Endométriose : 1 femme sur 10 en âge de procréer en souffre

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Selon la présidente de la Société camerounaise de fertilité, Dr Ernestine Gwet-Bell qui s’appuie sur des chiffres de sa clinique et de quelques hôpitaux du pays, plus de 30% des camerounaises qui éprouvent des douleurs pendant leurs menstrues ou sont infertiles, sont victimes d’endométriose.

Des femmes atteintes de l’endométriose rapportent des souffrances atroces lorsqu’elles ont leurs règles. «Je me rappelle comme si c’était hier, le jour du mariage de mon petit frère,  javais tellement mal que j’ai abandonné la cérémonie », partage Kévine Mbomo  une fonctionnaire. Au lendemain de l’incident, Mbomo ira voir un gynécologue qui lui prescrira une plaquette d’amoxicilline, du Diclofenac et une plaquette d’Omeprazole pour calmer les douleurs. Comme elle, pendant 05 jours au cours d’un mois, des millions de femmes dans le monde ressentent des douleurs au niveau du bas ventre pendant l’écoulement des menstrues. « Pour moi, souffrir dendométriose, cest affronter des fatigues chroniques, avoir des difficultés à marcher et se trouver dans un état de stress permanent pendant au moins cinq jours au cours d’un mois », renchérit Margueritte Mballa, infirmière à l’hôpital des sœurs de Mvog-Beti dans le sixième arrondissement de la ville de Yaoundé.

Selon les gynécologues, ces douleurs peuvent être provoquées par l’endométriose, une maladie caractérisée par la présence anormale de tissu utérin ou tissu endométrial en dehors de la cavité utérine, qui vont subir l’influence des modifications hormonales, et provoquer des douleurs handicapantes, voire dans certains cas, l’infertilité. Selon le gynécologue Pascal Foumane, les douleurs d’endométriose se manifestent surtout dans la région pelvienne, une partie à l’intérieur du ventre, mais aussi dans l’abdomen et la région lombaire, sont souvent rythmées par les cycles menstruels et peuvent être dues aux lésions de l’endométriose elle-même, à l’envahissement de nerfs par ces lésions, aux réactions inflammatoires de l’organisme, etc. « Comme la femme a un tissu qui produit les règles chaque mois en dehors de là où il devrait être, le sang menstruel produit hors de la cavité utérine sera responsable d’une inflammation. Dans certains cas, lorsque le tissu endométrial se trouve anormalement dans le muscle utérin, la douleur peut s’accompagner de règles abondantes. En dehors de la douleur, les femmes souffrant d’endométriose ont souvent un problème d’infertilité qui devra être exploré», poursuit le gynécologue.

Examen clinique

Malheureusement, aucun traitement n’existe à ce jour pour remédier à l’endométriose.  Pour le Dr Félix Désiré Sah Tatsing, Infirmier PhD, l’endométriose est une maladie qui touche des femmes en âge de procréer, de la puberté à la ménopause. « L’endométriose est encore trop tabou, et certaines sont en errances de diagnostic, sont victimes du jugement des autres, de la famille… Elles décident de se renfermer sur elles-mêmes et de ne plus en parler », souligne le médecin. Selon l’association DouzeFOISparAN, l’endométriose touche 1 femme sur 10 en âge de procréer ; 40 % des femmes en âge de procréer souffriraient de douleurs pelviennes chroniques. Il faut 7 ans en moyenne pour être diagnostiquée. Les femmes qui souffrent de l’endométriose, ou qui présentent les symptômes ont besoin urgemment d’un examen clinique et des examens d’imagerie pour déterminer cette maladie, parce que, dans certains cas, l’endométriose est indolore. Elle est alors détectée au moment d’examens pour expliquer une infertilité.

Si de nombreux problèmes de santé moins connus sont sous-financés et peu étudiés, peu sont aussi courants que l’endométriose, qui touche environ 176 millions de personnes dans le monde. Aux États-Unis, où, comme dans d’autres pays, on estime qu’elle touche une femme sur dix en âge de procréer. Selon la présidente de la Société camerounaise de fertilité, Dre Ernestine Gwet-Bell qui s’appuie sur des chiffres de sa clinique et de quelques hôpitaux du pays, plus de 30% des camerounaises qui éprouvent des douleurs ou sont infertiles sont victimes d’endométriose. La douleur n’est pas la seule conséquence de l’endométriose. Une étude menée dans 10 pays a révélé que l’endométriose coûte à chaque patiente un total annuel moyen de 9 579 euros ( 6 226 350 Fcfa) en soins de santé, productivité et qualité de vie, soit plus de 26 euros (16 900 Fcfa) par jour. Entre la fréquentation régulière des spécialistes, les batteries de tests et le fait que certains des médicaments ne sont mêmes pas disponibles dans le pays, vivre avec cette pathologie est un chemin de croix.

Elvis Serge NSAA

 

Interview

Dr Félix Désiré Sah Tatsing

« 12% de femmes qui consultent pour infertilité présentent une endométriose »

Selon l’infirmier PhD, en service au ministère de la Santé publique, 30% de camerounaises qui éprouvent des douleurs du bas-ventre pendant les menstrues, sont victimes d’endométriose.

C’est quoi l’endométriose ?

L’endométriose est une maladie gynécologique qui se caractérise par le développement de l’endomètre dans d’autres organes autres que la cavité utérine. C’est une maladie qui peut passer inaperçue chez certaines femmes.  Lorsqu’elle se manifeste, le symptôme majeur est la douleur généralement ressentie au niveau du bas-ventre à chaque cycle menstruel. Cependant cette douleur peut aussi se retrouver dans le ventre ou au niveau de la région lombaire. À la douleur peut ou pas s’ajouter l’incapacité de la femme à faire des enfants.

Vous avez des chiffres par rapport à la quantité de femmes qui en souffrent ?

L’endométriose est une maladie fréquente. Les auteurs estiment à plus de 180 millions, le nombre de femmes qui seraient atteintes de cette maladie dans le monde. Au Cameroun, elle est très peu documentée. Grâce aux études menées dans quelques hôpitaux, nous savons de nos jours qu’en moyenne, 30% de camerounaises qui éprouvent des douleurs du bas-ventre pendant les menstrues, sont victimes d’endométriose et que 12% des femmes qui consultent pour infertilité, présentent une endométriose.

A votre avis, est-ce que l’endométriose ne constitue pas un problème de santé publique ?

L’endométriose est donc un problème de santé publique qui repose sur quatre déterminants inquiétants pour la femme : L’atrocité et la chronicité des douleurs ; L’abondance des saignements chez certaines femmes avec les conséquences qui peuvent en découler ; la perturbation des activités et l’infertilité.

Vous avez déjà réalisé des opérations en rapport avec l’endométriose ?

La prise en charge dépend des symptômes que la femme présente. En cas de douleur, on administrera soit les antalgiques, soit un traitement progestatif, soit on fera une chirurgie par célioscopie. Lorsqu’il s’agit de l’infertilité, la prise en charge se résumera à la fécondation in vitro.

Est-ce que la femme camerounaise  consulte un médecin pour ses règles douloureuses ?

Très peu de femmes camerounaises consultent un médecin pour la douleur menstruelle isolée qui culturellement s’assimile à la condition « normale » de la femme qui doit y faire preuve de résilience ou pour les autres, recourir à l’automédication. Dans la plupart de temps, celles-ci ne consultent tardivement que lorsqu’à la douleur, sont associés d’autres symptômes inquiétants tels que le saignement abondant et l’infertilité.

Est-ce qu’il n’y a pas une carence d’informations au Cameroun ?

Je profite de l’occasion que nous offre la journée internationale de l’endométriose, pour suggérer aux femmes en âge de procréer et particulièrement aux adultes qui présentent une dysménorrhée secondaire, de consulter un professionnel de la santé qui par un examen clinique et des examens d’imagerie fera le distinguo entre les règles douloureuses primaires et une douleur menstruelle qui débute à l’âge adulte. Cette dernière étant la conséquence de plusieurs maladies gynécologiques telles que l’endométriose, les fibromes, l’adénomyose, les kystes, le rétrécissement du col utérin, etc.

Quels sont les conseils que vous pouvez donner aux femmes qui souffrent de règles douloureuses ?

Je suggère également qu’une large communication de masse soit faite sur cette maladie qui de mon avis, ne bénéficie pas encore assez d’une sensibilisation à grande échelle au moment où il n’existe pas de technique de dépistage aussi bien dans la population en général, que pour les femmes à risque.

Propos recueillis par Elvis Serge NSAA

 

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