Impact Santé Afrique (ISA), en collaboration avec le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP), a présenté les résultats d’une cartographie des organisations de la société civile (OSC) actives dans la lutte contre le paludisme au Cameroun.
Objectif: renforcer la collaboration entre ces OSC et le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP) pour une lutte plus efficace contre la maladie.
La cartographie révèle 95 OSC actives, dont les actions se concentrent sur la communication pour le changement de comportement, la sensibilisation et la distribution de moustiquaires. Des défis persistent, tels que le manque de ressources et l’accès limité aux intrants. L’unification des OSC et des communautés est cruciale pour atteindre l’élimination du paludisme d’ici 2030.
Le paludisme sévit en Asie, en Amérique latine et, surtout, en Afrique où l’on compte près de 90 % des décès, principalement de jeunes enfants. Sur ce continent, la maladie n’est pas seulement une catastrophe sanitaire, mais constitue aussi un frein majeur au développement économique et social. Les dépenses directes liées au paludisme représentent en moyenne entre 12 et 14 % du revenu des foyers, dont les membres actifs perdent également 4 à 7 jours de travail, selon le Dr Kouadio. Les conséquences économiques de cette maladie sont d’autant plus significatives que les populations vivent avec moins d’un dollar US par habitant par jour, ainsi qu’une assistance limitée de la part de la société.
Les ministres de la Santé de onze pays africains s’engagent à « mettre fin aux décès dus au paludisme » d’ici à 2030, selon une déclaration signée mercredi 6 mars lors d’une conférence ministérielle de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à Yaoundé, au Cameroun. Dans la même veine, l’ONG Impact Santé Afrique (ISA), en collaboration avec le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP), a présenté à la presse nationale le rapport final de la cartographie des organisations de la société civile (OSC) actives dans la lutte contre le paludisme au Cameroun, ce 19 juillet 2024, à Yaoundé. L’objectif de cet atelier est de présenter les principaux résultats de la cartographie des OSC et de discuter des pistes de collaboration entre ces organisations et le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP).
Une cartographie des organisations de la société civile (OSC) de lutte contre le paludisme au Cameroun a été réalisée du 07 au 17 février 2024, par Impact santé Afrique (ISA) en étroite collaboration avec le programme national de lutte contre le paludisme PNLP. L’objectif visé était de combler le manque d’informations concernant les organisations qui travaillent sur le paludisme au Cameroun, leurs expériences, leurs cibles, leurs partenaires et leur appartenance à différents réseaux. Le financement de cette étude a été assuré par l’initiative à travers Expertise France dans le cadre du projet « Equités accès palu ». 95 organisations de la société civile (OSC) sont reconnues sur le plan légal : 78 % des OSC sont des associations, 41 % des OSC sont dirigées par des femmes, 60 % des OSC déclarent connaitre les principales stratégies de lutte contre le paludisme, 41 % des OSC ont mis en place des procédures pour lutter contre la discrimination fondée sur le genre.
Activités et cibles des OSC : la population générale 66 %, les enfants de moins de 5 ans 59 %, les femmes enceintes 58 %, les déplacés internes 27 %, les personnes handicapées 25 %, les orphelins 21 %. La communication pour le changement de comportements est l’activité la plus menée 85 % par les OSC. 51 % des OSC sont membres d’un réseau national d’OSC dont les principaux sont CS4ME, CHOI et RESIPAT. Ressources : 53 424 individus travaillent au sein de ces OSC, dont 28 % sont des volontaires. 55 % et 45 %. 92 % des OSC ont déclaré que leur première source de financement est la contribution des membres.
Sur les 3 dernières années, 12 % des OSC ont bénéficié de financements, principalement dans le domaine de la communication pour le changement social. Ces 3 dernières années, les OSC ont bénéficié de 2,8 milliards de FCFA pour leurs projets. Les fonds provenaient principalement du Fonds mondial 57% ; fonds propres 15%, PMI 3% OMS 3 %, UNICEF 3 %. Principaux défis : rupture de stocks en intrants antipaludiques, sensibilisation de la population sur les risques liés au paludisme, mauvaise utilisation des MILDA, accès limité aux services de santé. Principaux besoins : ressources financières pour mener les activités de lutte contre le paludisme 92 %, besoin en formation sur les stratégies de lutte contre le paludisme 88 %, ressources opérationnelles pour le fonctionnement 82 %.
Impact Santé Afrique vise à créer un groupe de plus en plus large et non traditionnel de partenaires de la lutte contre le paludisme, afin d’aborder les problèmes sous-jacents et d’améliorer l’accès aux services de lutte contre le paludisme pour les personnes qui en ont le plus besoin.
Les populations déplacées internes et personnes difficiles à atteindre, groupes à faible revenu, femmes enceintes, enfants de moins de 5 ans (zones rurales, zone frontalière) sont les populations cibles. Les populations mobiles et difficiles à atteindre, les groupes à faibles revenus, les femmes enceintes, les enfants de moins de 5 ans (rural). Réfugiés, populations autochtones, femmes enceintes, enfants de moins de 5 ans.
Renforcer la taskforce nationale PNLP-Société civile (CS4ME) et l’utilisation des données sur le paludisme afin d’effectuer des analyses conjointes et d’accroitre l’efficacité les stratégies de plaidoyer collectives ; contribuer à améliorer l’accès aux intrants au niveau des agents de santé communautaire (ASC), en particulier pour les plus vulnérables dans les quatre districts, démontrer l’efficacité de la société civile à mobiliser et contribuer à rendre l’environnement de la lutte contre le paludisme au Cameroun, plus inclusif intégrant les problématiques liées au genre pour un meilleur accès et utilisation des services paludisme par les groupes vulnérables.
Le CS4ME a pour mission de : renforcer, organiser et unir la société civile, engager et donner aux communautés affectées les moyens d’être des catalyseurs de changement créatifs et audacieux, accélérer l’élimination du paludisme. Le CS4ME travaille à atteindre ses objectifs en facilitant le partage d’informations et de bonnes pratiques entre les OSC, en soutenant le plaidoyer pour des politiques et des programmes de lutte contre le paludisme plus efficaces, en renforçant les capacités des OSC à mener des interventions efficaces de lutte contre le paludisme.
En unissant leurs forces, les OSC et les communautés peuvent jouer un rôle crucial dans l’élimination du paludisme. Le Réseau mondial de la société civile pour l’élimination du paludisme (CS4ME) est une plateforme mondiale qui rassemble des OSC engagées dans la lutte contre le paludisme. Le CS4ME travaille à renforcer les capacités des OSC, à faciliter le partage d’informations et de bonnes pratiques et à plaider pour des politiques et des programmes de lutte contre le paludisme plus efficaces.
L’initiative Roll Back Malaria (RBM) est un partenariat mondial qui vise à réduire de moitié la mortalité due au paludisme d’ici 2030. RBM travaille avec les OSC et les communautés pour mettre en œuvre des interventions efficaces de lutte contre le paludisme.
Ces initiatives montrent que l’unification des OSC et des communautés est possible et peut avoir un impact positif sur la lutte contre le paludisme. L’unification des OSC et des communautés est essentielle pour atteindre l’élimination du paludisme. En travaillant ensemble, les OSC et les communautés peuvent sensibiliser, prévenir et prendre en charge le paludisme, et plaider pour des politiques et des programmes plus efficaces de lutte contre le paludisme.
Elvis Serge NSAA
« Le paludisme est l’une des principales causes de mortalité et de morbidité au Cameroun »
Comme nous le savons tous, le paludisme est l’une des principales causes de mortalité et de morbidité au Cameroun. Et pour lutter contre cette pandémie, il y a un plan stratégique qui a été développé et les activités sont mises en œuvre sur le terrain. Si on constate actuellement que la grande partie des financements des activités pour la lutte contre le paludisme vient des partenaires extérieurs, et qu’il s’est posé la question de savoir si on veut vraiment résoudre et lutter contre ce fléau, il faudrait qu’on mobilise les ressources à l’échelle nationale.
C’est pour cela qu’il fallait savoir quelles sont les organisations de la société civile qui investissent dans le paludisme. C’est dans ce cadre que, l’ONG Impact Santé Afrique, nous a contactés pour établir cette cartographie qui doit donner la liste des organisations civiles qui font dans la lutte contre le paludisme, où est-ce qu’on les localise ? Quelles sont les activités qu’ils mènent ? Et à partir de cette liste, on pourra mieux cibler pour connaître déjà quelles sont celles qui travaillent avec le ministère ? Comment on peut améliorer leur capacité ? Comment on peut les soutenir pour qu’ils mènent plus d’activités sur le terrain ? Afin qu’on réduise de manière significative le fardeau du paludisme au Cameroun. Avec cette cartographie, on a une base solide des activités et de ces organisations. On pourra, avec le ministère de la Santé et d’autres partenaires, les appuyer, par exemple à travers les formations, les financements, pour qu’ils puissent être plus efficaces dans leurs activités de lutte contre le paludisme sur le terrain.
Quelles sont les limites de cette étude ?
Comme limites de cette étude, on a eu des organisations qui n’ont pas accepté de participer ; et, ensuite, on a aussi le temps qui était limité : on n’avait pas assez de temps pour pouvoir prendre tous les volets et aller aux détails de l’information. La plupart des informations étaient des déclarations des membres. Donc on ne pouvait pas confirmer de manière claire. Mais c’était notre objectif d’avoir juste une première base, et après, on pourra faire d’autres études plus approfondies pour pouvoir mesurer, par exemple, quel est l’apport des organisations de la société civile camerounaise dans la lutte contre le paludisme. Parce qu’on se base toujours sur les chiffres, qui sont connus de manière officielle ; mais il y a beaucoup de travail qui est fait par ces organisations qui n’est pas encore capitalisé. Donc, la limite, en fait, c’est qu’on n’est pas allé jusqu’à ce point, mais qui peut être l’objet d’une autre étude qu’on pourra mener prochainement dans le domaine.
De manière concrète, qu’est- ce que vous comptez apporter individuellement pour capitaliser sur le paludisme au Cameroun en 2030 ?
De manière individuelle, il y a la sensibilisation de notre entourage, déjà sur la prévention, parce qu’en santé publique, prévenir vaut mieux que guérir. Il faudrait déjà avec mes amis et les autres personnes de parler, d’utiliser les mesures barrières comme la moustiquaire, désinfecter son environnement et autres. Participer aux autres études comme celles-ci qui vont permettre d’avoir des évidences pour les bailleurs de fonds et autres personnes qui veulent investir dans la lutte contre le paludisme.
« Nous connaissons environ une centaine d’organisations de la société civile »
Quel est l’objet de cet atelier ?
Cet atelier portait sur, la restitution des résultats d’une étude portant sur la cartographie des organisations de la société civile, qui interviennent ou qui participent dans la lutte contre le paludisme au Cameroun.
Selon le rapport, qu’est-ce qui en ressort ?
Il en ressort que nous avons de nombreuses associations qui interviennent d’une manière ou d’une autre dans la lutte contre le paludisme et qui étaient jusque-là méconnues par le programme. Donc, nous connaissons environ une centaine d’organisations de la société civile et il en ressort 995 organisations de la société civile. Et nous avons aussi ressorti ces organisations qui interviennent dans la lutte contre le paludisme ; environ 54 % seulement ont une lettre de collaboration signée du ministère de la santé publique, si non 95 % ont au moins une existence légale, donc un récépissé de déclaration d’organisation reconnu par le délégué administratif. On a aussi noté que le nombre d’associations qui interviennent maîtrisent à moins de 50 % le Plan stratégique national de lutte contre le paludisme. On a également retenu que ces associations avaient besoin d’être encadrées. Ils ont exprimé les attentes de formations, de supervisions pour pouvoir mieux contribuer à la lutte contre le paludisme. Voilà quelques résultats clés que j’ai pu retenir de cette restitution.
Qu’est-ce qu’une étude comme celle-ci vous apporte à vous au niveau du PNLP ?
Cela nous apporte les données de base qui peuvent éclairer notre planification des activités. Parce que dans la lutte contre le paludisme, qui est un fardeau pour la santé des Camerounais, et dans la réponse contre le paludisme, le gouvernement élabore à travers le ministère de la Santé un document appelé plan stratégique national. Nous avons actuellement un plan stratégique national de lutte qui couvre la période 2024-2028. Généralement, lors de l’élaboration de ces documents, en maîtrisant la cartographie des organisations de la société civile, on pourra mieux planifier des activités pour les accompagner. C’est le document qui résume les besoins du pays en matière de lutte contre le paludisme et que les partenaires s’appuient sur ce document pour voir les domaines d’intérêts qu’on devrait appuyer. Le gouvernement utilise également ce document ; donc c’est déjà très important pour la planification et également pour la mobilisation des ressources pour pouvoir accompagner effectivement ces organisations de la société civile. Sur la base des besoins qu’ils ont exprimés.
Il en est ressorti des limites : est-ce que cela aura un impact en ce moment pour vous ?
Ce que nous avons appelé limites, ce sont les aspects que la présente étude n’est pas censée couvrir. Par exemple, cette étude n’a pas pu ressortir les évidences que chaque organisation identifiée disposait de tous les éléments administratifs requis. On devrait dans le rapport pouvoir ressortir les aspects que l’étude n’a pas pu couvrir afin de permettre à d’autres études de pouvoir compléter les données pour qu’on ait davantage d’évidence.
Actuellement, pour prendre des décisions dans la lutte contre le paludisme, le Gouvernement et ses partenaires s’appuient sur des évidences indiscutables. On doit mentionner un nombre d’organisations de la société civile qui interviennent dans la lutte contre le paludisme. On devrait s’assurer de la qualité de ces organisations, de la qualité de leur contribution et des évidences qui soutiennent qu’ils apportent réellement une contribution intéressante afin de pouvoir se décider si on doit mobiliser les moyens pour les accompagner.
« Comment est-ce qu’on va utiliser ces résultats de façon pertinente pour faire avancer l’agenda de la lutte contre le paludisme ? »
Quelle est la raison de cet atelier ?
Quand on collecte des informations, aussi importantes que la cartographie, quand on a les résultats de recherches, l’étape la plus importante, c’est diffuser. Diffuser, c’est appeler à utiliser les données ou des résultats de recherche qui n’ont d’aucune importance quand elles ne sont pas présentées aux publics susceptibles de les utiliser.
Alors les données dans les tiroirs ne servent à rien, et si vous regardez bien, pendant cette session les résultats, ce sont évidemment les membres de la société civile, ce sont les partenaires institutionnels et les représentants des bailleurs qui étaient présents. Ce sont des institutions, ce sont des personnes, ce sont des organisations qui peuvent utiliser ces résultats pour porter en avant la lutte contre le paludisme. Comme vous l’avez vu, il y a eu un panel de discussions par la suite. Après la présentation des résultats, c’est voir comment est-ce qu’on va utiliser ces résultats de façon pertinente pour faire avancer l’agenda de la lutte contre le paludisme. Et sur chacun des panels, il y avait des représentants du PNLP.
Les organisations de la société civile ont toujours existé, mais cartographiées de façon formelle lors d’une étude par un expert national. C’est la preuve que ces sociétés civiles existent évidemment, qu’elles font beaucoup de choses et qu’il faudrait qu’elles soient visibles, qu’elles puissent contribuer et collaborer auprès du programme national de lutte contre le paludisme et évidemment auprès du ministre de la Santé ; globalement, pour faire avancer la lutte contre le paludisme.
Qu’est -ce que cette cartographie va changer dans le paysage ?
La cartographie a permis de voir chaque organisation dans son cadre d’intervention, sur l’échiquier national, voir qui fait quoi et où ? Cela est très important. On les a nommés, on les a ressortis, on a effectivement présenté même leur adresse ; ce qui fait qu’on sait à qui s’adresser en cas de besoins précis. Voilà l’essentiel.
Propos recueillis par Audray NDENGUE Stg