Médicaments contrefaits – L’ennemi des pharmaciens

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Ces produits issus de la contrebande se vendent dans les villes et villages de l’Adamaoua comme des petits bouts de pain. La célébration ce 12 octobre 2021 de la journée mondiale de lutte contre les faux médicaments remet au goût du jour la difficile interdiction de ces médicaments aux origines douteuses.

La porosité des frontières camerounaises et la moralité peu recommandable de certains agents de l’Etat postés aux frontières du Cameroun seraient pour beaucoup dans l’entrée sur le triangle national des faux médicaments. Vendus dans des conditions qui laissent à désirer, ces médicaments officiellement prohibés par l’Etat constituent à bien des égards un danger pour la santé des populations et de l’économie nationale.   

Dans la ville de Ngaoundéré, ces produits pharmaceutiques se retrouvent dans les coins de rue. Transportés sur la tête, sur les vélos et même dans des comptoirs, ils font de la résistance et se trouvent être des réels concurrents des pharmacies.  La commission créée pour lutter contre ces produits dangereux pour la santé il y a 2 ans au niveau régional semble s’essouffler. C’est le cas de la commission d’arrondissement de Ngaoundéré 3ème qui, depuis sa mise sur pied n’a tenu que 2 réunions. Au cours de celles-ci, le représentant des vendeurs de ces produits à la réunion voyait alors la fin de leurs activités. C’était alors sans compter sur les nouvelles stratégies de l’administration, « Chaque dimanche, nous payons 500f aux policiers. Ça nous donne droit à une semaine de vente. Depuis que nous avons commencé à payer ces « droits », nous ne sommes plus inquiétés par la police parce que c’est le commissaire qui envoie son élément pour lui faire la collecte », raconte Yaya, vendeur des médicaments de la rue. 

L’ « officialisation » de la vente de ces médicaments contraste avec les intérêts des pharmaciens. Ceux-ci crient à l’abandon par l’Etat et s’indignent contre le laisser-aller des autorités. « « La vente des médicaments dans la rue est un crime économique, notre marché de médicaments est contrôlé à 45% par la rue. Ce qui fait perdre environ 60 milliards aux pharmaciens et ce qui fait perdre aussi d’énormes impôts à l’Etat » explique Dr. Ahmadou, de la Pharmacie du Campus.  Les faux médicaments ont de ce fait un double impact, sur l’économie et sur la santé des populations.  Selon ce pharmacien, les médicaments de la rue font perdre à l’Etat d’énormes sommes chaque année et cela est d’autant  plus désolant que lorsqu’on évalue les dépenses des familles pour les soins.

Face à la prolifération des médicaments de contrefaçon, les pharmaciens craignent de fermer et de se mettre aussi à vendre dans la rue. Selon les explications du Dr. Ahmadou, la chaine des faux médicaments est très longue et ce sont parfois les hauts fonctionnaires qui sont derrière ce business nocif. « Si par exemple moi je me mets à dénoncer je serai seul, si un grand type doit parler  on va lui donner quelque chose il va se taire.   On connait les plus grands importateurs des tramadol de Ngaoundéré  qui peut les parlé ? ils te narguent carrément que tu vas me faire quoi ? Même le procureur ne peut pas te recevoir  vous voyez un peu?  On ne peut pas se battre avec eux quelqu’un qui a un capital de 500 millions, d’un milliard qui ravitaille la rue vous pouvez faire quoi contre ces gens ? Et le paradoxe dans tout ça parfois on retrouve les gens qui sont placés haut dans le gouvernement et carrément il y a des pharmaciens je ne vais pas vous cacher » argue-t-il, l’air désolé.

En attendant de trouver la bonne thérapie contre les médicaments de la rue, ces derniers contribuent de circuler sous les yeux et la barbe des autorités au non du laxisme et de la tolérance administrative. 

Jean BESANE MANGAM

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