Conseil Régional de l’Est : Une institution en pleine expansion

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Le conseil s’emploie à être à la hauteur de ses attributions sur le plan régional, notamment par l’élaboration d’un plan régional de développement au cours de sa première année.

Malgré des contraintes financières et humaines, cette administration s’efforce au quotidien de répondre aux besoins de la population et de développer la région.

Dans une interview, le Président du Conseil Régional de l’Est, Alphonse WOUAMANE MBELE, dresse un bilan mitigé de l’action menée depuis la création de l’institution et appelle à un renforcement des moyens alloués.

La composition du Conseil Régional de la Région de l’Est est similaire à celle des autres conseils régionaux du Cameroun, avec 90 conseillers, dont 20 représentants du commandement traditionnel et 70 délégués de département provenant des 33 arrondissements de la région. Malheureusement, le conseil a perdu cinq conseillers au cours des quatre dernières années.

Malgré des difficultés telles que le non-respect des délais pour les sessions trimestrielles, le conseil a tout de même réussi à tenir les quatre sessions annuelles prévues. En général, le Conseil Régional de l’Est parvient à organiser et à mettre en œuvre ses projets à hauteur de 60 %. Bien que confrontée à des défis, cette institution, nouvellement mise en place, s’en sort plutôt bien compte tenu de la conjoncture économique et financière difficile qui touche également les collectivités territoriales.

Le Conseil Régional de la Région de l’Est accorde en outre une grande importance aux enjeux sociaux, sanitaires et environnementaux. Dès sa première année, le conseil a élaboré un plan régional de développement basé sur un diagnostic participatif mené dans les 33 arrondissements de la région de l’Est. Il entend également réaliser plusieurs projets dans le secteur de la santé.

En tant que collectivité territoriale décentralisée et démembrement de l’État, le conseil doit fonctionner sur la base de compétences transférées. Cela signifie que les ressources correspondantes doivent également être transférées simultanément, conformément à la loi. Dans le contexte de crise au Cameroun, le conseil émet un plaidoyer en faveur du transfert effectif de ses ressources, afin de pouvoir planifier ses actions sur le terrain. Cela inclut des ressources humaines, matérielles et financières. Si cela était respecté, le conseil ne se plaindrait pas autant.

Par ailleurs, nous plaidons également pour une fiscalité locale. Depuis 2021, nous attendons une loi sur ce sujet, qui a été demandée avec insistance par la plus haute hiérarchie de l’État. Nous avons misé sur cette loi dans l’espoir de la soumettre au Parlement, mais cela n’a pas encore été fait, limitant considérablement nos moyens financiers en tant que conseils régionaux. De plus, nous rencontrons également des problèmes professionnels en attendant une loi sur la fonction publique locale qui tarde à venir. Cela nous empêche non seulement d’avoir les experts nécessaires pour mener à bien notre travail, mais aussi de louer les services d’experts externes, ce qui affecte nos actions et nos résultats souhaités.

Benjamin Ebelle

 

 

Interview

« Le Conseil Régional de la Région de l’Est se porte tant bien que mal, c’est le moins que l’on puisse dire. »

Alphonse WOUAMANE MBELE,Président du Conseil Régional de la Région de l’Est

Monsieur le Président du Conseil Régional de la Région de l’Est, comment se présente le Conseil Régional de la Région de l’Est ?  

Le Conseil Régional de la Région de l’Est est, comme les conseils régionaux des 10 régions du Cameroun, constitué de 90 conseillers régionaux, dont 20 conseillers du commandement traditionnel et 70 conseillers délégués de département, issus des 33 arrondissements de la région de l’Est. Jusqu’à présent, nous avons malheureusement perdu 5 de nos conseillers en l’espace de 4 ans, le dernier étant décédé la semaine dernière. Nous avons également tenu nos 4 sessions ordinaires annuelles, même si nous n’avons souvent pas pu respecter les délais de tenue trimestrielle de ces sessions. Malgré cela, nous avons réussi à tenir les quatre sessions prévues par an. Nous avons évidemment des difficultés dont nous pouvons parler, si vous en convenez, mais de manière globale, nous arrivons à organiser et à réaliser nos projets à plus de 60 % comme nous le prévoyons. Donc, le Conseil Régional de la Région de l’Est se porte tant bien que mal, c’est le moins que l’on puisse dire. Nous savons que c’est un mandat de mise en place d’une institution nouvelle, une institution qui se construit alors que la conjoncture dans le pays n’est pas très bonne sur le plan économique et financier, ce qui impacte négativement les indices des démembrements des collectivités territoriales qui doivent se mettre en place. C’est ce que nous pouvons vous dire du point de vue de la présentation du Conseil Régional de l’Est.

 

Le volet social, sanitaire et même environnemental a une place de choix au sein de votre conseil. Qu’est-ce que le Conseil Régional de la Région de l’Est a prévu pour le secteur de la santé ?  

Dès la première année, nous avons élaboré un plan régional de développement, qui est le fruit d’un diagnostic participatif réalisé dans les 33 arrondissements de la région de l’Est. Lors de ce diagnostic, nous avons échangé avec les populations et les élus, ce qui nous a permis de dégager les attentes et les désidératas de la population. Par la suite, nous avons approfondi nos études avec l’appui d’experts et de bureaux de consultants pour réaliser le plan régional de développement, qui a été adopté par le Conseil réuni en session ordinaire. Ce document rassemble l’ensemble des problèmes de la région et établit nos priorités. Les conseillers régionaux se sont accordés sur les principaux problèmes à résoudre dans la région de l’Est, classés par ordre de priorité. En premier lieu, il y a le désenclavement, suivi de l’énergie, des problèmes de santé, de l’éducation, et enfin des questions environnementales, pour lesquelles nous avons envisagé un certain nombre de solutions et d’actions. Concernant la santé, nous avons engagé des études spécifiques pour établir un état des lieux des structures sanitaires dans la région. Cet état des lieux a permis d’identifier les besoins, tant en termes de réhabilitation des infrastructures que d’équipement et de construction de nouvelles structures. Nous avons déjà commencé à mettre en œuvre certaines actions, comme la réhabilitation de quelques hôpitaux de district et l’équipement d’autres structures. Nous avons également entamé la construction de certains bâtiments, qu’il s’agisse de blocs administratifs ou de blocs opératoires. Nos actions sont programmées selon les priorités établies dans notre plan régional de développement. En ce qui concerne l’environnement, nous avons commencé des actions concrètes, notamment pour la construction de notre siège. Je crois que nous sommes l’une des rares régions à avoir engagé une étude d’impact environnemental pour cette construction. Nous avons obtenu, il y a environ trois semaines, le certificat environnemental délivré par le ministère de l’Environnement, de la Protection de la Nature et du Développement Durable. Nous nous sommes engagés dans l’élaboration d’un plan d’action environnemental régional. Les dossiers d’appel d’offres sont très avancés, et nous sommes persuadés qu’avant deux mois, nous aurons attribué l’étude à un cabinet spécialisé pour élaborer le plan d’action environnemental dont nous avons besoin pour la région de l’Est.

 

En ce qui concerne les ressources humaines, comment le Conseil Régional de la Région de l’Est perçoit-il le manque de spécialistes, comme les pédiatres, les cardiologues et d’autres experts essentiels dans la région ?  

C’est une triste réalité que nous vivons. Il s’agit d’un vieux problème, un problème qui perdure. Nous avons souvent discuté de cette situation avec les responsables des départements ministériels concernés. La vérité est que les ministres de la Santé Publique ont souvent affecté des spécialistes ici, mais nombre d’entre eux ne se présentent pas à leur poste, ou bien ils viennent, prennent service, puis repartent sans revenir exercer à l’Est. Ils sont nombreux dans cette situation, et lorsqu’ils quittent ou restent à Yaoundé, ils continuent à exercer sans que des sanctions ne soient prises à leur encontre. Il est regrettable que ces experts, qui pourraient soigner certains Camerounais, ne le fassent qu’à Yaoundé, Douala ou dans d’autres grandes villes. Quant à la gestion du personnel de santé, notamment des médecins et des spécialistes, qui ne relèvent pas de nos compétences en tant que président du conseil, nous ne pouvons que donner des conseils et faire un plaidoyer. Nous ne pouvons pas trouver la solution nécessaire pour résoudre ce problème ; cela relève de l’administration. Actuellement, la ville de Bertoua, dans la région de l’Est, bénéficie d’un grand hôpital : le Centre Hospitalier Régional, récemment inauguré par le Premier ministre, sous de très hautes instructions du chef de l’État, Son Excellence Paul Biya. Cet hôpital est doté d’infrastructures modernes et d’équipements sophistiqués de dernière génération, comme l’ont confirmé les médecins. Nous espérons que cela incitera les spécialistes à venir travailler ici, car avoir des équipements de pointe ne suffit pas ; il faut également des experts capables de les utiliser.

 

Le Conseil Régional a pris le leadership des comités de gestion des hôpitaux de district. Quel état des lieux en faites-vous ? Comment envisagez-vous d’améliorer l’offre de services dans ces structures dont vous assurez la présidence de la gestion ?  

Effectivement, nous avons déjà nommé tous nos présidents de comités de gestion dans les 15 hôpitaux de district de la région de l’Est. L’état des lieux, c’est ce dont je vous ai déjà parlé : nous avons commandé une étude qui nous a permis d’évaluer la situation dans les hôpitaux. Nous prenons également conscience des niveaux de gouvernance dans ces établissements. Nous avons jugé nécessaire d’engager des formations et des occasions de discussion entre nos présidents de comités de gestion et les directeurs des hôpitaux pour clarifier nos attentes en matière de collaboration. Il est vrai que la situation initiale n’était pas aisée en termes de collaboration, mais des efforts sont en cours. Nous avons identifié le manque de moyens financiers comme le principal problème actuel dans ces différentes formations. Il semble que beaucoup d’espoir repose sur les conseils régionaux, comme si nous avions des ressources. En réalité, les conseils régionaux manquent de moyens pour décoller véritablement. Cependant, nous avons une volonté forte et nous avons engagé de nombreuses actions. Nous sommes conscients que la résolution de tout problème commence par un diagnostic, et nous pensons être suffisamment avancés dans cette voie.

 

Quel est le regard du Conseil Régional vis-à-vis de la Couverture Santé Universelle, un an après le lancement de la phase 1 ici même à l’Est ?  

Nous avons été très honorés par la décision du chef de l’État de lancer cette opération ici à l’Est. En ce qui concerne les statistiques fournies par les services de la délégation régionale de la santé, les enrôlements se déroulent très bien. Les chiffres augmentent jour après jour, ce qui montre que les populations adhèrent véritablement à cette couverture santé universelle. Nous considérons cela comme une très bonne initiative, et nous souhaitons exprimer notre gratitude au chef de l’État pour cette action en faveur des populations. Nous remercions également le ministre de la Santé, qui est toujours sur le terrain, prenant le temps d’expliquer aux gens l’importance de cette couverture santé universelle. Nous croyons que nous allons faire de grands progrès dans ce domaine, car de plus en plus de personnes seront prises en charge grâce à cette couverture, surtout avec la sensibilisation en cours. Lorsque les gens réalisent qu’en payant simplement 6000 francs, ils peuvent bénéficier d’une prise en charge durant une période significative face à plusieurs maladies, ils seront enclins à adhérer à cette nouvelle politique de santé.

 

En termes de plaidoyer, que faut-il pour que les indicateurs bougent et que le Conseil Régional puisse davantage contribuer ?

Pour nous, le plaidoyer est très simple. En tant que collectivités territoriales décentralisées, nous fonctionnons sur la base des compétences transférées. La loi stipule que les compétences transférées doivent être accompagnées des ressources correspondantes. Dans le contexte de crise multiforme que traverse le Cameroun, nous demandons que les ressources afférentes aux compétences transférées soient effectivement transférées de manière concomitante. Cela nous permettrait de planifier normalement les actions à mener sur le terrain. Les ressources en question comprennent les ressources humaines, matérielles et financières. Nous croyons que si cela était respecté, nous n’aurions pas tant à nous plaindre. Un autre élément de plaidoyer concerne la fiscalité locale. Depuis 2021, nous attendons le texte de loi sur la fiscalité locale. Nous avons suivi le processus, espérant que ce texte soit soumis au Parlement. Cependant, jusqu’à présent, il n’a pas été promulgué, ce qui limite les ressources financières des conseils régionaux. Nous rencontrons également des problèmes au niveau professionnel, en raison d’un texte portant sur la fonction publique locale qui tarde à être publié. Cela pose de réels problèmes, car non seulement nous manquons d’experts nécessaires pour accomplir notre travail, mais quand bien même nous n’avons pas de moyens pour faire appel à des experts extérieurs, nous ne pouvons pas mener à bien les actions souhaitées. Ainsi, nous ne pouvons pas atteindre les objectifs que nous nous étions fixés. Le plaidoyer est donc clair.

Interview réalisée par Benjamin Ebelle

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