Région de l’Ouest : Le Choléra est de retour
24 cas détectés dans la région de l’Ouest. Ils ont été déclarés dans les Districts de Santé de la Mifi, de Foumbot et de Mbouda ; avec 2 cas actifs sous soins intensifs à l’Hôpital régional de Bafoussam.
Le constat est là. Après les régions du Centre et de l’Est, le choléra refait surface dans la Région de l’Ouest. Plusieurs cas dénombrés officiellement jusqu’au week-end dernier par le Délégué régional de la Santé publique pour l’Ouest. « En matière de choléra, un seul cas déclaré est une épidémie. Donc la région de l’Ouest est en alerte maximale », indique Dr Chinmoun Daouda, Délégué régional de la Santé publique pour l’Ouest. Les mesures ont été prises pour circonscrire l’épidémie, pour le bien-être des populations de la région. Les populations de la région ont pour la plupart connaissance du retour de cette pandémie et adoptent dès lors des précautions. C’est le cas de ce propriétaire de moulin à écraser au marché B de Bafoussam : « Ce que je fais généralement, comme j’utilise l’eau des puits, je la javellise en plus du sel que je mets dedans pour que on puisse la consommer. Et j’essaye de bien nettoyer les machines que ce soit à l’intérieur comme à l’extérieur pour garder l’environnement propre ». Et un vendeur de Kossam de poursuivre : « Nous, nous utilisons l’eau du robinet camwater que nous faisons d’abord bouillir parce que la couleur est bizarre et après nous laissons reposer pour que ça se décante. Et le matériel que nous utilisons est bien lavé avec du savon et de l’eau du puits javellisé ».
Cette ménagère de l’arrondissement de Penka-michel par contre, vient d’être informée de la résurgence du choléra dans la région de l’ouest mais elle a quand même une idée des précautions à prendre pour éviter le choléra. « Je ne savais pas que le choléra est déjà de retour ici à l’Ouest. Mais je me rassure toujours que l’eau à boire est propre et quand je n’ai pas le temps de la faire bouillir, je mets un peu de sel dedans quelle que soit son origine. Et je fais aussi bien cuire les aliments, sans économie de bois », a-t-elle déclaré. Pour cette commerçante de fruits au marché A de Bafoussam, la santé de ses clients est une priorité : « Pour préserver la santé de nos clients, on lave bien les fruits avant de les vendre. On lave avec le détergent et on rince dans l’eau propre avant de les vendre ». Seulement, au marché de fruits à Bafoussam, il est courant de voir les commerçants se ravitailler en eau dans les bouches des regards disposés aux abords des immeubles, ou dans des crevasses résultant d’un tuyau d’eau de la CDE enfoui sous terre et abimé. Ce liquide généralement recueilli est directement utilisé, sans javel ou chlore, pour laver ou asperger les fruits et légumes exposés pour la vente.
Transmission de l’infection
En rappel, le choléra est une maladie diarrhéique épidémique strictement humaine, due à des bactéries de l’espèce Vibriocholerae, fut observé pour la première fois en 1854 par Pacini ensuite isolé en 1883 par Robert Koch en Inde. L’Organisation mondiale de la santé estime à 3 millions le nombre de cas et à plus de 95 mille le nombre de décès dus à cette maladie chaque année dans le monde. L’Afrique est le continent le plus touché par cette pandémie de choléra, la 7e du genre, et concentre plus de 50% des cas. Les principaux facteurs favorisant la transmission de l’infection sont le niveau socio-économique et les conditions de vie des populations. Les fortes concentrations de population associées à une hygiène défectueuse jouent un rôle important dans l’apparition et le développement d’une épidémie de choléra.
Adèle BITGA
Interview- Dr Chinmoun Daouda
« Que tout le monde respecte les mesures d’hygiène »
Délégué régional de la Santé publique pour l’Ouest, il dresse l’état des lieux du choléra dans ladite localité et invite les populations à adopter les gestes responsables pour éviter la maladie.
Quel est l’état des lieux du Choléra dans la région de l’Ouest ?
Avec le retour des pluies en mars, nous enregistrons malheureusement déjà des cas de choléra dans la région de l’ouest. A ce jour, selon les dernières statistiques, nous avons déjà enregistré 24 cas dont 2 actifs sous soins intensifs à l’hôpital régional de Bafoussam où nous prenons en charge les cas référés. Trois districts de santé sont concernés : le district de santé de la Mifi qui enregistre la majorité des cas ; le district de santé de Foumbot et le district de santé de Mbouda. De tous les cas enregistrés, 16 sont issus du district de santé de la Mifi. En matière de choléra, un seul cas c’est une épidémie. Donc, la région de l’ouest est en alerte maximale parce que l’on doit mener des interventions énergiques pour éviter la multiplication des cas. 2 cas actifs de choléra, il faut intervenir rapidement parce que c’est une maladie qui se contamine et évolue rapidement vers des complications telles qu’une diarrhée provoquant la déshydratation qui peut passer de légère à sévère conduisant même à la mort.
Quel est le dispositif de riposte contre le Choléra mis sur pied dans la région de l’Ouest ?
Avec les expériences du Covid-19, le système de santé est aguerri en ce qui concerne la riposte contre toutes les épidémies de toute nature. Au niveau régional, nous avons un système de gestion des incidents dont je suis « l’incident manager », et qui est déjà opérationnel. Dans tous les districts de santé de la région, ce système de gestion des incidents existe et est opérationnel. Tout le monde sait ce qu’il faut faire lorsqu’il y a un cas d’épidémie. Nous avons tenu une réunion régionale avec des responsables de système de gestion des incidents de ces 3 districts de santé concernés où nous avons passé en revue des cas confirmés et des directives ont été données.
La prévention est plus importante ?
Parmi ces directives et la plus importante est de prévenir. La prévention en matière de choléra est essentiellement hygiénique. L’hygiène ici concerne l’hygiène des mains, il faut laver les mains avant de manger ; l’hygiène alimentaire, tous les fruits, légumes et crudités que nous achetons dans les marchés doivent être lavées et relavées avant d’être consommées. Maintenant, les aliments froids doivent être systématiquement réchauffés avant d’être consommés. Concernant les aliments que nous retrouvons dans la rue, les instructions que nous avons données aux districts de santé, c’est de sensibiliser les populations à les couvrir pour les mettre à l’abri des mouches. Dans les écoles, éviter aux enfants de consommer des sucettes préparées localement, sans être certains de l’hygiène qui a été utilisée.
Au-delà de la prévention, a-t-on d’autres directives ?
Ensuite, nous passons à une autre phase, celle de la potabilisation de l’eau. Le choléra, faut-il le rappeler est une maladie qui se transmet beaucoup à travers l’eau et nous encourageons les populations à consommer de l’eau potable c’est-à-dire l’eau de la CDE parce que c’est une eau qui a reçu du chlore au niveau de la source avant d’être distribuée. Mais comme les coupures d’eau sont fréquentes et qu’il y a beaucoup de quartiers sans fourniture d’eau de la CDE, nous conseillons donc à ces dernières de potabiliser l’eau qu’elles ont. La porter à ébullition pendant 10 à 15 minutes dans une marmite propre, la laisser refroidir et la conserver dans des récipients hermétiques. Ou encore, on enseigne dans des communautés comment utiliser du chlore pour potabiliser l’eau. En plus, il y a certains comprimés dénommés Aqua Tabs, que nous mettons à la disposition de certains districts de santé pour leur enseigner comment les utiliser avant de les consommer.
Quel est votre message à l’endroit des populations ?
Pour les eaux de puits et de pluies, que ce soit pour faire la vaisselle ou autre, il faut au préalable les potabiliser. Car les repas mis dans des plats lavés avec de l’eau contaminée seront souillés. Toujours dans le cadre de l’hygiène, nous notons aussi l’hygiène environnementale. Il faut garder son environnement propre, les WC doivent être protégés pour que les mouches ne s’y posent pas et viennent se reposer sur nos plats. Ils doivent donc être mis à une distance bien éloignée d’environ 200 mètres de la maison d’habitation.
Interview menée par Adèle BITGA