prévention individuelle qui doit être faite et qui est faite à partir de chaque ménage où devra apprendre à l’enfant toutes les mesures d’hygiène et d’insalubrités, comment assainir son milieu, se laver les mains avant de manger tout aliments, laver ses aliments avant consommation, déféquer dans les milieux appropriés, notamment dans les latrines aménagés et autres.

 C’est cette sensibilisation des enfants par les parents qu’il faut faire au niveau des ménages. Dans la communauté, le système de santé utilise des agents de santé communautaire qui ont également pour ambition de sensibiliser la communauté à travers les messages dans les églises, dans les regroupements publics, le collage des affiches qui permettent de sensibiliser sur les bonnes pratiques pour éviter la transmission de ces différentes maladies.

                Propos recueillis par Elvis Serge NSAA

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